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lettres d'Alexandre Schmorell : « N'oubliez pas Dieu ! »

Publié le 24 mars 2010 par Moinillon

Après la lettre de Willi Graf, je propose celles d'Alexandre Schmorell — un des fondateurs de la Rose Blanche. Pour mieux comprendre la raison pour laquelle le martyr Alexandre est canonisé par notre Église.
La lettre adressée à ses parents le jour de son exécution est particulièrement frappante. Il écrivait en russe à ses parents (on verra dans la suite du billet qu'il utilisait l'ancienne orthographe russe abandonnée en 1917) : ces lettres ont disparu lors d'un incendie, mais par bonheur, les parents les avaient traduites en langue allemande.
Rappelons que, dénoncé suite à un avis de recherche publié dans le Völkischer Beobachter (Observateur populaire) — un journal hebdomadaire nazi, arrêté le 24 février 1943, traduit en jugement le 19 avril, Chourik Schmorell est exécuté le 13 juillet à Munich.

Schmorell-Alexander

Lettre de mai 1943
« Cher papa, chère maman*,
Si je dois mourir, si la grâce est annulée, sachez que je ne crains pas la mort, oh non ! C'est pourquoi il ne faut pas vous tourmenter ! Je sais qu'une autre vie, une vie plus remarquable nous attend, et nous nous reverrons sans faute. »
« Comprenez que la mort ne signifie pas la fin de la vie. Au contraire, c'est une naissance, le passage vers une vie nouvelle, magnifique et éternelle ! Ce n'est pas la mort qui est terrible. Ce qui est terrible, c'est la séparation. »
« Ce n'est que maintenant, quand on nous a séparés, quand je vous perdrai tous, que j'ai pris conscience à quel point je vous aimais. »
« Souvenez-vous de la rencontre ici, sur terre, ou bien là-bas dans l'éternité. Le Seigneur oriente le cours des choses selon Son désir, et pour notre bien. C'est pourquoi nous devons Lui faire confiance et se remettre entre Ses mains, et alors Il ne nous abandonnera pas et nous consolera. »
Lettre à sa sœur Natacha le 2 juillet 1943
« Tu serais sans doute étonnée de savoir que je suis plus calme de jour en jour, et même plus joyeux, que mon humeur ici est souvent bien meilleure qu'auparavant, quand j'étais libre ! Pourquoi ? Je vais t'expliquer. Tout ce «malheur» horrible était indispensable pour m'orienter sur la voie juste, et c'est pourquoi, en fait, ce n'est pas un «malheur». Avant tout, je suis heureux et je remercie le Seigneur de m'avoir fait comprendre ce signe de Dieu et de me trouver dans la bonne direction. Que savais-je auparavant de la foi, de la foi vraie et sincère, de la vérité, de Dieu ? — Si peu !.. Tout ce malheur était indispensable pour m'ouvrir les yeux. Mais pas seulement à moi, à nous tous, à tous ceux que ce calice a touchés, y compris notre famille. J'espère que vous aussi avez compris avec justesse ce signe divin. »
13 juillet 1943 (jour de son exécution)
« Mes chers papa et maman*,
Il n'y a rien à faire. Aujourd'hui, par la volonté de Dieu, il m'est donné d'achever ma vie terrestre, afin de passer dans une autre qui ne se terminera jamais et dans laquelle nous nous reverrons de nouveau. Que cette rencontre future soit votre consolation et votre espérance. Malheureusement, pour vous, ce coup est plus pesant que pour moi qui pars avec la conscience d'avoir servi mes convictions sincères et une action juste. Cela me permet d'attendre l'heure de la mort avec une conscience tranquille.
Souvenez-vous des millions de jeunes gens qui quittent la vie là-bas, sur le champ de bataille. Leur destinée est la mienne. Un énorme et cordial salut à tous ceux qui me sont chers ! En particulier à Natacha, à Erich, à la nounou, à tante Tonia, à Marie, à Alionouchka et à André.
Dans quelques heures je me trouverai dans un autre monde, meilleur, auprès de maman. Je ne vous oublierai pas et prierai le Seigneur afin qu'Il vous apporte le réconfort et la tranquillité. Je vous attendrai !
Je vous demande une chose : n'oubliez pas Dieu !
Votre Chourik
Le prof. Huber est avec moi : il vous transmet son salut cordial. »

* Il s'agit de sa belle-mère, sa mère russe — qui était fille de prêtre — étant décédée du typhus en Russie quand Alexandre avait deux ans.
Dernières paroles adressées à l'avocat Siegfried Deisinger par A. Schmorell
« Vous serez étonné de ce que je ne sois pas du tout tourmenté en pareil moment, mais je dois dire que même si vous m'annonciez que par exemple à ma place on devait exécuter mon garde, de toute façon je préférerais la mort. Vous savez, je suis arrivé à la conclusion que ma vie devait s'achever maintenant, aussi prématuré que cela puisse paraître. J'ai rempli ma mission dans cette vie, et je n'imagine pas ce qui pourrait m'occuper dans ce monde, même si l'on me libérait maintenant. »


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