Je n’ai pas osé leur dire…

Publié le 02 mai 2010 par Fofifonfec

Je n’ai pas osé leur dire que non, qu’ils ne me manqueraient pas. Que non, tout “ça” ne me manquerait pas. Que non, je ne reviendrai pas, même pour “faire un petit coucou à l’occasion”. Je ne suis pas non plus arrivée à leur dire que j’espère ne jamais remettre les pieds dans ces bureaux qui m’ont vu plus de fois au bord des larmes que de l’éclat de rire. Que les quelques bons souvenirs de cet “ici” que je m’apprête à quitter le sont grâce à des gens qui se comptent sur les doigts d’une main exactement. Et ceux-là, je les reverrai sur la place publique, et pas entre ces quatre murs.

“Tu nous appelleras hein? Pour donner des nouvelles?” qu’elle insiste. Mon “J’essayerai” du bout des lèvres en baissant les yeux ne devait pas être convainquant. Je l’ai sentie déçue. Elle peut l’être. Je ne l’appellerai jamais.
Un ” Tu vas quand même me manquer” a échappé à un autre. Le pire, c’est que je le sais sincère. Et aussi suffisament “âgé” pour être lucide. Une sagesse qui ne lui a même pas fait espérer une réponse hypocrite de ma part. Bref soulagement de mon côté devant tant de compréhension inespérée. Je n’ai même pas eu besoin de me forcer à sourire. Je suis tellement heureuse de partir. Certains savaient que malgré ma sympathie pour eux, ça ne pesait rien dans la balance…

Je n’ai pas osé leur répéter que je serais partie tôt ou tard, et qu’il vallait finalement mieux que ce soit tôt. Qu’on a passé moins d’un an ensemble, que ce n’est rien dans une vie, encore moins dans la leur de quadra voire quinquagénaire, que dans la mienne de pas encore trentenaire. Je n’ai pas osé leur dire le fond de ma pensée : qu’ils m’oublieront avant que je ne les oublie. Comme ils ont oublié le prénom du petit stagiaire de l’été dernier (Samuel), comme ils ne remettent pas de visage sur le “brun prétentieux” qui est resté 18 mois (Romain), comme plus personne ne parle de la stagiaire photographe qui a supporté pendant un mois et demi notre tyrannie (Mélisa) alors que tout le monde l’adorait. Et que même moi je ne l’ai pas rappelé.

Je n’ai pas osé leur dire qu’on n’était pas obligé de se mentir. Buvez, mes amis d’un instant, et mangez-en tous. C’est la dernière fois que vous me voyez, et finalement vous le savez…

(Sophie, 27-28 avril 2010)

(PS: j’ai l’air sans cœur, hein? Je ne le suis pas. Et très peu de personnes présentes à mon pot de départ comptaient pour moi. Les autres m’ont inspiré ça…)


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