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La 2ème lettre de rupture (3ème épisode des 3 font l’impaire)

Publié le 16 mars 2010 par Ctrltab

La 2ème lettre de rupture (3ème épisode des 3 font l’impaire)

A trop jouer sur les paradoxes et le double sens, on s’y perd. Valérie froissa donc sa première lettre et chercha son inspiration ailleurs : dans Les plus belles lettres de rupture de Lagare & Richard par exemple. Il est parfois plus simple de se cacher derrière les mots d’une autre. En s’épargnant toutefois le suicide, elle recopia presque mot pour mot la célèbre missive de Roxane des Lettres Persanes à son maître Usbek. Et telle est le « papier-collé » que reçut l’amant de Valérie.

Cher toi,

Oui, je suis jalouse, vicieuse, une peste, une perverse. Oui, je veux le crémier, le beurre et l’argent du crémier, mon mari et toi. Oui, je croyais te tromper, et pourtant c’était toi qui me trompais.

Je te quitte : car que ferais-je avec toi, puisque la seule règle qui me retenait à ta vie n’est plus ? Tu as en effet trahi ma règle de deux. Je m’en vais ; car je te sais désormais bien accompagnée et tu n’as plus besoin de moi.
Comment as-tu pensé que je fusse assez généreuse pour te permettre d’adorer une autre que moi ? Que, pendant que je me permets tout, tu eusses le droit d’en faire de même?

Sache que, si j’ai pu vivre dans le mensonge, jamais je ne t’ai menti. T’ai-je caché mon mari ? Jamais. Pour toi, j’ai réformé les lois du mariage sur celles de la nature, de ton désir et de nos plaisirs partagés.

Tu devrais me remercier de ma fidélité. Au contraire, tu l’as bafouée et tu t’es empressé de m’imiter. N’était-ce pas suffisant tout ce que je donnais ? N’étais-tu pas d’accord avec cet amour sans issue ? Pourquoi t’abaisses-tu maintenant au bonheur du petit couple bourgeois ?

Je te croyais fort et héroïque au-dessus de l’ancrage affectif. Je t’estimais raisonnable et suffisamment prudent pour ne pas te soumettre aux mêmes fantaisies que les miennes. Je t’admirais et pensais que tu n’étais l’homme que d’un amour, c’est-à-dire : moi.

Mais tu te rassurais en ne trouvant point en moi les transports de l’amour mais seulement la violence enivrante du sexe. Tu as eu longtemps l’avantage de croire mes bêtises sur la règle de deux. Tu te contentais d’être mon amant, le numéro deux. Bien sûr, tu te trompais sur toute la ligne. En amour, les trois font toujours l’impaire.
Ce langage, sans doute, te paraît nouveau. Serait-il possible qu’après t’avoir tant accablé, je te forçasse encore de choisir entre elle et moi? Non, c’en est fait, la jalousie m’emporte, la rage me domine; je te quitte.

Valérie


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