S2e09 : JACK, ME & FREEMAN

Publié le 26 février 2010 par Elinorbird

- Alors? Explique moi un peu. Vous en êtes où avec Jack? me demanda Paige qui en était finalement resté au doux bisou dans l'ascenceur...

- Ohfffff.... soupirai-je

Hier soir, Paige et moi avions une folie envie de déguster un délicieux Artichoke Dip accompagné d'un bon verre de vin rouge et il n'y avait qu'une réponse possible à cette envie: Freeman's (1). Peu importe s'il fallait attendre un heure pour diner dans ce petit restaurant caché au fond de la Freeman Alley, c'était toujours un réel plaisir de passer une soirée d'hiver dans ce charmant et chaleureux cocon. Et le petit gratin à l'artichaut valait, il fallait bien le dire, toutes les attentes du monde.

Freeman's était sans conteste un des restaurants les plus cotés below houston, où tous les "jeunes gens modernes" (2) (encore eux!!) se mélaient aux vedettes de ciné, aux familles branchées, et aux mocassins usés. Trophés de chasse aux murs, chevreuil, sanglier, oie, bois de cerf... Bar ancien en fer à cheval, tables en bois, cuisine ouverte... Décoration cosy, éclairage intimiste, agencement compartimenté... Chez Freeman, c'était un peu comme si tu dinais chez des amis, au salon, au bar, ou dans la salle à manger... Les propriétaires avaient souhaité recréer l'ambiance d'une vieille et authentique taverne américaine, offrant de surcroit un succulent menu moderne et rustique à la fois. Peu de temps après notre rencontre, Jack et moi avions pris l'habitude de venir diner chez Freeman tous les dimanches soirs. C'était devenu notre rituel. Un si bon rituel. De si bons souvenirs... Il y avait une ambiance bien particulière le dimanche que nous affectionnions particulièrement. C'est notre moyen à nous de bien finir le weekend et de bien commencer la semaine. Nous avions diné à côté de Dustin Hoffman, d'Adrien Brody et Elsa Pataky, à l'époque où ils étaient encore ensemble, et j'en passe... Depuis, venir diner ici me faisait toujours beaucoup penser à Jack. Je m'attendais à le voir, assis au bar, à siroter son French 75.

J'étais ravie d'avoir un moment avec Paige, juste nous deux. Billie avait prévu de voir son frère Jimi et nous rejoindrait plus tard, ce qui nous laissait le temps de rattraper les deux mois perdus...

Ben, le very cute hôte du restaurant, nous accueillit. Verdict : "une heure d'attente mais vous pouvez vous installer au bar en attendant les filles..."

- Viens, dis-je à Paige en me faufilant entre les tables pour accéder au bar du fond. Je l'avais toujours préféré au premier bar qui se trouvait à l'entrée...

- Alors? insista Paige

- Bah c'est simple ma poule. Ce bisou volé était tellement doux et cette nuit enroulée dans ses bras, tellement réconfortante que, comme tu t'en doutes, je n'avais aucune envie de le quitter pour l'Europe...

- Mais oui je sais ça. Tu m'as déjà dit. Mais parle moi des lettres. Billie m'en a touché deux mots mais je lui ai dit que je préférais que tu me racontes toi même de vive voix.

- Ah... répondis-je, pensive

- A ce point là? demanda Paige, la tête inclinée, faisant la moue

Comme par enchantement, deux tabourets nous attendaient au bar. Je me précipitai. Après avoir accroché Lodens et chapeaux aux porte-manteaux, nous nous installâmes, ravies. Je me frottais les mains d'impatience. Diner chez Freeman après deux mois d'exil était une récompense, un vrai bonheur. Je jetai un coup d'oeil furtif dans la salle, au cas où... Mais Jack n'était pas là...

- On se prend une bouteille de Chinon? suggérai-je

- Parfait.

- Et le Artichoke Dip!

- Évidemment.

Hummm... Notre maxi ramequin fumant arriva quelques minutes après notre bouteille de rouge. Nous échangeâmes un regard de gourmandise, et comme dans un accord télépathique, plongeâmes chacune à notre tour notre petit toast de pain grillé dans le gratin artichaut/gruyère. Rohhh... Ce délice... Si simple et si bon... Nous restâmes muettes quelques instants puis...

