1). La descente de Jésus aux Enfers
O felix culpa, quae talem ac tantum meruit habere redemptorem !
O heureuse faute, qui nous a valu d’avoir un tel Rédempteur !
Paroles audacieuses et pleines de foi, qui sont proclamées ou chantées solennellement lors de la Vigile Pascale, dans le chant de l’ « Exultet », dont le lecteur trouvera le texte ci-dessous. Elles résument tout le plan de salut que la Très Sainte Trinité, Père, Saint-Esprit et Fils, a prévu dès la faute d’Adam, pour sauver l’humanité, déchue de sa dignité. Car c’est toute la Très Sainte Trinité qui opère le salut de l’homme, créé à l’image de Dieu et à sa ressemblance, et qui est tombé dans les mains du Démon, du serpent maléfique qui l’a dépouillé de tout, et l’a condamné à connaître la mort, et la séparation de Dieu. A commencer par Adam et Eve, nos premiers parents
Le Corps de Jésus se trouve dans la tombeau. Mais, le Fils de Dieu est descendu au séjour des morts, le
« shéol » en hébreu, « les enfers » dans notre langage, pour annoncer à tous les justes depuis la création de l’homme, que l’heure est venue pour eux de sortir de ce lieu
d’attente et d’enter dans le Royaume de Dieu, dans son Royaume ;
C’est ce qu’affirme et déclare le Catéchisme de l’Eglise Catholique
Article 5
" Jésus-Christ est descendu aux enfers, est ressuscite des morts le troisieme jour "
631 " Jésus est descendu dans les régions inférieures de la terre. Celui qui est descendu est le même que celui qui est aussi monté " (Ep 4, 9-10). Le Symbole des apôtres confesse en un même article de foi la descente du Christ aux enfers et sa Résurrection des morts le troisième jour, parce que dans sa Pâque c’est du fond de la mort qu’il a fait jaillir la vie :
-
Le Christ, ton Fils qui, remonté des Enfers, répandit sur le genre humain sa sereine clarté,
-
et vit et règne pour les siècles des siècles. Amen
Paragraphe 1. le christ est descendu aux enfers
632 Les fréquentes affirmations du Nouveau Testament selon lesquelles Jésus " est ressuscité d’entre les morts " (Ac 3, 15 ; Rm 8, 11 ; 1 Co 15, 20) présupposent, préalablement à la résurrection, que celui-ci soit demeuré dans le séjour des morts (cf. He 13, 20). C’est le sens premier que la prédication apostolique a donné à la descente de Jésus aux enfers : Jésus a connu la mort comme tous les hommes et les a rejoints par son âme au séjour des morts. Mais il y est descendu en Sauveur, proclamant la bonne nouvelle aux esprits qui y étaient détenus (cf. 1 P 3, 18-19).
633 Le séjour des morts où le Christ mort est descendu, l’Écriture l’appelle les enfers, le Shéol ou l’Hadès (cf. Ph 2, 10 ; Ac 2, 24 ; Ap 1, 18 ; Ep 4, 9) parce que ceux qui s’y trouvent sont privés de la vision de Dieu (cf. Ps 6, 6 ; 88, 11-13). Tel est en effet, en attendant le Rédempteur, le cas de tous les morts, méchants ou justes (cf. Ps 89, 49 ; 1 S 28, 19 ; Ez 32, 17-32) ce qui ne veut pas dire que leur sort soit identique comme le montre Jésus dans la parabole du pauvre Lazare reçu dans " le sein d’Abraham " (cf. Lc 16, 22-26). " Ce sont précisément ces âmes saintes, qui attendaient leur Libérateur dans le sein d’Abraham, que Jésus-Christ délivra lorsqu’il descendit aux enfers " (Catech. R. 1, 6, 3). Jésus n’est pas descendu aux enfers pour y délivrer les damnés (cf. Cc. Rome de 745 : DS 587) ni pour détruire l’enfer de la damnation (cf. DS 1011 ; 1077) mais pour libérer les justes qui l’avaient précédé (cf. Cc. Tolède IV en 625 : DS 485 ; Mt 27, 52-53).
634 " La Bonne Nouvelle a été également annoncée aux morts... " (1 P 4, 6). La descente aux enfers est l’accomplissement, jusqu’à la plénitude, de l’annonce évangélique du salut. Elle est la phase ultime de la mission messianique de Jésus, phase condensée dans le temps mais immensément vaste dans sa signification réelle d’extension de l’œuvre rédemptrice à tous les hommes de tous les temps et de tous les lieux, car tous ceux qui sont sauvés ont été rendus participants de la Rédemption.
