Magazine Journal intime
masques et burqa à Venise
Publié le 22 avril 2010 par Didier T.Il y a un an exactement, avec mon épouse nous avions passé deux mois en Sicile à visiter des villes aussi magiques que Syracuse, Noto, Ragusa, Siccli, ou Modica, faisant pour longtemps provision de ce baroque flamboyant qui caractérisa les reconstructions d’après les tremblements de terres au XVIIème siècle.
Sur le chemin du retour, comme cadeau d’anniversaire de ma Douce, j’avais réservé secrètement un hôtel situé au cœur de Venise, piazza San Stefano à la Locanda Fiorita.
Tout voir, tout connaître, nous étions avides de surprises du thé dans les salons du Danieli aux coupes glacées du Café Florian.
Là pendant quatre jours, nous avions couru de la Fenice toute proche à la place San Marco, du Rialto à Murano, de la Douane de mer au Lido. Le trajet des lignes de vaporetto n’avaient plus de secret pour nous, pas plus que les musées, les galeries ou les églises où dorment des trésors.
Bref, après avoir été rassasiés de baroque, nous nous étions goinfrés de la Sérénissime, y compris en cherchant les traces du Commissaire Guido Brunetti cher à la romancière Donna Leon .
Alors que nous reprenions notre véhicule, laissé au dernier étage à l’air libre du parking obligatoire, près de la gare, nous regardions une dernière fois la ville qui s’offrait à nos yeux et nous faisions la réflexion que, fraîchement rentrés du Maroc, grâce à ce voyage en Italie, nous venions de reprendre vraiment contact avec le sel de notre culture, avec ce je ne sais quoi qui fait que nous sommes ce que nous sommes. Que tout cet environnement culturel, urbain, historique ou religieux générait chez nous du bien-être, une sérénité, une confiance en l’avenir. Nous avions redécouvert des trésors de civilisation et de beauté et en étions encore tout ébaubis de leur puissance émotionnelle.
Soudain, un gros véhicule 4X4 noir stoppa à nos côtés et une fine silhouette en descendit. D’abord je crus qu’elle nous tournait le dos, mais il fallut se rendre à l’évidence, en fait elle nous faisait face et était totalement voilée, de la tête aux pieds en passant par les mains gantées. Le chauffeur barbu et assez gras portait les valises et tous deux se dirigeaient vers l’ascenseur pour rejoindre le quai d’où un vaporetto les conduirait vers leur hôtel….
Etais-je devenu raciste, moi dont la femme est Kabyle d’origine ? Toujours est-il que médusé, de façon inconsciente, j’étais convaincu que ces «gens là» ne pouvaient aller « polluer » un espace où tant de beautés étaient exhibées, où de façon manifeste leur couple, selon moi, non seulement n’avait pas sa place, mais constituait une barbarie, une provocation et, oui, j’ose le dire, une atteinte aux bons mœurs!
Indigné, je brûlais d’envie d’aller leur interdire l’accès à l’ascenseur et leur dire qu’ils n’étaient pas en mesure de goûter aux charmes de cette cité magique. C’est mon épouse qui calma mon courroux invoquant la longue route qui nous attendait jusqu’à Nantes…
Aujourd’hui, je regrette encore de les avoir laissé partir en fermant les yeux…comme tout le monde. J’étais bien loin des considérations philosophiques ou politiques relatives aux droits des femmes ou à la sécurité qui ne furent évoquées que sur le chemin du retour. J’avais seulement ressenti cet accoutrement comme une insulte à notre culture et oublier que quelques semaines plutôt, à l'occasion du Carnaval, les hommes et les femmes portaient le masque pour garantir leur incognito. Préférer le masque à la burqa, est-ce un crime ? Publié par les diablotintines - Une Fille - Mika - Zal - uusulu