Marie dans l'Evangile de saint Matthieu (3) : Jésus à Nazareth

Publié le 07 mai 2010 par Hermas

La visite de Jésus à Nazareth

Le contexte est bien différent. Jésus a commencé son ministère public ; sa renommée s’est répandue dans toute la région, en Galilée, en Samarie, et en Judée. Jésus se rend dans sa patrie, Nazareth, où il avait grandi, et travaillé comme aide-charpentier de Joseph, et comme charpentier lui-même après la mort de Joseph. Il se rend à la synagogue et y enseigne les gens de son village.

Ce récit est commun à Matthieu (13, 53-58), Marc (6, 1-6), et Luc (4, 18-24) ; Luc le place tout au début du ministère de Jésus, même s’il s’agit probablement de deux visites. Marie y est citée en Matthieu et en Marc, alors que Luc ne parle que de Joseph (peut-être encore vivant ?). Il est important de citer ces textes, car ils ouvrent nos yeux sur un aspect douloureux de la vie de Marie auquel nous ne faisons pas attention et auquel nous ne pensons pas !

William H. Hunt (1854-1860) - L'Enfant recouvré au Temple

Mathieu chapitre 13° :

53.  Et il advint, quand Jésus eut achevé ces paraboles, qu'il partit de là ;

54.  et s'étant rendu dans sa patrie, il enseignait les gens dans leur synagogue, de telle façon qu'ils étaient frappés et disaient : « D'où lui viennent cette sagesse et ces miracles ?

55.  Celui-là n'est-il pas le fils du charpentier ? N'a-t-il pas pour mère la nommée Marie, et pour frères Jacques, Joseph, Simon et Jude ?

56.  Et ses sœurs ne sont-elles pas toutes chez nous ? D'où lui vient donc tout cela ? »

57.  Et ils étaient choqués à son sujet. Mais Jésus leur dit : « Un prophète n'est méprisé que dans sa patrie et dans sa maison. »

58.  Et il ne fit pas là beaucoup de miracles, à cause de leur manque de foi.

Marc écrit :

Marc, chapitre 6° :

3.  Celui-là n'est-il pas le charpentier, le fils de Marie, le frère de Jacques, de Joset, de Jude et de Simon ? Et ses sœurs ne sont-elles pas ici chez nous ? » Et ils étaient choqués à son sujet.

Luc ne cite pas Marie et écrit :

Luc chapitre 4°

22.  Et tous lui rendaient témoignage et étaient en admiration devant les paroles pleines de grâce qui sortaient de sa bouche. Et ils disaient : « N'est-il pas le fils de Joseph, celui-là ?

Il semble que cette visite, la première semble-t-il, au début de son ministère, ait été favorable à Jésus. Mais Luc poursuit, se référant sans aucun doute à une deuxième visite de Jésus dans sa patrie (où Jésus aurait été mal accueilli), qui correspond aux textes de Matthieu, et de Luc :

23.  Et il leur dit : « A coup sûr, vous allez me citer ce dicton : Médecin, guéris-toi toi-même. Tout ce qu'on nous a dit être arrivé à Capharnaüm, fais-le de même ici dans ta patrie. »

24.  Et il dit : « En vérité, je vous le dis, aucun prophète n'est bien reçu dans sa patrie.

Matthieu, juif, écrivant pour des juifs, rapporte très bien la mentalité de ces habitants du petit pays qu’était Nazareth, où ont vécu Joseph et Marie, où Jésus a grandi ; où l’on connaît tout sur sa famille, sur son origine, et surtout sur les circonstances qui ont amené Joseph à prendre pour épouse Marie, déjà enceinte, alors qu’ils n’avaient pas encore habité ensemble. Cela, ils ne l’ont pas oublié ! Marie est, et restera toujours pour eux, une fille qui n’a pas respecté la loi du mariage, une pécheresse en quelque sorte. D’où l’expression très dure :

« N'a-t-il pas pour mère la nommée Marie ? ». Cette Marie-là… Cette « garce » (pardonnez-moi Bonne Sainte Vierge !)

Non pas Marie, mais « la nommée Marie », cette Marie-là ! Au sens le plus péjoratif du terme, qui résume à lui seul comment Marie était considérée par les gens de son village ! Une souffrance que Marie portera tout au long de son séjour à Nazareth, Elle, la Vierge Immaculée, Elle qui a conçu du Saint-Esprit, la Toute Pure, la « Pleine de Grâce ».

Marc parle simplement de Marie, et Luc, de Joseph. Que Matthieu soit le seul à mentionner cette expression ne doit pas nous surprendre : juif, vivant au milieu des juifs, il nous donne un témoignage direct et vivant de l’esprit qui régnait alors dans le peuple : c’est quelque chose pris sur le vif ! Un signe supplémentaire, s’il en était besoin, d’authenticité.

C’est d’ailleurs une coutume fort ancienne, et qui s’est prolongée jusqu’à notre époque. Dans les petits villages, les personnes plus anciennes étaient très attentives aux dates des mariages et des naissances. J’ai connu cela dans mon propre village natal, 20 siècles plus tard : les personnes plus âgées vérifiaient ainsi si les jeunes mariés n’avaient pas, comme on disait à l’époque , «  mis la Pentecôte avant Pâques »… Et gare à la mariée si elle l’avait fait, et s’était de plus mariée en blanc… Elle porterait cette tache toute sa vie ! Comme au temps de Marie. Les temps ont bien changé, sur beaucoup de points !

(à suivre)