Et puis j’ai réfléchi (je sais, l’erreur). Et un fait effrayant m’a alors frappée.
Je ne lis plus.
Ou presque.
Quelques livres pendant mes déplacements pro, si possible pas trop compliqués et divertissants, des magasines en prenant le train… et… et c’est tout ! Moi qui ai longtemps tourné à un livre par semaine, voire deux, me retrouve péniblement à ingurgiter un bouquin dans le mois, en forçant sur les bords et en culpabilisant à mort d’abandonner le bulot à son triste sort les soirs où, cédant à l’envoutement d’un livre, je m’enferme dans celui-ci, pressée que je suis d’en retrouver l’univers.
C’est dramatique.
Même si j’achetais ce bouquin, il irait simplement rejoindre la pile de tous ces livres qui sont chez moi, en attente d’être lus et je n’aurai le temps de m’y intéresser (en imaginant que je le place en priorité des lectures… ce qui serait certainement le cas) que dans une, deux, ou trois semaines !
En fait, non, ce n’est pas dramatique. C’est tout simplement triste. Pas triste dans le sens larmoyant du terme, car ma vie est remplie d’autres choses à présent, des choses différentes et toutes aussi réjouissantes. Triste, comme de découvrir qu’on n’a plus rien à dire à sa meilleure amie de lycée, qu’on est autre maintenant et elle aussi. Triste comme de se rendre compte qu’on a plus vraiment de choses à partager avec cette personne qui fut tout pourtant, à part des choses qui sont derrières nous. Ces choses du passé et qui font malgré tout ce que nous sommes aujourd’hui : les premières fois, et aussi certaines dernières, les fous rire et les gros chagrins dont on se remet pourtant…
Car lire a toujours fait parti de ma vie. D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu un livre entre les mains, et pendant très longtemps pas un anniversaire ni un noël (les deux étant souvent couplés pour moi) sans que je reçoive mon lot de bouquins. Jusqu’à ce que je m’énerve et demande à ce qu’on m’offre autre chose, zut à la fin, je ne fait pas QUE lire, bon sang ! Creusez-vous un peu la tête quoi, les gens ! Pfff…
Alors que maintenant, pour peu que le livre soit bien choisi, je crois que ça me ferait très plaisir.
Et comme on ne se refait pas, après avoir consulté la fiche des heures souterraines sur amazon, j’ai commencé à regarder d’autres livres. Ceux dont j’avais entendu du bien, et ceux que le site recommandait si on aimait tel autre livre… clic, clic, clic… et de fils en aiguilles, c’est une liste de lecture un peu fantasmée qui a commencé à apparaître. Celle dont je viendrais à bout si j’avais le temps… ou si je le prenais.
Chaque jour, Mathilde prend la ligne 9, puis la ligne 1, puis le RER D jusqu'au Vert-de-Maisons. Chaque jour, elle effectue les mêmes gestes, emprunte les mêmes couloirs de correspondance, monte dans les mêmes trains. Chaque jour, elle pointe, à la même heure, dans une entreprise où on ne l'attend plus. Car depuis quelques mois, sans que rien n'ait été dit, sans raison objective, Mathilde n'a plus rien à faire. Alors, elle laisse couler les heures. Ces heures dont elle ne parle pas, qu'elle cache à ses amis, à sa famille, ces heures dont elle a honte.
Thibault travaille pour les Urgences Médicales de Paris. Chaque jour, il monte dans sa voiture, se rend aux adresses que le standard lui indique. Dans cette ville qui ne lui épargne rien, il est coincé dans un embouteillage, attend derrière un camion, cherche une place. Ici ou là, chaque jour, des gens l'attendent qui parfois ne verront que lui. Thibault connaît mieux que quiconque les petites maladies et les grands désastres, la vitesse de la ville et l'immense solitude qu'elle abrite.
