« Le dimanche, on lit au lit ».
Je suis en train de lire « No Impact Man ». Je ne l'ai pas encore fini, cela ne devrait pas tarder, mais j'ai déjà envie de vous en parler.
No Impact Man, c'est une année de vie d'un new-yorkais qui, à la manière d'un Superman ou d'un Spiderman, a décidé de vivre en produisant le moins de déchets possibles, en ayant le moins d'impact possible sur son environnement (d'où le nom, of course). Soit d'être No Impact Man durant 365 jours, avec sa femme et sa fillette.
Dément. Fou. Incredible.
Et comme j'adore parler de mes lectures à tout qui croise ma route, je savais que je serais un tantinet (qui a dit, « tu parles, un fameux gros tantinet ») saoulante. Et je l'ai été, puisque tout qui croise ma route actuellement sait que je lis cet ouvrage. Je ne peux m'empêcher d'en parler.
Quand j'ai reçu « No Impact Man », je l'avoue, j'ai trouvé le livre... moche. Il manquait de brillant, et pour cause, il est édité sur du papier recyclé, ce qui est logiquement logique. Le contraire eût été choquant, c'est clair.
Puis j'ai lu. No Impact Man, c'et un livre inclassable. A la fois expérience philosophique, analyse de notre société, recueil de renseignements pratiques et témoignage perso à la fois touchant et drôle.
Parce que se lancer dans une telle aventure, ce n'est pas une sinécure. A New-York, qui plus est.
Etre un No Impact Man, c'est ne plus produire de déchets. Ne plus produire de gaz à effet de serre. Adieu donc, en vrac : les langes, les fast-foods, les voitures, les cafés à emporter, les mouchoirs en papier, l'avion, la bouffe pas de saison, la TV, le métro, le fromage préemballé, les livraisons de plats préparés, l'ascenseur... et ce ne sont que quelques exemples.
En théorie, cela semble facile. Finger in the noze. En pratique, il n'en est rien. Et ce n'est pas uniquement les efforts faits par la famille pour y parvenir, mais également les conséquences de cette nouvelle vie qui sont captivants. Les efforts sont hilarants. Les conséquences sont parfois poignantes. Des problèmes avec la famille, qu'on voit moins, puisqu'on se déplace moins. Puis la redécouverte. Des relations humaines. Du respect de la planète. De la vie de famille sans télévision mais avec la discussion. De l'abandon de la course à l'argent qui achète tout sauf le bonheur. Et puis des dégâts que les hommes, la société, l'industrie, ont déjà fait.
J'ai appris que les ours nagent durant des heures à la recherche d'une banquise qui n'existe déjà plus, et qu'ils finissent par se noyer.
J'ai appris que certaines tortues prenaient les sacs plastiques rejetés à la mer pour des méduses et les avalaient goulument, pour ensuite en mourir.
J'ai appris que d'ici peu de temps, les rares poissons encore en vie seraient tellement éloignés les uns des autres qu'ils ne se trouveraient plus, et ne se reproduiraient dès lors plus.
J'ai appris que les bovins, élevés en masse, notamment pour les Mac Do et autres trucs du genre, causaient à eux seuls 19 % des émissions de gaz à effet de serre.
J'ai appris beaucoup de choses qui m'ont foutu une chair de poule incroyable.
Vous allez me dire : Anaïs, pourquoi tu lis ce genre de livre ? C'est déprimant, non ?
C'est vrai, pourquoi ? J'ai même pas de gosses à qui je léguerai ce monde qui agonise, alors pourquoi m'en faire ? Après moi, les mouches, c'est ce qu'on dit non ???
Et puis, depuis la lecture, clair que j'ai fait des courses, et j'ai acheté des mouchoirs en papiers, des plats préparés, des légumes pas de saison, des emballages, des emballages et encore des emballages. J'ai généré des tas de déchets. C'est clair. J'ai continué ma petite vie. Rien qu'en respirant, je pollue, c'est clair aussi. Mais mon regard sur tout ça a changé. Imperceptiblement, sans doute, mais il a changé. Ce livre m'a changée.
Et si, grâce à No Impact Man, chaque regard pouvait changer imperceptiblement. Si chacun pouvait changer un tout petit truc dans sa vie. Si les humains parvenaient à convaincre les industries qu'il est temps, plus que temps. Si...
Ce ne serait pas vain.
J'ai eu un bonheur intense à lire ce livre. J'espère que ce sera pareil pour vous.
Par contre, ne le lisez pas sous la pluie (acide ?). Je l'ai fait, et il m'a semblé qu'il résistait moins bien que les livres sur papier blanchis. J'ai des pages gondolées, maintenant, mais cela importe peu.
Lisez-le, offrez-le, diffusez-le, parlez-en, changez une petite chose en vous. Car il n'est peut-être pas encore trop tard. Pour la planète. Mais aussi pour nous. Peut-être...
Morceau choisi :
« Il est plus facile de s'acheter un iPhone ou une télé à écran plat, de se payer un voyage aux Bermudes ou une quelconque distraction, que de s'interroger sur le sens de la vie. Il est plus facile de partir du principe que le but de notre existence consiste à avoir un bon job et un bon salaire, une bonne boîte pour vivre et une bonne boîte pour se déplacer et d'espérer que ces boîtes nous protégeront de tout. Y compris de ce genre de questionnement. Comment dois-je vivre ? Pourquoi suis-je là ? »