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LES CHEVEUX ROUGES DE LA MÈRE
Les cheveux rouges de la mère déteignaient sur nos draps
Sur l'érable qu'elle poursuivait de ses assiduités
Compatissant à la chute de ses feuilles dans nos livres
Pansant les nervures blessées
Enterrant les mortes entre deux mots pierreux
La mère lançait vaisselle cassée et imprécations à l'automne
Qu'un cil tombe de nos yeux
Et vos vœux seraient exaucés
Nous étions autrement
Beaucoup en un
Comme les images qui durent longtemps
Comme la pluie quand personne n'ose la contredire qu'elle devient
volubile
La mère nous voulait avec des bras longs comme les ruisseaux de la Saint-Jean
Pour nous introduire dans son sommeil
Et que les châtaignes poursuivent leurs guerres sous la cendre de l'âtre
Ce n'étaient pas leurs crépitements qui allaient nous réveiller
[…]
Faces tournées vers la rue
La mère nous accrochait des bras
Nous collait des sourires et des battements de cils pour séduire les
visiteurs absents
aux choses longilignes confectionnées avec nos sueurs manquait l'odeur
enfantine du pain
le crin s'étiolait sur nos têtes
les fils de fer rouillaient dans les articulations
personne n'applaudissait ni ne ployait le genou devant le jour
le rire de la mère étouffait les fumées
Apprentis qui n'apprenaient rien
nuques raidies par l'attente du dégel
nous implorons les murs de revenir
de dérouler les chemins pliés
l'hiver sera long d'après la pluie suspendue à l'air
Vénus Khoury-Ghata
D.R. Texte inédit de Vénus Khoury-Ghata
pour Terres de femmes
Voir aussi :
- (sur Terres de femmes) Vénus Khoury-Ghata/Ils sont deux figuiers ;
- (sur Terres de femmes) Vénus Khoury-Ghata/Le caillou dans la main.
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(Printemps des poètes 2010 « Couleur femme »)
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