Mathilde et Thibault ne se connaissent pas. Ils ne sont que deux silhouettes parmi des millions. Deux silhouettes qui pourraient se rencontrer, se percuter, ou seulement se croiser. Un jour de mai. Autour d'eux, la ville se presse, se tend, jamais ne s'arrête. Autour d'eux s'agite un monde privé de douceur.
Les heures souterraines est un roman sur la violence silencieuse. Au coeur d'une ville sans cesse en mouvement, multipliée, où l'on risque de se perdre sans aucun bruit.
Pourquoi ? Parce que le thème de la grande ville anonyme où les gens laissent filer leur vie me parle, moi petite provinciale à Paris. Parce que je trouve cette ville et la vie qu’on y mène parfois violente et que la violence, la pire, est effectivement silencieuse.
Lou Bertignac a 13 ans, un QI de 160 et des questions plein la tête. Les yeux grand ouverts, elle observe les gens, collectionne les mots, se livre à des expériences domestiques et dévore les encyclopédies.
Enfant unique d’une famille en déséquilibre, entre une mère brisée et un père champion de la bonne humeur feinte, dans l’obscurité d’un appartement dont les rideaux restent tirés, Lou invente des théories pour apprivoiser le monde. A la gare d’Austerlitz, elle rencontre No, une jeune fille SDF à peine plus âgée qu’elle.
No, son visage fatigué, ses vêtements sales, son silence. No, privée d’amour, rebelle, sauvage.
No dont l’errance et la solitude questionnent le monde.
Des hommes et des femmes dorment dans la rue, font la queue pour un repas chaud, marchent pour ne pas mourir de froid. « Les choses sont ce qu’elles sont ». Voilà ce dont il faudrait se contenter pour expliquer la violence qui nous entoure. Ce qu’il faudrait admettre. Mais Lou voudrait que les choses soient autrement. Que la terre change de sens, que la réalité ressemble aux affiches du métro, que chacun trouve sa place. Alors elle décide de sauver No, de lui donner un toit, une famille, se lance dans une expérience de grande envergure menée contre le destin. Envers et contre tous.
Pourquoi ? Parce que c’est du même auteur, que ce livre a reçu le prix des libraires 2008 et que là encore le thème me plait : la marginalisation, intellectuelle ou sociale et encore la violence de la ville et de la vie. J’aime aussi les romans d’apprentissages.
Laure a 19 ans, elle est anorexique. Hospitalisée au dernier stade de la maladie, elle comprend peu à peu pourquoi elle en est arrivée là. 'Jours sans faim' raconte trois mois d'hôpital, trois mois pour rendre à la vie ce corps vidé, trois mois pour capituler, pour guérir. La guérison de Laure, c'est aussi l'histoire de sa rencontre avec le médecin qui la prend en charge, peut-être le seul qui soit capable d'entendre sa souffrance, cette part d'enfance à laquelle elle n'arrive pas à renoncer. Lou Delvig a écrit ce roman pour exorciser cette histoire en la transformant, en la réinventant.
Pourquoi ? Parce que je suis une mono maniaque et que quand j’ai envie de lire un auteur, ou que je découvre un auteur et que je l’apprécie, j’ai envi de tout lire de lui. Encore une histoire de blessure, de vie en équilibre instable. J’aime, j’aime, j’aime.
Désirée se rend régulièrement sur la tombe de son mari, qui a eu le mauvais goût de mourir trop jeune. Bibliothécaire et citadine, elle vit dans un appartement tout blanc, très tendance, rempli de livres. Au cimetière, elle croise souvent le mec de la tombe d'à côté, dont l'apparence l'agace autant que le tape-à-l'œil de la stèle qu'il fleurit assidûment. Depuis le décès de sa mère, Benny vit seul à la ferme familiale avec ses vingt-quatre vaches laitières. Il s'en sort comme il peut, avec son bon sens paysan et une sacrée dose d'autodérision. Chaque fois qu'il la rencontre, il est exaspéré par sa voisine de cimetière, son bonnet de feutre et son petit carnet de poésie. Un jour pourtant, un sourire éclate simultanément sur leurs lèvres et ils en restent tous deux éblouis... C'est le début d'une passion dévorante. C'est avec un romantisme ébouriffant et un humour décapant que ce roman d'amour tendre et débridé pose la très sérieuse question du choc des cultures.
