Un grand film . Quand nos voisins nous ont dit qu’ils iraient peut-être le voir, cela m’est venu à l’oreille, ah bon, c’est bien ? Je n’en avais pas entendu parler car je ne lis pas assidûment la chronique cinématographique des journaux. Celui là était passé à l’as. Inaperçu. D’ailleurs je ne sais même pas qui est le réalisateur, Sheridan, on va me dire que décidément je ne sais rien. Eh bien oui, je ne sais rien. Alors nous avons fait la queue, C. et moi, l’autre dimanche en fin d’après-midi, devant la porte du plus petit et du plus décrépit cinéma de la ville : une seule caisse pour cinq films qui passaient en même temps. Obligation de se ranger selon le film désiré. Heureusement, la plus grosse file n’était pas pour nous. Nous avons vite déchanté : elle n’était pas pour nous, n’empêche que la plus longue file devait entièrement se vider AVANT nous ! Le film était prévu à 17h55, étions arrivés à 17h30 (pour avoir de bonnes places, tiens, pardi !) et à 18h20 nous étions toujours à battre la semelle dans cette ruelle immonde où il y a même des automobilistes qui s’entêtent à passer, menaçant de nous écrabouiller les pieds. Bref, nous n’étions pas heureux. L’avons signifié au monsieur de la caisse, qui n’en pouvait mais. « J’sais bien”, qu’il a dit, le monsieur. Salle 2, Premier étage. Le film a donc commencé drôlement en retard.
Tout de suite l’ambiance petite ville américaine, le mec en uniforme de soldat, pardon de capitaine, défilant avec ses hommes. La femme plus qu’adorable, pomponnée, maquillée, une vraie américaine, allez : une Lindsay Vonn. Et tout à coup un voyou qui sort de tôle, un tatouage dans le coup, en sortant il dit aux autres « à bientôt », on se dit qu’il est pas clair, celui-là. Se retrouve en famille. Le soldat est venu le chercher à la sortie de la prison. Ils sont frères. A table, le voyou retrouve ses parents, la mère le sert dans ses bras, mais le père lui réserve un accueil plutôt froid. « Son ! », « father ! » c’est tout ce qu’ils se disent, jusqu’à ce que la tension entre eux n’explose.
Le père donne en exemple le « bon », le soldat, à l’autre, le mauvais : « ton frère est un héros ! ». Gêne dans la famille. Le soldat doit partir dès le lendemain pour l’Afghanistan, y faire ce que son président lui intime de faire. A savoir la guerre. Du coup, le voyou va rester avec la jolie poupée et les deux petites filles. Dans un thriller, cela donnerait : le voyou terrorise les trois personnes de sexe féminin, car un voyou reste un voyou en toutes circonstances. Mais heureusement, nous ne sommes pas dans un film classique. Que va-t-il se passer au contraire ? Eh bien vous ne vous en doutez peut-être pas, mais le héros va être annoncé comme mort dans un crash d’hélicoptère, le frère va se responsabiliser, la jeune femme va éprouver de l’attrait pour ce jeune frère mais sans y succomber.
(Jake Gyllenhaal, Natalie Portman, Tobey Maguire)
Pendant ce temps, le capitaine, qui n’est pas mort, va être amené par la situation guerrière à commettre l’action la plus horrible. A son retour en Amérique, le blanc et le noir auront été échangés, c’est du frère soldat qu’on aura peur, alors que l’ex-braqueur de banque fera tout pour sauver la situation. A la scène finale, l’homme, cassé, s’effondrera en sanglot en avouant la vérité. « On dit qu’il n’y a que les morts qui vont au fond de la guerre, moi j’y suis allé, mais je ne sais pas si je revivrai un jour ». Vous l’avez compris, ce film, qui s’appelle Brothers, s’inscrit dans la grande tradition du cinéma antimilitariste américain. Les rôles (mêmes les seconds) sont joués à la perfection par Jake Gyllenhaal, Natalie Portman, Tobey Maguire etc. A voir d’urgence, pendant qu’on nous annonce justement des combats d’envergure dans le sud de l’Afghanistan…