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Sac à main

Publié le 09 mars 2010 par Thywanek
Sac à main
Je vous vois venir, (je vous connais !), non, il ne va pas être question d’une ancienne première dame de France plus connue pour ses pièces jaunes que pour l’intégrité de son époux.
Il va être seulement question de l’ustensile dont on a fait régulièrement son fétiche, pour ne pas dire son nin-nin, son doudou.
Et de cet ustensile non en tant qu’étant le sien, mais en tant qu’il est, universel, omniprésent, à la fois l’avant, le pendant, (si j’ose dire), et l’après, une sorte d’alpha et d’oméga, bref une métaphysique.
Premier rapprochement utile, avant de s’éloigner, le sac à main, elles n’en portent qu’un à la fois, alors qu’elles mettent le plus souvent deux chaussures, et ce en dépit du voisinage évident entre le premier et les secondes, avec ou sans talons aiguilles, voisinage remarquable quant au nombre d’exemplaires disponibles dans six ou sept armoires ou placards, et quant à la diversité des modèles qui s’éventaillent du plus sobre au plus clinquant, du plus laid au plus élégant, du plus improbable au plus incertain, du plus excentrique au moins pratique, du plus minuscule au plus imposant, du plus ridicule… au plus ridicule. Coordonné avec les chaussures, donc.
Elles, vous l’avez deviné, car vous êtes très perspicaces, ce sont les femmes, naturellement, pas les sauterelles : ne pas confondre.
Femmes que nous mettrons ici quelquefois au singulier : car il est fréquent qu’elle soit singulière. On en compte en effet beaucoup moins que ses congénères à zizis extérieurs, capables de se grouper en meutes, l’esprit mis en bière, à l’orée de diverses manifestations virilo-martialo-sportives.
Quoiqu’elle ambitionne ici et là d’en faire l’expérience, sachant que pour qu’elle rivalise avec le mâle il lui faudra peut-être plus fréquemment descendre que monter.
Il est un fait certain que la femme, dont de récentes recherches nous apprennent qu’elle naît plus souvent dans une maroquinerie que dans une fleur, lutte, et souvent à juste titre, pour devenir l’égale de l’homme. Elle devrait se méfier quand même. Il est un autre fait certain que l’homme, dont de récentes découvertes nous apprennent qu’il naît davantage dans un moteur 6 cylindres en V ou dans un ballon de foot que dans un chou, ne lutte pas pour devenir l’égal de la femme. Question : le port du sac à main n’en serait-il pas la cause principale. C’est possible… (Et il a peut-être tort.)
Certes de timides ou audacieuses tendances de la mode ont émis la facture d’une sorte d’objet, devenu commun à beaucoup d’hommes et qui pourrait faire penser qu’il s’agisse d’un équivalent du sac à main de la femme. Hélas, trois fois hélas, le pauvre est à des années lumières de ce qu’est un sac à main.
Il n’existe aucune liste exhaustive de ce qu’on peut trouver dans un sac à main de femme. Ce qui explique d’ailleurs qu’aucun évangile, qu’aucun coran ou autre best-sellers testostéronien n’aborde le sujet. Signe tangible de la présence d’adieux. Et cette fois-ci c’est définitif.
Doté d’une part d’un sens aigu et parfois assez effronté de la curiosité, et d’autre part d’une confiance durement gagnée auprès de pas mal de femmes, proches ou déjà parties flâner, il m’est arrivé d’avoir accès à de nombreux sac à mains.
Au gré des inventaires, voici le plus courant.