635 Le Christ est donc descendu dans la profondeur de la mort (cf. Mt 12, 24 ; Rm 10, 7 ; Ep 4, 9) afin que " les morts entendent la voix du Fils de Dieu et que ceux qui l’auront entendue vivent " (Jn 5, 25). Jésus, " le Prince de la vie " (Ac 3, 15), a " réduit à l’impuissance, par sa mort, celui qui a la puissance de la mort, c’est-à-dire le diable, et a affranchi tous ceux qui, leur vie entière, étaient tenus en esclavage par la crainte de la mort " (He 2, 14-15). Désormais le Christ ressuscité " détient la clef de la mort et de l’Hadès " (Ap 1, 18) et " au nom de Jésus tout genou fléchit au ciel, sur terre et aux enfers " (Ph 2, 10).
Un grand silence règne aujourd’hui sur la terre, un grand silence et une grande solitude. Un grand silence parce que le Roi dort. La terre a tremblé et s’est calmée parce que Dieu s’est endormi dans la chair et qu’il est allé réveiller ceux qui dormaient depuis des siècles (...). Il va chercher Adam, notre premier Père, la brebis perdue. Il veut aller visiter tous ceux qui sont assis dans les ténèbres et à l’ombre de la mort. Il va pour délivrer de leurs douleurs Adam dans les liens et Eve, captive avec lui, lui qui est en même temps leur Dieu et leur Fils (...) ‘Je suis ton Dieu, et à cause de toi je suis devenu ton Fils. Lève-toi, toi qui dormais, car je ne t’ai pas créé pour que tu séjournes ici enchaîné dans l’enfer. Relève-toi d’entre les morts, je suis la Vie des morts’ (Ancienne homélie pour le Samedi Saint : PG 43, 440A. 452C. 461).
en bref
636 Dans l’expression " Jésus est descendu aux enfers ", le symbole confesse que Jésus est mort réellement, et que, par sa mort pour nous, il a vaincu la mort et le diable " qui a la puissance de la mort " (He 2, 14).
637 Le Christ mort, dans son âme unie à sa personne divine, est descendu au séjour des morts. Il a ouvert aux
justes qui l’avaient précédé les portes du ciel.
2). L’attente de Marie, entourée des disciples
Nous sommes samedi, le jour du sabbat. Un jour où les Juifs s’abstiennent de tout travail, et ne peuvent faire plus que quelques centaines de pas. C’est pourquoi Salomé, qui se trouvait avec les autres femmes à une certaine distance de la Croix, dès la mort de Jésus, s’était empressée d’aller en ville pour acheter les aromates pour oindre et embaumer le Corps de Jésus, le lendemain du sabbat, le premier jour de la semaine, notre Dimanche, avant même que pointe l’aube.
les amis de Jésus le samedi saint (lx)
(Visions de Catherine Emmerich, Extraits)
Je vis hier au soir environ vingt hommes rassemblés an Cénacle ; ils avaient de longs habits blancs avec des ceintures, et célébraient le sabbat, ainsi que je l'ai dit plus haut. Ils se séparèrent pour se livrer au sommeil, et plusieurs regagnèrent leurs demeures accoutumées. Aujourd'hui encore, je les vis rassemblés au Cénacle ; ils gardaient le silence la plupart du temps et se succédaient pour faire la prière ou la lecture ; de nouveaux venus étaient introduits de temps en temps.
Dans la partie de la maison où se tenait la sainte Vierge il y avait une grande salle où l'on avait pratiqué, au moyen de tapis et de cloisons mobiles, quelques cellules séparées pour ceux qui voulaient y passer la nuit. Lorsque les saintes femmes, revenues du tombeau, eurent remis en place les objets dont elles s'étaient servies, une d'elles alluma une lampe suspendue au milieu de cette salle, et sous laquelle elles vinrent se placer autour de la sainte Vierge ; elles prièrent à tour de rôle avec beaucoup de tristesse et de recueillement et prirent ensuite une petite réfection
De retour au Cénacle au point du jour, Marie et ses compagnes se retirèrent dans la partie des bâtiments située à droite. Jean et les disciples se séparèrent d'elles à l'entrée et se joignirent aux autres hommes, au nombre d'une vingtaine, qui, rassemblés dans la grande salle, y passèrent dans le deuil toute la journée du sabbat, priant alternativement sous la lampe. De temps en temps de nouveaux venus s'introduisaient timidement, et l'on s'entretenait en pleurant : tous éprouvaient un respect mêlé d'un peu de confusion pour Jean qui avait assisté à la mort du Seigneur. Jean était bienveillant et affectueux pour tous, et il avait la simplicité d'un enfant dans ses rapports avec eux. le les vis manger une fois : du reste le plus grand calme régnait dans la maison, et les portes étaient fermées. On ne pouvait d'ailleurs les y inquiéter, car cette maison appartenait à Nicodème et ils l'avaient louée pour le repas pascal.
