Photo l'Internaute
Ô souvenirs! printemps! aurore! (extrait)
Ô souvenirs ! printemps ! aurore !
Doux rayon triste et réchauffant !
- Lorsqu'elle était petite encore,
Que sa soeur était tout enfant... -
Connaissez-vous, sur la colline
Qui joint Montlignon à Saint-Leu,
Une terrasse qui s'incline
Entre un bois sombre et le ciel bleu ?
C'est là que nous vivions, - Pénètre,
Mon coeur, dans ce passé charmant !
Je l'entendais sous ma fenêtre
Jouer le matin doucement.
Elle courait dans la rosée,
Sans bruit, de peur de m'éveiller ;
Moi, je n'ouvrais pas ma croisée,
De peur de la faire envoler.
Ses frères riaient... - Aube pure !
Tout chantait sous ces frais berceaux,
Ma famille avec la nature,
Mes enfants avec les oiseaux ! -
Je toussais, on devenait brave.
Elle montait à petits pas,
Et me disait d'un air très grave :
" J'ai laissé les enfants en bas. "
Qu'elle fût bien ou mal coiffée,
Que mon coeur fût triste ou joyeux,
Je l'admirais. C'était ma fée,
Et le doux astre de mes yeux !
(...)
Victor Hugo - Les contemplations -