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fatalisme

Publié le 18 mars 2010 par Didier T.
fatalisme
Depuis 84 ans elle vivait pour la musique.
Premier Prix du Conservatoire, elle avait embrassé la carrière de professeur de piano ,accueillant un à un tous les enfants de la haute bourgeoisie lilloise. Mademoiselle B reste une étoile scintillante qui perce depuis toujours le ciel bas des plaines du Nord. Son sourire enjôleur, ses yeux pétillant de malice et de bonté, sa voix haut perchée resteront pendant longtemps gravés dans nos mémoires.
Fille d’une famille qui s’honorait d’une particule, alors que la maison de ses parents allait être réquisitionnée par l’occupant qui en visitait les lieux, rivée à son piano, elle avait joué ce Chopin que les Polonais entamaient au nom de la résistance à l’envahisseur.
Inconsolable de la disparition de sa sœur aînée, elle vivait dans le souvenir des jours heureux passés en sa compagnie quand le bonheur simple d’un spectacle musical dans une salle de concert parisien suffisait à irradié la semaine de ces deux inséparables.
Curieuse de tout, à 80 ans elle assistait encore aux réunions de la société de géographie locale et quand on lui racontait nos voyages, elle en complétait les descriptions par ses propres souvenirs, du temps où son frère abbé organisait pour les plus exigeants des odyssées au long cours en Californie ou en Russie chez le grand Satan de l‘époque.
Depuis plus de vingt ans, elle veillait sur un gamin qu’à l’âge de quatre ans sa mère avait confié à ses bons soins de professeur de piano. Il en maîtrisa le solfège avant l’écriture et elle influença sa vie de telle sorte qu’il en fit sa grand-mère, sa confidente, son recours, celle à qui il pouvait tout dire sans crainte d’être jugé. C’est avec elle qu’il passa ses dernières fêtes Noël.
Aujourd’hui ce gamin, qui est aussi le mien, sait qu’il va prochainement perdre l’être aimé. Elle a pris soin de l’en prévenir directement car le cancer du pancréas à cet âge peut être fulgurant.
Que faire pour soulager ces douleurs ?
S’immiscer dans leur chemin de croix ne relève-t-il pas d’une intrusion insupportable ?
Comment lui dire, à lui, que l’on partage sa peine sans briser ce face à face qu’ils entretiennent avec amour depuis si longtemps ?
J’avoue ne pas savoir m’y prendre, cette partition à quatre mains ne me laisse guère de placePublié par les diablotintines - Une Fille - Mika - Zal - uusulu

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