Jardinage en musique

Publié le 15 mars 2010 par Anned

Neuf heures du matin dans une rue ombragée tout près du Rio, dans les beaux quartiers de la banlieue nord de Buenos Aires. Le jardinier, comme toutes les semaines, sonne à la grille de l’imposante villa.

Personne ne répond.

Il insiste.

Toujours rien.

La mucama n’est-elle pas encore arrivée ?

Ou bien lui intime-t-on de laisser poireauter le negro, accaparée qu’elle est par le service du petit-déjeuner ?

Ou bien encore a-t-on négligé d’informer le Péruvien qu’on resterait au campo ?

Il a tout son matériel dans sa guimbarde, il ne veut pas avoir complètement perdu sa matinée. Alors, il attrape un sécateur, grimpe sur le muret, et entreprend de tailler les branches de la haie qui dépassent à travers la grille.

Las ! Il est bientôt détecté par les caméras de sécurité, et l’alarme se déclenche… Le voisinage en est quitte pour plusieurs minutes – ou plusieurs heures- de sonnerie stridente, mais le jardinier, lui, placide, poursuit sa tâche comme si de rien n’était.

Et ne croyez surtout pas que j’exagère la morgue et le racisme des Porteños, ces habitants de la Capitale descendant en droite ligne de la bourgeoisie blanche qui a fait souche sur les bords du Rio de la Plata au début du siècle dernier. Récemment encore, une amie brésilienne me contait la discrimination dont elle est régulièrement victime à cause de sa peau mate.

(mucama : femme de ménage - negro : homme de type non-européen à la peau mate - campo : campagne)