- Bon. Je t'écoute ma belle.

Et la bouche pleine, je racontai...

- Eh bien, une semaine après mon arrivée à Paris, la veille de Noël, alors que nous nous étions envoyé quelques petits messages tendres et affectueux, j'ai reçu un email qui m'a, comme à chaque fois, sacrément refroidi...

- ???

From: jack@jackhanksphotography.com

Date: December 23, 2009 8:35:27 PM

To: elinorbird@gmail.com

Je suis arrivé à Londres hier et Amy m'attendait. Mon Dieu Bird. Amy était là, avec mes parents, tous autour du sapin... Je ne peux pas. Tu comprends? Amy et moi allons nous marier. Je vais essayer de continuer ma carrière à Londres. Je dois rentrer. Elle ne viendra jamais vivre à New York. Je ne peux pas la quitter. Alors... Je dois rentrer. J'ai conscience de la peine que je te cause et je m'en excuse. Mais... Je ne peux pas faire ça. Même si c'était délicieux, je n'aurais jamais du t'embrasser. Pardon. Pardonne moi.

- Ah merde... lacha Paige, apparemment désolée pour moi

- Ouep...

- Et tu as répondu?

- Non... J'ai pas eu la force...

- Je comprends.

- Mais attends. C'est pas fini...

From: jack@jackhanksphotography.com

Date: Janvier 1, 2010 6:25:27 PM

To: elinorbird@gmail.com

la nouvelle année commence tout juste et à qui je pense...? À toi... J'ai peut-être un peu bu (oui c'est sur) mais j'ai suffisamment les idées claires pour te dire que tu es la plus belle rencontre que j'ai faite à New York. Oui. La plus belle. Tu es une fille bien Bird. Bien! Et je sais que ta vie sera pleine de joie et de bonheur, que tu accompliras de grandes choses. De toute façon, avec un nom pareil... Elinor Bird. E-LI-NOR BIRD!!! ELI.. Eli... Bird... Bonne année Bird. x-jack

- Allons bon, commenta Paige en enfournant une autre bouchée d'artichaut

- Je sais...

- Et alors? Tu as répondu?

- Toujours pas. À ce moment-là, je crois que de toute façon, non seulement j'étais blessée mais j'étais aussi sacrément fachée

- Normal... Donc?

- Eh bien, quelques semaines plus tard, j'ai reçu un autre email...

From: jack@jackhanksphotography.com

Subject: SILENCE PROLONGÉ

Date: Janvier 14, 2010 3:25:27 PM

To: elinorbird@gmail.com

ton silence est si dur... Même si je le comprends, se serait gentil de me faire un signe... Je voulais te dire que je suis de retour à New York. Je ne peux me résoudre à retourner vivre à Londres. En plus, il pleut vraiment tout le temps! Mais quel enfer! Enfin bref... Tu n'as surement pas envie de rire. Écoute, je voulais juste te dire que je m'excuse et que j'espère du fond du coeur que tu pourras me pardonner. Envoie moi un mot, pour me dire comment ça se passe en Europe... Tu dois être à Stockholm en ce moment...? Non? Écris moi.

- Tu étais à Stockholm? m'interrogea Paige

- Oui. Je suis allée voir mes grands-parents avec Papa. On a passé dix jours là-bas, puis le week-end à la maison de campagne et Maman nous a rejoint. J'aurais tellement voulu que Fleur et Louis puissent venir aussi. Heureusement que nous étions tous réunis pour Noël... C'est tellement rare maintenant d'être tous ensemble...

- À qui le dis-tu? confirma Paige dont toute la famille se trouvait en Australie. Bon, et alors... Ce coup-ci, tu as répondu???

- Bah non.

- Vraiment?

- Non... J'avais besoin de faire le vide. Et puis franchement, j'étais avec ma famille, mes grands-parents en sont encore à l'âge de pierre et n'ont pas de connection internet... Donc de toute façon, je n'ai eu son email qu'une semaine plus tard... Et puis, je n'avais pas le coeur à répondre. Pour dire quoi?

- Oui...

- Du coup, il m'a juste envoyé...

