Vanitas Vanitatum...

Publié le 25 avril 2010 par Thebadcamels

Voilà quelques années déjà que la mort est à la mode. Récupérée en 2006 par les créateurs des plus grandes maisons de couture (Dior, Fendi, etc.), l’imagerie macabre se propage depuis, dans tous les recoins de la société pour le meilleur et surtout pour le pire. 
Au début, le processus démocratisant se met en place, les chaînes de vêtements bon marché font office de déversoir pour inspiration venue « d’en haut », mais rapidement la contamination s’étend à la pub, au cinéma, à la musique, accouchant presque à chaque fois d’une production de mauvais goût.
Mais une fois n’est pas coutume, cet envahissement du champ visuel ne s’est pas limité à une énième mode puisqu’au fil de ce raz-de-marée, le thème de la mort a proliféré dans le domaine à la fois plus fermé et moins éphémère des beaux-arts. Aussi, le phénomène était devenu tel qu’il fallait bien y consacrer une exposition. L’élégante Elisabeth Quin avait eu beau essayer d’alerter les masses avec son Livre des vanités, malheureusement l’écriture confine à un public limité, et puis l’art se vit plus qu’il ne se lit.
Depuis le 3 février donc, le musée Maillol nous gratifie d’une exposition sur les vanités qui procure une excellente occasion de revenir sur la représentation de la mort au cours de l'histoire de l'art et in fine, sur la contagion à la société de consommation, phénomène trop fréquent depuis que le pop art a estimé qu’art et culture populaire pouvaient faire bon ménage.
L'exposition donne alors lieu à une intéressante présentation (plus qu'analyse) de l'évolution de la thématique morbide depuis des siècles. Une originalité tout d'abord, puisque les oeuvres sont présentées de manière chronologiquement inversée, ce qui est plutôt amusant même si on doit donc attendre la fin pour en savoir plus sur l’origine et donc la signification des vanités. Heureusement, on aura vite compris la référence à la brièveté de la vie et sa fragilité, si bien que les puristes nomment les crânes sculptés memento mori, « souviens toi que tu vas mourir ». C’est donc davantage le crâne qui est la thématique de l'exposition, ce qui permet de comparer les différences de représentation entre les artistes mais aussi entre les époques.
Et comme on ne la lui fait pas, le Bad Camel fait assez rapidement le constat qu’autant il y avait une véritable réflexion derrière les natures mortes du XVIIème siècle (sic) ou le toiles cubistes de Picasso, autant l’art contemporain se contente d’invoquer la mort, mettant le spectateur devant un crâne qui n’a finalement rien à dire.
Les peintres classiques qu’on nous présente, de Zubaran à Géricault n’axent pas leur toile sur la mort mais utilisent la représentation de celle-ci pour rappeler que la beauté et l'harmonie qui transparaissent sont sans cesse menacées par la mort. Memento mori. Avec l'art contemporain en revanche et notamment avec son chef de file Damien Hirst, le traitement de la mort se résume à présenter un crâne, stylisé certes, mais c'est tout.
Ceci relance évidemment le débat sur la vacuité d'un certain art contemporain qui s’attacherait davantage à la mise en valeur des œuvres qu’à leur conférer une profondeur. Heureusement certains artistes comme Basquiat mais aussi Pierre et Gilles, relèvent le niveau en intégrant le crâne à une démarche qui leur est propre.
Bilan : une expo à voir pour quelques très belles oeuvres mais qui amène aussi à faire le triste constat d’une orientation salement consumériste que prend l'art contemporain, orientation illustrée par l’inquiétante déclaration de ce charlatan de Damien Hirst : « il n’a jamais été aussi facile de faire de l’art ».