Magazine Humeur

Aux arts-mes citoyens

Publié le 21 février 2010 par Orage
Des citoyens déterminés à sauver le Théâtre du Saguenay
se sont réunis samedi dernier
«AUX ARTS COMPAGNONS»
Patrice Leblanc
Aux arts-mes citoyens
Aux arts-mes citoyens
Que Patrice Leblanc me permette cet emprunt à sa propre locution , «Aux arts compagnons», alors qu’il a réussi à mobiliser un groupe de personnes afin de préserver l’esprit de la Coopérative culturelle et de sauver le Théâtre du Saguenay que certains s’empressent à enterrer sans avoir tout tenté.
La faillite annoncée du Théâtre du Saguenay a levé un vent de révolte. Et c’est avec spontanéité qu’une première assemblée s’est tenue samedi 20 février 2010, au Centre des arts et de la culture de Chicoutimi, pour créer le groupe Sauvons le Théâtre du Saguenay qui a déjà son site web ici, et sa page Facebook là. Plus de 75 personnes étaient présentes et de nombreuses autres dont je suis, absentes à regret, ont signifié leur appui par écrit (fait avéré).
Un naufrage incompréhensible
Depuis le 30 juin 2009, les vagues sont devenues tempête dans la saga, résumée ici, de cet organisme culturel qui pourtant naviguait avec brio depuis 1974 sous les directions successives de Françoise Desbiens et de Louise Beaulieu.
En 2005, Louise Beaulieu (Prix Reconnaissance décerné par RIDEAU, octroyé pour souligner ses qualités de gestionnaire efficace) quittait la direction générale d’une Coopérative en excellente santé, comme le rapporte Pascal Girard dans le Progrès-Dimanche:
«Quand j'ai quitté en 2005, on avait une réserve dans les cinq chiffres, a-t-elle avancé. Celle à qui elle avait succédé était également présente. Françoise Desbiens fut l'une des fondatrices. Elle a rappelé que la mission première était l'accessibilité de la culture. Selon elle, cette mission s'est perdue dans les dernières années.» (PD du 21 février page 14)
Sur la page du groupe Sauvons le Théâtre du Saguenay, Éric Dubois précise: «Plusieurs éléments sont encore nébuleux et nous nous expliquons mal comment cette coopérative, florissante jusqu'en 2005 (plus de 1,5 M $ en chiffre d'affaires), a été déroutée vers un désastre financier dont nous n'avons pas encore l'ampleur réelle.»
Dans le rapport financier de 2006-2007, le directeur général Robert Hakim (engagé à l’unanimité par le CA que présidait Jean Bilodeau) déclarait, à la journaliste Anne-Marie Gravel, anticiper un surplus appréciable : «Robert Hakim, écrit-elle, estime percevoir un surplus d'environ 60 000 $ grâce à la présence d'un peu plus de 50 000 spectateurs au cours de la dernière saison."Nous bénéficions d'un budget de 1,5 million $, dont plus de 88 % provient de la billetterie. Nous devons nous assurer de présenter que des spectacles vendeurs tout en continuant notre mission et en respectant nos objectifs. Les spectacles internationaux et à grand déploiement viennent remplir les coffres, ils font la différence!", a souligné le directeur général du Théâtre du Saguenay.» (Le Quotidien du 7 juin 2007, page 31.) Un surplus de 57 000$ a été confirmé au dépôt du rapport financier de 2007.
Faut-il donc comprendre qu’il aura fallu moins de deux ans pour créer une dérive entre 2008 et 2009?
Rappelons que le rapport des états financiers pour 2008, rendu public seulement en juillet 2009, démontrait un déficit de seulement 180 000$. Chiffres déclarés à la fois par Robert Hakim (dg), Vassilis Fasfalis (président) et Albert Lemieux, comptable chargé des états financiers du Théâtre du Saguenay. (Le Quotidien, jeudi 2 juillet 2009, p. 31)
Moins d’un an plus tard ce serait la faillite???
Fait-on faillite avec des revenus de 1,5 millions de dollars? Ou bien négocient-on d’abord avec les créanciers identifiés?
Il y a trop de questions sans réponse pour que les membres de la Coopérative culturelle de Chicoutimi déclarent forfait sur la décision unilatérale - du moins c’est ce qui ressort des témoignages des membres - du seul président, non élu qui plus.
«Nous constatons que sur un CA de neuf personnes jusqu'à tout dernièrement, seulement quatre étaient élues par les membres de la corporation. Le président Pierre Mazurette n'a jamais reçu l'assentiment des membres pour sa nomination, ni pour ses démarches pour mettre fin aux activités de la coopérative.» lit-on sur le site Sauvons le Théâtre du Saguenay.
Serait-ce que les membres de la Coopérative ont été laxistes?
Non, découvre-t-on, à la lecture de ce que relate Éric Dubois dans son compte-rendu de la rencontre de samedi : «Le président Mazurette a refusé de tenir une assemblée spéciale des membres, même si celle-ci avait été demandée par des membres de la corporation. Il a aussi refusé de travailler sur un éventuel plan de relance des opération du TDS, qui aurait été, selon nous, la première chose à faire avant de convenir de la faillite. En ce sens, les membres et un syndic de faillite auraient très bien pu orienter les démarches vers une proposition concordataire envers les créanciers du TDS et préparer un plan de redressement. Nous croyons que c'était son travail en tant que président de la coopérative, travail qu'il s'est toujours refusé de faire.»