Pourquoi ? Parce que ça me rappelle la pièce Promenade de santé, que j’ai adoré, et qu’on me l’a recommandé.
Dans le Mexique du début du siècle, en pleine tempête révolutionnaire, Tita, éperdument éprise de Pedro, brave les interdits pour vivre une impossible passion. À cette intrigue empruntée à la littérature sentimentale, Laura Esquivel mêle des recettes de cuisine. Car Tita possède d'étranges talents culinaires : ses cailles aux pétales de roses ont un effet aphrodisiaque, ses gâteaux un pouvoir destructeur. L'amour de la vie est exalté dans ces pages d'un style joyeux et tendre, dont le réalisme magique renvoie aux grandes oeuvres de la littérature latino-américaine. Chocolat amer, adapté en film sous le titre Les épices de la passion, s'est vendu à plus de quatre millions d'exemplaires dans le monde.
Pourquoi ? Parce qu’une histoire de magie et de cuisine aux accents latino-américain, ça ne pouvait que me séduire. J’en salive d’avance.
Marie a vingt-cinq ans. Un soir de fête, coup de foudre, nuit d'amour et le lendemain... Elle se retrouve douze ans plus tard, mariée, des enfants et plus un seul souvenir de ces années perdues. Cauchemar, angoisse... Elle doit assumer sa grande famille et accepter que l'homme qu'elle a rencontré la veille vit avec elle depuis douze ans et ne se doute pas du trou de mémoire dans lequel elle a été précipitée. Pour fuir le monde médical et ses questions, elle choisit de ne rien dire et devient secrètement l'enquêtrice de la vie d'une autre. Ou plutôt de sa propre vie. C'est avec une énergie virevoltante et un optimisme rafraîchissant que Frédérique Deghelt a composé ce roman plein de suspense sur l'amour et le temps qui passe, sur les rêves des jeunes filles confrontés au quotidien et à la force des choix qui déterminent l'existence.
Pourquoi ? Parce que le concept de découvrir sa propre vie avec le regard de la personne qu’on a pu être 12 ans plus tôt est original et peut donner lieu à un livre magnifique et que « les jeunes filles confrontés au quotidien et à la force des choix qui déterminent l'existence », forcément… ça me parle !
Dans un village du sud de l'Espagne, une lignée de femmes se transmet depuis la nuit des temps une boîte mystérieuse... Frasquita y découvre des fils et des aiguilles et s'initie à la couture. Elle sublime les chiffons, coud les êtres ensemble, reprise les hommes effilochés. Mais ce talent lui donne vite une réputation de magicienne, ou de sorcière. Jouée et perdue par son mari lors d'un combat de coqs, elle est condamnée à l'errance à travers une Andalousie que les révoltes paysannes mettent à feu et à sang. Elle traîne avec elle sa caravane d'enfants, eux aussi pourvus - ou accablés - de dons surnaturels. Carole Martinez construit son roman en forme de conte: les scènes, cruelles ou cocasses, témoignent du bonheur d'imaginer. Le merveilleux ici n'est jamais forcé: il s'inscrit naturellement dans le cycle de la vie.
Pourquoi ? L’Espagne, l’envoutement des paysages d’Andalousie, la magie des gitans et la passion de la vie…
Bon… si on fait un rapide bilan, c’est assez édifiant : je n’ai envi de lire que des femmes qui parlent de femmes.
Je vous laisse en tirer les conclusions qui vous amusent.
Mais non… je ne vire pas lesbienne !