Magazine Journal intime

La Rose Blanche : tract n°5

Publié le 27 mars 2010 par Moinillon

Le cinquième tract de la Rose Blanche (il y en a eu six en tout) a été écrit après le retour du front russe, à l'hiver 1942/1943 par les étudiants allemands de Munich : Alexander Schmorell et Hans Scholl et diffusés avec l'aide de leurs amis. Imprimé à plusieurs milliers d'exemplaires, ce tract est distribué fin janvier 1943 à Munich, Augsbourg, Francfort, Stuttgart, Salzbourg, Linz et Vienne. Plus tard, c'est plusieurs millions d'exemplaires de ce 5e tract qui seront lâchés sur le territoire allemand par l'aviation anglaise.
Ce nouveau tract est bien différent des précédents : une attaque en règle de l'Allemagne prussienne, de son impérialisme, un « socialisme bien compris » est prôné. Plus de références intellectuelles, plus de références chrétiennes apparentes.


roseblanche : Schmorell, Probst, Hans Scholl, Graff, Huber, Sophie Scholl A p p e l   à   t o u s   l e s   A l l e m a n d s !

   La guerre approche de sa fin certaine. Comme en 1918, le gouvernement allemand essaie encore d'attirer l'attention sur la force de l'arme sous-marine; mais à l'Est, les troupes reculent sans cesse, et on s'attend à une invasion par l'Ouest. L'Amérique n'est pas encore arrivée au maximum de son armement qui dépasse déjà tout ce que l'histoire a connu. Hitler mène l'Allemagne à sa perte, cela a la certitude mathématique. Hitler ne peut pas gagner la guerre, il n'arrive qu'à la prolonger! Sa faute et celle de ses complices ont dépassé toute limite. Le châtiment ne saurait tarder !
   Mais que fait le peuple allemand ? Il n'entend plus, ni ne voit; il suit aveuglement ses faux maîtres dans le chemin du crime. Victoire à tout prix ! Voilà ce que vous avez écrit sur vos drapeaux. «Je combats jusqu'au dernier homme», dit Hitler, quand la guerre est perdue.
   Allemands ! Voulez-vous subir et imposer à vos enfants l'horrible sort des Juifs ? Les mêmes juges, qui châtiront vos maîtres, vous sommeront-ils de rendre compte ? Et faudra-t-il, pour vous comme pour eux, appliquer la même loi ? Serons-nous, pour toujours, le peuple haï de tout, exclu du monde ? Non ! Refusez avec énergie d'être plus longtemps les complices des monstres qui nous gouvernent. Prouvez clairement, par votre action, que vous n'êtes pas des dupes ! Une nouvelle guerre de libération commence. Les meilleurs combattent à nos côtés. L'indifférence n'est plus permise. Décidez-vous, avant qu'il soit trop tard !
   Ne croyez pas la propagande nationale-socialiste qui, par la peur du danger bolcheviste, vous a terrorisés. Ne croyez pas que le salut du pays dépende des succès du nazisme ! Un ordre social criminel ne saurait donner une victoire à l'Allemagne. Séparez-vous à temps de tout ce qui sert ou glorifie cette dictature. Une époque viendra où la justice, pour être bien fondée, n'en sera pas moins implacable; elle comdamnera les indécis et les prudents comme des traîtres.
   Quelle conclusion tirer de cette guerre, qui ne fut jamais nationale ?
   D'où qu'elle vienne, la puissance impérialiste ne doit plus jamais s'instaurer dans l'État. Un militarisme prussien ne doit plus jamais parvenir au pouvoir. Les deux peuples européens auront à se connaître et à s'unir pour jeter les bases d'un relèvement commun. Toute force de nature dictatoriale, comme celle que l'État prussien a tenté d'établir en Allemagne et dans toute l'Europe, doit rencontrer une opposition irréductible. L'Allemagne future ne peut être que fédérale. Seule une conception saine, et fédérale, de l'État donnera une nouvelle vie à l'Europe affaiblie. Un socialisme bien compris libérera la classe des travailleurs de la plus basse forme d'esclavage qui est la sienne. L'économie particulariste doit cesser en Europe. Chaque peuple, chaque individu a droit aux richesses du monde.
   Liberté de parole, liberté de croyance, protection des citoyens contre l'arbitraire des États dictatoriaux criminels, telles sont les bases nécessaires de l'Europe nouvelle.
Aidez les mouvements de résistance, distribuez les tracts !


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