Je vis de nouveau les saintes femmes rassemblées jusqu'au soir dans la grande salle, éclairée seulement par la lumière d'une lampe, car les portes étaient fermées et les fenêtres voilées. Tantôt elles priaient autour de la sainte Vierge sous la lampe, tantôt elles se retiraient à part, couvraient leur tête de leurs voiles de deuil, et s'asseyaient sur des cendres en signe de douleur, ou priaient je visage tourné vers la muraille. Toutes les fois qu'elles se rassemblaient pour prier sous la lampe ; elles déposaient leurs manteau : de deuil. Je vis que les plus faibles d'entre elles prirent un peu de nourriture, les autres jeûnèrent.
Mon regard se tourna plusieurs fois vers elles et je les vis toujours prier ou marquer leur douleur de la manière
que j'ai décrite. Quand ma pensée s'unissait à celle de la sainte Vierge qui était toujours occupée de son fils je voyais le saint Sépulcre et six ou sept gardes assis à l'entrée : contre la
porte du caveau se tenait Cassius, plongé dans la méditation. Des portes du tombeau étaient fermées, et la pierre était devant. Je vis pourtant encore à travers les portes le corps du Seigneur,
tel qu'on l'y avait déposé, entouré de splendeur et de lumière, et deux anges en adoration. Mais ma méditation s'étant dirigée vers la sainte âme du Rédempteur, je vis un tableau si vaste et si
compliqué de la descente aux enfers, que je n'ai pu en retenir qu'une faible partie : je vais la raconter du mieux que je pourrai…
3). Le Samedi Saint et l'Heure de la Mère
Le samedi Saint comprend dans de nombreuses paroisses, en Italie notamment, l’HEURE DE LA MERE », une heure de prière et de méditation dédiée à la Mère des Douleurs, à Celle qui est devenue Notre Mère, et nous a enfantés dans la douleur au pied de la Croix : Stabat Mater dolorosa juxta crucem lacrimosa, dum pendebat Filius »
La tradition de l'Heure de la Mère est d'inspiration orientale
Sans trop séparer l’heure du Fils et l’heure de la mère, car il s’agit d’un unique sacrifice, la célébration de L' "Heure" de la Mère le samedi matin s'inspire des "plaintes" de Marie du samedi saint byzantin. L’introduction dit :
« Le samedi saint est l’heure de la Mère (…) elle a vécu l’épreuve suprême dans l’union au Christ rédempteur… elle a cru contre toute espérance. »
Bibliographie : L'"Ora" della Madre. Celebrazione mariana per il sabato santo, Roma 1982
L’Heure de la Mère, les recommandations du magistère
La congrégation pour le Culte Divin et la discipline des Sacrements a donné récemment un « directoire sur la piété populaire et la liturgie », (Vatican 2001). Ce directoire donne quelques inspiration concernant le samedi saint:
Marie est l’icône de l’Église qui veille près du tombeau de son Époux
147. La tradition enseigne que Marie réunit en quelque sorte en sa personne le corps de l’Église tout entière: elle est la "credentium collectio universa".
Ainsi, la Vierge Marie qui se tient près du sépulcre de son Fils, selon les diverses représentations de la tradition ecclésiale, est l’icône de l’Église Vierge, qui veille près du tombeau de son Époux, dans l’attente de la célébration de la Résurrection.
Marie, personnifiant l’Église, attend la victoire de son Fils sur la mort
Cette intuition d’une telle relation étroite entre Marie et l’Église provient du pieux exercice appelé "l’Heure de la Mère": tandis que le Corps du Fils repose dans le sépulcre et que son âme est descendue aux Enfers pour annoncer aux ancêtres dans la foi, qui vivent encore dans l’ombre de la mort, leur libération imminente, la Vierge, anticipant et personnifiant l’Église, attend la victoire de son Fils sur la mort en faisant preuve d’une foi inaltérable.
Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements,
« Directoire sur la Piété Populaire et la Liturgie » (Vatican 2001).
4). La Vigile Pascale : attente de la Résurrection
C’est la veillée dans l’attente de la Résurrection, et la joie de la Résurrection qui se produit en cette Nuit Sainte. Cette joie se manifeste notamment par le thème de la lumière, de la vie qui ne se consume pas, comme le cierge dont la lumière ne diminue pas, à mesure qu’il brûle.
L'annonce de la Pâque, de la Résurrection, a retenti au milieu des éloges qu’exprime le chant de l’Exultet, avec la répétition par deux fois de cette phrase, évoquant cette nuit de la Résurrection : « O nuit fortunée et bienheureuse », « O beata nox »,« O nuit vraiment bienheureuse », « O vere beata nox », : Car c'est cette nuit qui voit le Christ sortir victorieux des enfers , après avoir brisé les liens de la mort.
Et la liturgie dans l’exultation de sa joie profonde de s’exclamer en ces paroles étonnantes et émouvantes :
« O felix culpa, quae talem ac tantum meruit habere redemptorem ! »
« O heureuse faute, qui nous a valu d’avoir un tel Rédempteur ! »
C’est la Nuit Sainte par excellence, proclame-t-on encore dans l’Exultet :
« La sainteté de cette nuit bannit les crimes, lave les péchés, rétablit le coupable dans
l'innocence, rend ta joie aux affligés, dissipe les haines, ramène la concorde, et soumet à Dieu les empires ».
Exultet jam angelica turba cœlorum ; exultent divina mysteria : et pro tanti Regis Victoria, tuba insonet salutaris. Gaudeat et tellus tantis irradiata fulgoribus : et aeterni Regis
splendore illustrata, totius orbis se sentiat amisisse caliginem. Laetetur et mater Ecclesia, tanti luminis adornata fulgoribus : et magnis populorum vocibus haec aula resultet.
Quapropter adstantes vos, fratres charissimi, ad tam mirant hujus sancti luminis claritatem, una mecum, quaeso, Dei omnipotentis misericordiam invocate. Ut qui me non meis meritis intra
Levitarum numerum dignatus est aggregare : luminis sui claritatem infundens, Cerei hujus laudem implere perficiat. Per Dominum Dostrum Jesum Christum Filium suum : qui cum eo vivit et
regnat in unitate Spiritus Sancti Deus, per omnia saecula saeculorum.
R/. Amen.
V/. Dominus vobiscum.
R/. Et cum spiritu tuo.
V/. Sursum corda.
R/. Habemus ad Dominum.
V/. Gratias agamus Domino Deo nostro.
R/. Dignum et justum est.
Vere dignum et justum est, invisibilem Deum Patrem omnipotentem, Filiumque ejus unigenitum , Dominum nostrum Jesum Christum, toto cordis ac mentis affectu, et vocis ministerio personare. Qui pro nobis aeterno Patri Adœ debitum solvit : et veteris piaculi cautionem pio cruore detersit. Haec sunt enim festa Paschalia . in quibus verus ille Agnus occiditur, cujus sanguine postes fidelium consecrantur.
Haec nox est, in qua primum patres nostros filios Israël eductos de Aegypto, mare Rubrum sicco
vestigio transire fecisti. Haec igitur nox est, quae peccatorum tenebras, columnae illuminatione purgavit. Haec nox est, quae hodie per universum mundum, in Christo credentes, a
vitiis saeculi et caligine peccatorum segregaios. reddit gratiœ , sociat sanctitati. Haec nox est, in qua destructis vinculis mortis, Christus ab inleris victor ascendit. Nihil enim
nobis nasci profuit, nisi redimi profuisset.
O mira circa nos tuae pietatis dignatio ! O inœstimabilis dilectio
charitatis ! ut servum redimeres, filium tradidisti. O certe necessarium Adae peccatum, quod Christi morte deletum est ! O felix culpa, quae talem ac tantum meruit habere redemptorem
!