From: jack@jackhanksphotography.com

Subject: SILENCE INTERMINABLE ET DOULOUREUX

Date: Janvier 25, 2010 12:15:17 PM

To: elinorbird@gmail.com

tu te souviens de notre fou rire en voyant la campagne Moscot avec la barbie botoxée. Eh bien je marchais dans la rue ce matin et je suis tombée sur l'affiche. Et j'ai pensé à toi.

Tu me manques. Reviens vite.

- Bah c'est trop mignon... Mais c'est quoi cette histoire de Moscot? demanda Paige

- Oh rien... Laisse tomber. Private joke.

- Bon en tout cas, une chose est sûre. Il est perdu le pauvre petit.

- Oui je sais. C'est ce que j'ai fini par conclure.

- Tu as fini par lui répondre alors?

- Non. Enfin... J'ai envoyé une carte, quelques semaines plus tard, pour le prévenir que j'hésitais à rentrer... Mais tu sais... Non?

- Oh oui je sais... me confirma Paige dans un soupir

- Bon. Enfin voilà. Pour répondre à ta question. Voilà où j'en suis avec Jack. J'ai juste compris que, tant qu'il ne serait pas prêt, je pouvais bien m'évertuer... Rien n'y ferait... Mais ce qui me rend triste c'est que je ne suis pas sûre qu'il soit vraiment heureux avec cette Amy... Donc je ne comprends pas pourquoi il s'accroche. C'était quand la dernière fois qu'on l'a vu en plus?

- Ouh... Je sais pas. Un an? Plus?

- Voilà. T'imagines??? Elle n'a pas l'air de faire beaucoup d'efforts non plus...

- Bon et avec Leo alors?? se réjouit Paige qui, voyant ma bouille quelque peu déconfite, tenta de m'inciter à penser à autre chose...

- Oh Leo...

- ...

- Non bah Leo... A vrai dire pas grand chose. Que veux-tu? Dans tout ça, j'ai un peu l'impression que l'on s'est loupé. On a échangé quelques emails lorsque j'étais en Europe mais rien de bien folichon. Quand j'ai appris qu'il était avocat, je l'ai très vite mis en contact avec Billie pour cette histoire de procès avec Dennis tu sais...

- Oui oui...

- Bon donc du coup, je dois t'avouer que nos échanges se sont bien vite résumés à moi qui lui demandais des nouvelles de l'affaire et lui qui me faisait des résumés. Billie par ci, Billie par là... Billie le connait finalement beaucoup mieux que moi maintenant et j'ai l'impression qu'ils s'apprécient beaucoup...

- Ah oui?

- Ouai... Mais tu sais, dans le fond, j'ai aussi réalisé un truc c'est que, de toute façon, Jack était bien trop présent dans ma tête et dans mon coeur pour que je m'intéresse à qui que se soit d'autre. J'ai beau essayé de passer à autre chose, je ne peux pas. J'ai cette petite voix au fond de moi qui me dit que Jack est l'homme de ma vie. Alors... avouai-je, en serrant mes lèvres l'une contre l'autre en signe de fatalité

- Oh ma belle...

- T'en fais pas. Ça va. Je vais bien. Je suis sereine. J'ai confiance en l'avenir. Le destin ne se trompe jamais de toute façon! lançai-je, optimiste

- SALUT LES POULES, hurla Billie en nous donnant une bonne frappe dans le dos

Nous ne l'avions pas vu venir et son énergie débordante, en opposition à notre tranquillité, nous secoua quelque peu.

- Billie! Tu es déjà là? remarqua Paige

- Bah sympa. Ça a l'air de vous faire plaisir de me voir!!!?

- Mais oui... Arrête. Le temps passe vite. C'est tout, la rassurai-je

- Alors tu reviens d'où? lui demanda Paige

- J'étais avec Jimi, Sunny et... Leo

- Oh... lançâmes Paige et moi, en coeur, échangeant un regard complice

Billie nous raconta sa soirée, d'un ton enjoué... Et pour finir sur une savoureuse note sucrée, nous commandâmes les fameuses Bananas Foster with Rum Butterscotch... Miam...

(1) Freeman's, End of Freeman Alley, New York, NY 10002, (212) 420-0012 www.freemansrestaurant.com

(2) Terme emprunté aux très branchés Jeunes Gens Modernes, www.dejeunesgensmodernes.com