Magazine Journal intime
Pourquoi j'ose enfin parler ?
Publié le 09 mars 2010 par EnfanceviolenceJ'ai plus de 30 ans maintenant. Tout va bien, j'ai une vie "normale", un boulot "normal", je fréquente des gens "normaux". De temps en temps, je déprime un peu alors je sors avec mes copines et je bois quelques verres (parfois trop) pour oublier mon vieux chagrin qui est enfoui tout au fond de moi mais qui ressort régulièrement (oui, je sais, ça n'est pas la bonne solution, mais ça fait du bien sur le moment).
En fait je me sens comme un joli vase brisé qu'on a bien recollé et bien remis en place sur sa jolie étagère, mais qui en fait est tout en morceaux, rafistolé, et parfois, les joints de colle se font un peu trop sentir...
Pour les gens de l'extérieur, je suis un modèle de réussite : Surdouée, scolarité avec un an d'avance, carrière sympa dans "le monde merveilleux du luxe", un peu dans le genre "Amour, Gloire et Beauté", si vous voulez...
En ce qui concerne ma famille, c'est la que ça se gâte. Tiens, ça me fait penser à une réplique du film Blade Runner :
Holden : C'est un test fait pour provoquer une réponse émotionnelle. Est-ce qu'on peut continuer ? Décrivez en mots simples uniquement les choses agréables qui vous viennent à l'esprit. Au sujet de votre mère ?
Léon : Ma mère ? J'vais vous en parler de ma mère... (bang)
Quand on subit des choses violentes, même si certaines d'entre elles sont à la limite de ce qui peut être humainement supportable, quand on est gamin, on est faible, et moi j'avais toujours tendance à me dire qu'il y a avait pire, que des enfants se faisaient tabasser et en mourraient parce qu'on le disait à la télé, que d'autres avaient des bleus que le docteur ou la maîtresse d'école voyaient... Moi je n'avais pas de bleus, j'avais juste tendance à saigner du nez un peu facilement quand je me prenais des baffes, et ça, ça ne se voit pas à l'école. Et le plus grave, c'est que ce dont j'ai le plus souffert, ce ne sont pas des coups , qui heureusement, à quelques exceptions près, étaient plutôt des gifles pour un oui pour un non, mais c'est de la violence psychologique, du sadisme, de la cruauté et de l'humiliation.
Pas étonnant que j'ai pensé très sérieusement à plusieurs tentatives de fugue quand j'étais au collège, en 6ème-5ème... Seulement j'avais tellement peur des conséquences que je suis pas passée à l'acte.
Les articles de ce blog vous sembleront peut-être un peu décousus, c'est à dire que je ne vais pas forcément respecter un ordre chronologique, je vais peut-être parfois passer du coq à l'âne par association d'idées... Comme j'ai régulièrement des souvenirs qui me reviennent au sujet de choses que j'avais complètement oubliées, je me dis, "oh punaise, il faudrait vraiment que je le note pour ne pas l'oublier ce truc là !" Et voilà d'où m'est venue l'idée de ce blog. Je n'ai pas la technique pour écrire un livre, je pense que cela ne s'improvise pas, qu'il y a sûrement des règles à respecter, et je n'ai pas envie de faire de la littérature pour passer à la télé, je voudrais juste raconter ce que j'ai vécu pour les raisons suivantes :
1/ ça fait du bien ! (chez le psy que j'ai vu il y a une bonne dizaine d'années, j'ai passé je ne sais combien de séances à pleurer sans pouvoir parler, et dans ces cas là, croyez-moi, on se sent vraiment conne même si le psy est très gentil). Maintenant, je ne pleure plus, je peux le raconter sereinement.
2/ j'espère que ça va donner un peu d'espoir aux enfants et ados qui subissent des violences de parents abusifs et qui ne reçoivent l'aide de personne : On peut s'en sortir sans devenir fou ni tuer ses parents (cf Blade Runner ci-dessus !), j'en suis la preuve vivante ! L'être humain a une grande force en lui, il faut juste la contrôler pour construire et se reconstruire.
3/ j'espère plus que tout que les gens qui ont été complices car ils savaient mais n'ont jamais rien fait pour que cela cesse, et parce qu'ils ont fermé les yeux, vont se reconnaître et avoir HONTE. Les voisins, les collègues de mes parents, certains profs qui ont bien eu des doutes, et le pire, certains membres de ma famille !!!!
4/ et j'espère que ça va m'aider définitivement à trouver la paix, et à finir de recoller tous les petits morceaux de mon joli vase :)
P.S : Pour les enfants et ados qui vivent ce genre de situations et qui souffrent, il faut absolument appeler le n° de téléphone 119 (enfance maltraitée)