Mais alors comment Monsieur Mazurette s’est-il retrouvé à la présidence du conseil d’administration du Théâtre du Saguenay? Le président élu par l’assemblée générale était Richard Boivin. Celui-ci a démissionné peu après.
«Le président Pierre Mazurette, en poste depuis décembre 2009 avait un objectif clair: mener la coopérative vers la faillite. C'est le mandat qu'il a accepté, suite à l'invitation lancée par le Maire Jean Tremblay. Il s'est affairé depuis à dépeindre la situation qui prévalait au TDS comme étant catastrophique, sans pourtant démontrer clairement, chiffre à l'appui, cette affirmation. Le président se cache derrière l'enquête policière en cours, mais allègue des manque à gagner de un millions de dollars. Mais rien ne prouve cela actuellement», affirme Éric Dubois.
Il faut reconnaître que les déclarations successives rapportées dans les journaux ont de quoi nous troubler. La valse des chiffres non vérifiés et non prouvés a perdu ses repères passant de 300 000$ a 400 000 $ pour dépasser la douche froide d’un million assaissonné d’une affirmation non vérifiée disant que «les revenus sont pratiquement inexistants.» (Le Quotidien, mardi 16 février 2010, p. 3)
La mise en faillite n’était pas encore faite que Le Quotidien rapporte: «Le directeur général de Promotion Saguenay, Ghislain Harvey, s'est rendu hier à Québec pour rencontrer à ce sujet les autorités du ministère de la Culture et des Communications et voir les différentes options qui s'offrent à la Ville, dont celle de créer une nouvelle corporation.» Nous avons bien lu Ghyslain Harvey et non le directeur-général du Conseil des arts de Saguenay, Claude Martel, ni la présidente du Conseil des arts, Sylvie Gaudreault. Rarement nous n’aurons été témoin d’un tel empressement au service de la Culture au Saguenay!
Mais voilà que le Citoyen, non résigné à se voir dépossédé de sa coopérative, se multiplie. Car le Théâtre du Saguenay appartient à la Coopérative culturelle fondée en 1974 et composée de membres qui ont le droit de prendre les décisions qui les concernent. Ils sont venus le réaffirmer ce samedi 20 février en compagnie des membres fondateurs de ce fleuron. Fleuron malmené par des décisions politiques depuis ses membres ont été spoliés de leur libre arbitre sur leur propre salle de spectacle et, maintenant, de leur désir de survivre.
Membre du comité, Jocelyn Robert écrit: «Jusqu'en 2005, le Théâtre du Saguenay était une bonne entreprise rentable dont les opérations permettaient la diffusion d'un calendrier des arts de la scène important depuis plus de trente ans et ce, en respect d'une mission défendue par des professionnels... Cependant, avec la décision de la Ville de s'opposer à la vision de développement du TDS en 2005 et de ne pas
respecter les souhaits et intérêts du milieu professionnel, la ville a contribué directement à mettre en place une gouvernance inapte à défendre les vrais intérêts de la diffusion pour détourner les objectifs au profit du privé.»
Un comité a été formé.
«Rassembler et informer tous les gens qui ont à cœur la survie du Théâtre du Saguenay et l'avenir culturel de la région. Ne laissons pas la ville prendre le contrôle de la diffusion!» conjuguent-ils au présent.
Comme le dit avec justesse Patrice Leblanc, il ne s’agit pas seulement de la cause d’une ville mais bien d’une région. La mienne, la vôtre. En devenant membre de la coopérative, les citoyens de la périphérie des villes fusionnées de Saguenay démontrent leur sentiment d’appartenance à la dimension régionale de nos infracstructures culturelles. Un aspect bien trop souvent occulté, au grand dam des artistes et travailleurs culturels de la région du Saguenay.
Lucien Frenette, directeur général du Conseil régional de la culture, Denise Lavoie, ancienne directrice du Festival international en arts de la marionnette, Marie-Josée Paradis, membre du dernier conseil d'administration du Théâtre du Saguenay, Éric Dubois, candidat municipal défait et membre du Théâtre du Saguenay, Jocelyn Robert, directeur général de l'Orchestre symphonique du Saguenay-Lac-Saint-Jean, Pierre-Paul Legendre, membre numéro 29 de la coopérative, Véronique Beaulieu, ancienne membre du conseil d'administration et Patrice Leblanc, organisateur de la rencontre et membre de la troupe des Clowns noirs, forment le comité qui a pour mandat de rencontrer le syndic Réjean Bergeron, de tenir une assemblée générale spéciale et d'entamer les démarches de relance.
Notons que le comité a reçu l’appui de Jeanne Blackburn, qui fut ministre et députée au cours des années 1985 à 1998 pour le Parti québécois et du fiscaliste André Salesse qui défend le projet d’une nouvelle salle de spectacle pour la région du Saguenay.
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