O vere beata nox, quae sola meruit scire tempus et horam, in qua Christus ab inferis resurrexit ! Haec
nox est, de qua scriptum est : Et nox sicut dies illuminabitur ; et : Nox illuminatio mea in deliciis meis. Hujus igitur sanctilicatio noctis, fugat scelera, culpas lavat : et reddit
innocentiam lapsis, et mœstis laetitiam. Fugat odia , concordiam parat , et curvat imperia.
In hujus igitur noctis gratia, suscipe, sancte Pater, incensi hujus sacrificium vespertinum :
quod tibi in hac Cerei oblatione solemni per ministrorum manus, de operibus apum , sacrosancta reddit Ecclesia. Sed jam columnœ hujus prœconia novimus, quam in honorem Dei rutilans
ignis accendit.
Qui licet sit divisus in partes, mutuati tamen luminis detrimenta non novit. Alitur enim liquantibus
ceris, quas in substantiam pretiosœ hujus lampadis, apis mater eduxit.
O vere beata nox, quae expoliavit Aegyptios , ditavit Hebraeos ! Nox, in qua terrenis caelestia ,
humanis divina junguntur. Oramus ergo te, Domine : ut Cereus iste in honorem tui nominis consecratus , ad noctis hujus caliginem destruendam, indenciens perseveret. Et in odorem
suavitatis acceptus, supernis luminaribus misceatur. Flammas ejus Lucifer matutinus inveniat. Ille (inquam) Lucifer, qui nescit occasum. Ille, qui regressus ab inferis, humano generi
srenus illuxit.
Precamur ergote, Domine : ut nos famulos tuos, omnemque clerum, et devotissimum populum : una cum
beatissimo Papa nostro N. et Antistite nostro N., quiete temporum concessa, in his Paschalibus gaudiis, assidua protectione regere , gubernare , et conservare digneris.
(Respice etiam ad devotissimum Imperatorem nostrum N., cujus tu, Deus, desiderii vota praenoscens, ineffabili pietatis et misericordiae tuae munere , tranquillum
perpetua: pacis accommoda : et coelestem victoriam cum omni populo suo.
Per cumdem Dominum nostrum Jesum Christum Filium tuum : qui tecum vivit et regnat in unitate Spiritus Sancti Deus, per omnia saecula saeculorum. R/. Amen
Que la troupe angélique tressaille de joie dans les cieux ; que les divins mystères se célèbrent avec allégresse, et que la trompette sacrée publie la victoire du souverain Roi. Que la terre se réjouisse, illuminée des rayons d'une telle gloire; que l'éclat du Monarque éternel qui resplendit sur elle, l'avertisse que l'univers entier est délivré des ténèbres qui le couvraient. Que l'Église notre mère, environnée des clartés de cette brillante lumière, se réjouisse aussi ; et que ce temple retentisse de la grande voix du peuple fidèle. C'est pourquoi, très chers frères , qui êtes ici pour prendre part aux splendeurs de cette sainte lumière, je vous prie d'invoquer avec moi la miséricorde du Dieu tout-puissant. Demandez pour moi qu'après m'avoir placé, sans mérite de ma part, au nombre des Lévites, il daigne m'illuminer de ses feux, et m'aider à célébrer dignement la gloire de ce Cierge. Par Jésus-Christ notre Seigneur son Fils, qui, étant Dieu, vit et règne avec lui en l'unité du Saint-Esprit, dans tous les siècles des siècles, R/. Amen.
V/. Le Seigneur soit avec vous ;
R/. Et avec votre esprit.
V/. Les cœurs en haut !
R/. Nous les avons vers le Seigneur.
V/. Rendons grâces au Seigneur notre Dieu.
R/. C'est une chose digne et juste.
Il est vraiment juste et raisonnable d'employer nos cœurs et nos voix à louer le Dieu invisible, le Père tout-puissant, et son Fils Jésus-Christ notre Seigneur qui a payé pour nous au Père éternel la dette d'Adam, et effacé de son propre sang la cédule des peines qu'avait méritées l'antique péché. Car voici arrivées les fêtes Pascales dans lesquelles est immolé l'Agneau véritable, dont le sang consacre les portes des fidèles.
Voici la nuit dans laquelle, après avoir tiré de l'Egypte les enfants d'Israël nos pères, vous leur avez fait passer la mer Rouge à pied sec. C'est cette nuit qui a dissipé les ténèbres du péché par les rayons de la colonne de feu C'est cette nuit qui, dans le monde entier, enlève aux vices du siècle ceux qui croient au Christ, les arrache aux ténèbres du péché, les rend à la grâce, les unit à la société des saints. C'est cette nuit qui voit le Christ sortir victorieux des enfers , après avoir brisé les liens de la mort. Pour nous, à quoi nous eût servi de naître, si nous n'eussions eu le bonheur d'être rachetés ?
