La taille ça compte. Loin de moi l’idée que c’est la longueur d’un morceau qui fait sa qualité, mais quel plaisir d’entendre un bon titre qui sait sortir du cadre des 3 minutes sans lasser. Ajoutez à cela un truc tout bête : quand on aime un morceau on voudrait qu’il ne s’achève jamais. Le titre de 10, 20 minutes et plus, c’est donc avant tout un fantasme d’auditeur. Les morceaux qui vont suivre durent tous au moins 8 minutes. Ils ne pourraient pas exister autrement. Ils sont tous casse-gueule, ils s’en sortent tous avec les honneurs. C’est parti pour une playlist d’1h40 environ pour 9 titres.
1/ Archive - Lights : Archive prend souvent le temps. L’intro de deux minutes, c’est presque un rituel. Spécialiste du genre avec déjà une dizaine de chansons durant au moins dix minutes. Là, on est partis pour un quart d’heure, et ça passe en 5 minutes. On se laisse embarquer dans le bateau, on n’a même pas besoin de prendre le temps. On ferme les yeux et on décolle. Pas de couplets, pas de refrain, c’est la folle recette de ce titre. Simplement les instruments qui s’empilent finement les uns sur les autres et à 8′36, le chanteur daigne faire un bout de chemin avec nous, si bien qu’on ne saurait même plus dire comment ce trip a commencé. Avec ça, vous partez dans les étoiles.
2/ Dire Straits – Telegraph road : Salaud de Knopfler. Ultra connu pour ses formats classiques à 3 minutes, il surprend son monde. Pour le coup, Telegraph Road, c’est LA chanson rock qui ne doit pas s’arrêter. Et ça tombe bien. Il a pensé à tout le monde: ceux qui aiment le mou, ceux qui sont plus rock et punch, fans de riffs endiablés, amoureux de la finesse. Voilà de la dentelle bien planquée sous sa légendaire gratte rouge et blanche.
3/ The Doors – The end : Non non, ce n’est pas la musique d’un film sur le Vietnam. C’est une chanson des Doors. Rien à voir. Vous êtes défoncés, eux aussi. Ces mecs m’énervent. Leur son est brouillon, mais hyper cadré. Lourd mais fin. Décalé mais logique. Créatif mais rationnel. Les Doors en fait. Faut aimer le bordel, le bruit. Merci à la gratte et la batterie qui permettent de suivre à peu près correctement dès la première écoute. Fucking genious!
4/ Supertramp - Fool’s overture : Comment faire monter la sauce avec un piano en une leçon. Merci à Sir Winston Churchill qui donne de la voix à 2′22. Ce titre est fou pour ça: ils vous laissent 1′30 sans musique aucune. Juste une foule, Churchill, des cloches, des trompettes de héraut. Aucun lien, fils unique. Tenez, démerdez-vous. Ah et aussi le piano et le synthé trouvent leurs lettres de noblesse pour tous ceux qui seraient encore sceptiques sur le lien entre le rock et eux. Du grand Supertramp. Leur meilleure avec ‘A Soapbox Opera’ malheureusement trop courte pour trouver une place ici bas.
5/ John Butler trio – Ocean (live) : John Butler est un peu chiant comme mec, excusez son speech d’ouverture. En revanche il a raison : il est meilleur quand il la ferme et qu’il laisse parler sa guitare à 12 cordes. Ocean est un morceau de bravoure : on tient pendant plus de 11 minutes suspendus aux doigts de John ici en solo. Parfaite montée en puissance épique, acmé à 9′00 tout pile, et le morceau s’achève sans nous laisser redescendre. Cruel John. Un morceau qui donne envie / décourage de se mettre à la gratte.
6/ Four Tet – Unspoken : La musique électronique aussi sait prendre son temps. Four Tet est un génie pour ce genre de choses. Sa spécialité : faire un morceau avec des bouts de ficelles. Mention spéciale à la rythmique trainante façon chaine de vélo. Bonus piano classique. La classe.
7/ LCD Soundsystem – Us V Them : La force de ce titre, c’est d’être à bloc du début à la fin. Pas de pause, pas d’intro de trois minutes, pas de respiration. On envoie dès le début, quitte à finir complètement sur les rotules. A chaque fois que j’entends ce titre je me demande si le groupe arrive à finir le morceau en live sans se faire des lignes de poudre. Ce morceau c’est la pile duracell de notre playlist.
8/ Sigur Ros – Agaetis Byrjun : Une des innombrables perles du groupe aux titres indéchiffrables (et encore : ici sans les accents). On traverse un tunnel de coton pendant les 15 premières secondes, et puis on passe 8 minutes en apesanteur. Mention spéciale à la rythmique trainante : on a l’impression que le batteur laisse négligemment trainer ses baguettes sur la caisse claire.
9/ Television - Marquee moon : Difficile de décrire un machin aussi entêtant et aussi répétitif que marquee moon. Dès le départ ça ne sonne pas comme un titre qui va durer plus de 5 minutes. Je me souviens encore de la première écoute, à penser à 3′12 que c’est fini. Non non : ça reprend. Pareil. Répétitif. Mais c’est bien alors on reste.
Si Pink Floyd et Led Zeppelin (entre autres) ne sont pas dans ce classement, ce n’est en aucun cas une rancoeur nourrie à leur encontre par vos serviteurs. C’est juste qu’on aurait pas eu assez de 3 playlist pour mettre leurs titres. Du coup, aussi géniaux soient-ils, il faudra vous débrouiller seuls pour cette fois!
Encore une fois, la playlist spotify est là.