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Le jean de Billy

Publié le 21 octobre 2009 par Furu

 

   Billy avait un trou dans son jean. Dans tous ses jeans. Du côté gauche de préférence. Il les faisait lui même. C'était une habitude qu'il avait prise depuis tout petit.

Ca ne l'empêchait pas de siffler à longueur de temps les airs qu'il avait entendu sur « Nostalgie » en 1928 lors d'une partie de pêche avec son pote Ernest en mer Egée à bord d'un raffiot qui raffiotait vachement bien d'ailleurs.

   Ils avaient mangé du pâté ce jour là. Du bon pâté aromatisé à la citrouille.

Ernest lui avait raconté une histoire abracadabrante à propos d'un médecin malade qui écrivait un livre racontant la vie d'un africain qui portait un t-shirt blanc.

A la fin, cet homme se transformait en arbre. Pas l'africain, mais le toubib.

A l'époque, Billy n'avait pas vraiment cru Ernest.

Mais c'était au début du siècle dernier.

   Depuis une bonne dizaine d'années, il savait pourquoi Ernest s'était suicidé en ingurgitant 7422 Pépitos en onze minutes et quarante-deux secondes car personne ne voulait croire à son histoire.

Désormais, c'était à la pelle, à tous les coins de rue, sur les motoculteurs et dans les magasins de téléphonie que les médecins se changeaient en arbres; pour un oui ou pour un non.

Il en avait même croisé un, un jour, qui s'était transformé pour un pourquoi.

Cela posait de gros problèmes et beaucoup de gens mourraient.

  •  
    • Bonjour M. Dufossé.

    • Bonjour Docteur.

    • Allongez-vous. Retirez votre t-shirt.

    • Bien, monsieur le médecin.

    • Ca vous fait mal quand j'appuie ici?

    • Oui.

Et le pauvre M. Dufossé mourrait enraciné là. Juste parce qu'il avait mal au ventre.

Les gens n'allaient donc plus voir le médecin de peur que celui-ci ne se transforme en arbre à la moindre occasion.

   Une nouvelle médecine s'était donc développée.

Pour toute maladie, de l'angine au choléra, votre voisine, le maire du village, le facteur ou un enfant de trois ans vous faisait une ordonnance. Le remède était toujours le même: une bonne tranche de jambon dans la poche de votre manteau!!

   Cette médecine nouvelle avait toutefois sa limite: la population animale. Les animaux allaient bientôt ne plus exister!

Depuis quatre ans, il n'y avait plus ni cochons, ni sangliers, ni bovins, ni ovins. On en était arrivé à chasser les pigeons, les scarabées et les finlandais afin de fournir l'humanité en jambon.

Une fois le dernier animal découpé, s'en serai fini de l'humanité.

   C'était à ça que Billy songeait en trouant la jambe gauche de son nouveau jean.


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