O admirable effusion de votre bonté sur nous ! O excès incompréhensible de votre charité ! pour racheter l'esclave, vous avez livré le Fils ! O nécessité du péché d'Adam, qui devait être effacé par la mort du Christ ! O heureuse faute, qui nous a valu d’avoir un tel Rédempteur !
O nuit bienheureuse, qui seule a connu le temps et l'heure auxquels le Christ est ressuscité des enfers ! C'est à cette nuit que l'on peut appliquer ces paroles : La nuit deviendra lumineuse comme le jour; et celles-ci : La nuit deviendra claire comme le jour, pour éclairer mes délices. La sainteté de cette nuit bannit les crimes, lave les péchés, rétablit le coupable dans l'innocence, rend ta joie aux affligés, dissipe les haines, ramène la concorde, et soumet à Dieu les empires.
Recevez donc, Père saint, en cette nuit sacrée, l'offrande que la sainte Eglise vous présente par la main de ses ministres , comme un encens du soir, par l'oblation solennelle de ce Cierge dont les abeilles ont fourni la matière. Nous connaissons maintenant ce que figure cette colonne de cire qu'une flamme éclatante va allumer à l'honneur de Dieu.
Cette flamme , quoique partagée, ne souffre aucune diminution en communiquant sa lumière. Elle a pour aliment la cire, que la mère abeille a produite pour la composition de ce précieux flambeau
O nuit vraiment heureuse, qui dépouilla les Egyptiens pour enrichir les Hébreux ! Nuit dans laquelle le ciel s'unit à la terre, les choses divines aux choses humaines! Faites donc, Seigneur, que ce Cierge consacré à l'honneur de votre nom brûle durant toute cette nuit pour en dissiper les ténèbres, et que sa lumière s'élevant comme un parfum d'agréable odeur, se mêle à celle des flambeaux célestes Que l'Etoile du matin le trouve encore allumé, cette Etoile qui n'a pas de couchant ; qui, se levant des lieux sombres, est venue répandre sa lumière sereine sur le genre humain.
Maintenant donc , Seigneur, nous vous supplions de nous accorder la paix et la tranquillité dans ces joies Pascales ; et de couvrir de votre protection, nous vos serviteurs, tout le clergé, le peuple fidèle, et de conserver notre bienheureux Pape Benoît XVI., et notre Evêque N., et connaissant les désirs de son cœur, faites, dans votre ineffable bonté et miséricorde, qu'il jouisse d'une paix continuelle en cette vie, et qu'il remporte avec tout son peuple cette victoire qui assure le royaume des cieux.)
Par le même Jésus-Christ notre Seigneur votre Fils, qui, étant Dieu, vit et règne avec vous, en l'unité du Saint-Esprit, dans tous les siècles des siècles, R/. Amen.
Le Missel ambrosien nous donne, pour terminer cette journée l'une de ses plus belles pièces liturgiques. C'est la Préface pour la bénédiction du Cierge Pascal, dans laquelle le mystère de cette dernière nuit est traité avec une onction touchante et un accent poétique digne d'un si grand sujet.
PRÉFACE.
Il est digne et juste, équitable et salutaire que nous vous rendions de continuelles actions de grâces, ici et en tout lieu, Seigneur saint, Père tout-puissant, Dieu éternel, qui avez consacré la Pâque à laquelle vous conviez tous les peuples , non par le sang et la graisse des agneaux, mais par le Sang et par le Corps de votre Fils unique Jésus-Christ notre Seigneur. En abolissant le rite d'une nation ingrate, vous avez fait succéder la grâce à la loi ; et une victime unique offerte une seule fois et par elle-même à votre Majesté, a suffi à la réparation des offenses du monde entier.
C'est là cet Agneau figuré sur les tables de pierre ; non tiré d'un troupeau, mais venu du ciel ; non conduit par un pasteur, mais lui-même le bon et unique Pasteur qui a donné sa vie pour ses brebis , et qui l'a reprise de nouveau ; la bonté divine nous donnant en lui la leçon de l'humilité et l'espérance de la résurrection pour nos corps. Cet agneau ne fit point entendre son bêlement plaintif à celui qui le tondait ; mais il prononça alors cet oracle évangélique : Un jour vous verrez le Fils de l'homme assis à la droite de la Majesté divine. Qu'il daigne donc nous réconcilier avec vous, Père tout-puissant ; et qu'il nous soit propice lui-même dans sa Majesté égale à la vôtre.
