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Les Vanupieds (41)

Publié le 10 mai 2010 par Plume

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Mais au moment de grimper dans le véhicule tiré par deux énormes chevaux de labour, elle hésita et dévisagea avec détresse le visage serein et avenant de l’inconnue :

« Je veux France ! Gémit-elle, à nouveau au bord des larmes. Elle va sûrement être très en colère mais elle avait raison. Je veux retrouver France !

-  Qui est France ? S’étonna Sœur Mérédith en suspendant son mouvement.

-  C’est France ! S’indigna Alissa, outrée qu’elle lui pose une telle question. Ma sœur !

-  Ta sœur ? Mais où est-elle ? Et quel âge a-t-elle ? Etes-vous toutes les deux abandonnées ?

-  Je ne sais pas où elle est ! Balbutia Alissa, décomposée. Je me suis perdue. Nous sommes arrivés dans cette ville il y a… euh, je ne sais plus ! Mais… mais… »

Elle éclata en sanglots et s’accrocha à la longue robe noire :

« Je veux France ! Je veux la retrouver ! Je veux Adam ! »

Touchée par son désespoir, Sœur Mérédith s’agenouilla aussitôt et la prit dans ses bras :

« Allons ! Allons ! Calme-toi ! Nous allons la retrouver, ne pleure plus. Nous allons la retrouver toutes les deux, d’accords ? »

Frémissante de joie, Alissa la fixa intensément :

« C’est vrai ?

-  Mais oui ! »

Sœur Mérédith, amusée, souriait. Elle écarta les boucles blondes qui cachaient les jolis yeux de la fillette :

« Tu sembles beaucoup tenir à elle, Alissa. Voyons ? Est-ce qu’elle te sert de maman ? »

Alissa fronça les sourcils avec concentration, comme si elle réfléchissait à un problème épineux :

« Je ne sais pas, répondit-elle enfin, navrée, elle nous commande, Adam et moi. Elle dit qu’elle a quatre hivers de plus que moi. Mais je ne sais pas vraiment ce que ça veut dire. Je lui arrive là… »

Elle montrait sa poitrine. Sœur Mérédith écarquilla les yeux avec stupéfaction :

«  Quatre ans de plus que toi ? Mais c’est une enfant encore ! Enfin, vous êtes combien à errer seuls comme ça ?

-  France, Adam et moi.

-  C’est ton frère Adam ?

-  Oui. France dit qu’elle est l’aînée. Mais je ne sais pas vraiment ce que ça veut dire. Elle nous commande, Adam et moi.

-  Seigneur ! »

Sœur Mérédith semblait réellement bouleversée. Alissa lui jeta un œil inquiet.

« Nous partons retrouver France et Adam, n’est ce pas ?

-  Oui, ma chérie ! A toutes les deux, nous arriverons bien jusqu’à eux. Tu vas essayer de me décrire l’endroit où vous vivez. Je le connais certainement. Allez, monte sur la charrette ! »

Alissa ne se le fit pas répéter deux fois. Rayonnante, elle grimpa lestement sur la planche qui servait de siège.

Sœur Mérédith fit le tour, flatta au passage les imposants chevaux qui frappaient impatiemment les pavés et s’installa confortablement à ses côtés. Très peu rassurée, Alissa se rapprocha instinctivement d’elle. Tout en saisissant les rennes, Sœur Mérédith riait :

« Ne crains rien ! Les chevaux sont très gentils, même s’ils n’en ont pas l’air comme ça ! Regarde comme ils sont obéissants ! »

Et elle émit un son étrange avec la langue.

Aussitôt les énormes animaux s’ébranlèrent, secouant charrette et passagers sans la moindre retenue. Epouvantée, Alissa s’accrocha au bras de la religieuse.

« A ce que je peux constater, déclara cette dernière, malicieuse, tu n’es jamais montée dans une voiture ! N’ai pas peur, tu ne risques absolument rien ! »

Honteuse, Alissa se tassa sur le siège et s’efforça de contenir sa crainte. Mais ses mains s’agrippèrent fermement à la planche sur laquelle elles étaient toutes deux assises. Sœur Mérédith était toujours hilare :

« Tu vois tous ces sacs derrière ? C’est pour tous les enfants de la fondation. Je m’occupe de tous les orphelins que je croise sur ma route, tu sais…

-  Qu’est ce que c’est, un orphelin ? Demanda Alissa avec curiosité.

-  Ce sont des enfants comme toi, Alissa. Vous viendrez avec moi, tous les trois. A la fondation, nous travaillons tous pour le maître des lieux en échange d’un lit, d’un toit et de nourritures. Nous recueillons ainsi tous les pauvres gosses errant dans les rues… »

Alissa montra inconsciemment de l’impatience, ne songeant guère qu’à une seule chose : retrouver sa sœur et son frère. Sœur Mérédith s’en rendit compte très vite. Elle eut un hochement de tête empreint de compréhension et de bonté :

« Va, mon petit, décris-moi votre maison. »


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