Un poudrier, une poudrière, un stick de rouge à lèvres, deux ou trois protections en cas d’évènement lunaire, des mouchoirs en cas de rhume ou de grippe amoureuse, un révolver pour mari ou pour maîtresse de mari ou pour épouse d’amant ou pour autre maîtresse d’amant, des photos d’enfants, des cartes de crédit, des papiers, des stylos, des bonbons, des cigarettes, des briquets, une culotte de rechange, un sachet d’arsenic, des cachets pour les migraines, du parfum, une cuillère en argent d’un grand hôtel, un carnet d’adresses, un téléphone mobile, un plan de Valparaiso, un roman, un poing américain, une pelote de ficelle, des jetons de casino, un talon de chaussure, un foulard de soie, un collier pour chien, quelques pétales de fleurs, des post-it avec des petits bouts de notes diverses, des cônes d’encens, des trousseaux de clés, des clés usb, des coquillages, des plumes, des bijoux, des cailloux, des hiboux, des sous, des horaires d’avion et de train, des heures de rendez-vous, un rouleau de scotch, une boulette de hash, une alliance, un flacon de scotch, du rimmel, un chéquier, une paire de lunettes de soleil, un parapluie, une paire de ciseaux, du vernis à ongle, un ou deux en-cas, quelques infusettes de thé, des sucrettes, un pilulier doré, une patte de lapin, une perruque, une arrête de poisson, quelques dents de lait, quelques mèches de cheveux, ou de dynamite, un sex-toy, une médaille d’ancienne communiante, une vieille carte d’un parti politique de gauche, des préservatifs, un œuf de jade, une fève de galette des rois, un canif, un tampon dateur, un poème, des cartes postales, des billets usagés pour l’Opéra, des miroirs, une corde à sauter, des billes, des tubes de crèmes de soin, un petit jouet en peluche, une cravate ou deux,… et pas de raton laveur.
Pas de raton laveur. Je n’ai jamais vu un raton laveur dans un sac à main de femme.
Je suis sûr qu’il n’y en a pas. Jamais.
Il y a sûrement des choses que je n’y ai pas vu, c’est vrai. Ce qui ne veut donc pas dire qu’elles n’y sont pas. Il y a les choses visibles, préhensibles, dans un sac à mains de femme. Et il y a évidemment l’invisible.
Mais pas de raton laveur : la femmes ne fait pas dans la futilité. Elle fait semblant, c’est tout.
Me connaissant comme je les connais les frangines, prétention personnelle à double face, je ne serais pas surpris d’apprendre qu’on trouve dans l’attirail de leur voyage permanent, puisque qu’un sac à main c’est avant tout un sac de voyage, qu’on y trouve donc un compartiment de transsibérien. Ou une girafe. Ou des castagnettes. Probablement des lettres d’amour de princes charmants idiots ou de bûcherons sensibles. Ou de copines déshabillées. Ou d’étrangers repartis vivre en Amérique du Sud. Des tutus froissés. Des peines de cœur dans des fiasques vides. Des contes en blancs à raconter aux petits. Des soirs de princesses sur des bateaux assortis. Des cris de révoltées. Des généalogies de sirènes. Des complots. Des corsets. Des casquettes à douze degrés. Une adresse de bookmaker. Des micros. Des plans d’enquêtes. Des contacts de détectives. Des têtes réduites de rivales. Des joyaux masculins dans des bocaux de formol. Des sofas océaniens. Des autruches. Des pattes de panthère. Des mères en poudre. Des chevaux. Des quais. Des films romantiques qu’aucun homme n’a su tourner. Des pianos.
On doit pouvoir y trouver également de la Louise Michel ou de la Rosa Luxembourg.
On peut malheureusement y rencontrer aussi de la Margaret Thatcher ou de la Paris Hilton : certaines femmes dépassent donc certains hommes, hélas, trois fois hélas… Comme ça on est à égalité.
Dans les dérèglements qu’on peut observer, dans les temps troublés que nous traversons, il est remarquable que certaines femmes paraissent renoncer au port du sac à main. C’est certainement une diversion. De même étrange que certaines portent outre un sac à main, et tout aussi quotidiennement, un autre sac, parfois plus gros, comme une inflation de mystère. Où alors elle est encore partie on ne sait où.
Notons encore que le sac à main est en soi une arme par destination utilisée dans de nombreux cas de défense, certes, mais aussi d’attaque. Si on tient compte du contenu moyen de l’ustensile, on tremble à l’idée qu’une guerre prochaine s’appuie sur un tel potentiel de destruction massive.
Je me demandais pas plus tard qu’il y a quelques minutes, m’interrogeant moi-même sous la torture du rasoir, quant à la façon de terminer cet article, et n’ayant encore jamais assisté aux obsèques d’une de nos sœurs, si une femme se faisait enterrer avec son sac à main. Je pense que la réponse est non.
Imaginez que le paradis existe et qu’une furieuse sorte son flingue de son sac au moment de passer au guichet. Certes elle aurait moult circonstances atténuantes, mais allez faire comprendre ça au Vatican où tous les mecs s’habillent en robes, portent tous des chapeaux rigolos, et pas de sac à main !

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