Voici maintenant que s'accomplit pour nous en réalité ce qui arriva en figure à nos pères. Déjà resplendit la colonne de feu qui guida, durant la nuit sacrée, le peuple du Seigneur vers les eaux dans lesquelles il devait trouver son salut; vers ces eaux qui engloutissent le persécuteur, et du sein desquelles le peuple du Christ remonte délivré. Conçu de nouveau dans l'eau fécondée parle Saint-Esprit, le fils d'Adam, né pour la mort, renaît à la vie par le Christ. Hâtons-nous donc de rompre notre jeûne solennel ; car le Christ notre Pâque a été immolé. Non seulement nous sommes conviés au festin du corps de l'Agneau, mais nous devons encore nous enivrer de son sang. Ce breuvage n'est point imputé à crime pour ceux qui le boivent, mais il est en eux le principe du salut. Nourrissons-nous aussi de celui qui est l'Azyme ; car l'homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole de Dieu. Le Christ est le pain descendu du ciel, bien supérieur à celui qui pleuvait du ciel dans la manne, et dont Israël fit son festin pour mourir ensuite. Celui dont ce corps sacré est l'aliment devient possesseur de l'éternelle vie. Les choses anciennes ont disparu, tout est devenu nouveau : le couteau de la circoncision mosaïque est émoussé, et le rude tranchant de la pierre employée par Josué est hors d'usage.
C'est au front et non en secret, que le peuple du Christ reçoit sa marque glorieuse ; c'est par un bain et non par une blessure, par le Chrême et non par le sang.
Il convient donc, en cette nuit de la résurrection de notre Seigneur et Sauveur, d'allumer un flambeau dont la blancheur flatte les regards, dont le parfum réjouisse l'odorat, dont l'éclat illumine, dont la matière ne cause pas de dégoût, dont la flamme n'exhale pas une noire fumée. Quoi, en effet, de plus convenable, de plus joyeux, que de célébrer les veilles de la nuit en l'honneur de celui qui est la fleur de Jessé, avec des torches dont la matière est empruntée aux fleurs? La Sagesse a chanté, parlant d'elle-même : Je suis la fleur des champs et le lis des vallons. La cire n'est point une sueur arrachée au pin par le feu; elle n'est point une larme enlevée au cèdre par les coups répétés de la hache ; sa source est mystérieuse et virginale; et si elle éprouve une transformation, c'est en prenant la blancheur de la neige. Devenue liquide par la fusion, sa surface est unie comme le papyrus; pareille à l'âme innocente, aucune division ne vient la briser, et sa substance, toujours pure, descend en ruisseaux pour devenir l'aliment de la flamme.
Il convient que l'Eglise attende l'arrivée de son Epoux à la lueur de si doux flambeaux, et qu'elle reconnaisse par ses démonstrations le don si abondant de sainteté qu'elle en a reçu. Il convient que les ténèbres n'aient aucune part dans une si sainte veille, et que cette Vierge sage prépare son flambeau, pour préluder a l'éternelle lumière ; de peur que si nous avions encore à verser l'huile dans nos lampes, nous ne fussions tardifs dans nos hommages. à l'avènement du Seigneur qui doit arriver en un clin d'œil, et semblable à l'éclair.
Le soir de ce jour recueille à lui seul la plénitude des plus augustes mystères. Tout ce qui fut
figuré ou accompli en divers temps est rassemblé dans la solennité de la nuit qui va suivre. Ce flambeau du soir ouvre d'abord la fête, semblable à l'étoile qui conduisit les
Mages. La fontaine mystérieuse de régénération parait ensuite, semblable au Jourdain, théâtre de la miséricorde du Seigneur. Vient après la voix apostolique du prêtre, annonçant la Résurrection
du Christ. Enfin, pour complément du mystère tout entier, la foule des fidèles se nourrit de la chair du Sauveur. Rendue sainte par la prière et les mérites de votre grand Prêtre et Pontife
Ambroise, qu'elle reçoive donc, par le secours du Christ, toutes les faveurs du grand jour de la résurrection.