Magazine Journal intime

Distorsion du dernier soir.

Publié le 25 mai 2010 par M.
J'aime bien l'orage, et les mirages glacés sur le balcon noir. J'ai peur d'avoir peur de parler, je vacille entre espoir et résignation, j'ai le vertige, un peu. J'observe mon ventre qui enfle et enfle, comme sous l'effet de la pression intérieure, je n'ose plus me regarder en entier, l'image est trop imposante et trop flasque. Sur un fil aiguisé par la tension l'ultime névrose se réveille une nouvelle fois, la plus futile et la plus abjecte, même à toi je n'en parle jamais, c'est trop honteux d'être fille à ce point là. J'écoute Foucault parler du corps impitoyable, moi non plus j'ai jamais passé le stade du carcan mielleux et putride, et parce que j'ai peur, je me sens peser si lourd sur mes jambes molles. C'est le ravage que j'ai jamais su réparer, je ne sais pas m'arrêter de bouffer, bouffer pour combler l'éternel morceau vide entre les côtes, pour ravaler les mots, pour ne pas risquer d'être emportée par un coup de vent. Je sais, j'exagère, mais c'est pas vraiment moi qui parle c'est moi à 5 ans, moi à 10, moi à 15, la tête dans la pharmacie puis dans la cuvette, et maintenant quoi, ce truc là n'a toujours pas changé : quand je me regarde, je suis un peu triste. Même si. Bien sûr. Les choses changent mais le sentiment d'être dégueulasse lui, il stagne et se réveille au gré des printemps, mes bras dans les manches longues et des t-shirts toujours trop grands, je ne m'assume pas encore vraiment. Encore moins quand les gens demandent, d'où viennent les traits ? Pourquoi t'es pas lisse ? Même aujourd'hui, maintenant, ça déferle encore : le cri déchirant de la chair opprimée. Esclave des tristesses ancestrales et sac ordurier de la colère, dites moi, apprenez moi, comment fait-on machine arrière, comment fait-on repasser la frontière au rejeton du négatif, j'ai tout essayé pour faire taire l'appétit glauque des guerres internes, mais tout ce que je fais, c'est grappiller chaque fois quelques autres miettes de temps. Trop de matérialité me rend malade, et le mec parle de cette vilaine coquille de corps dont l'esprit se tyrannise, et moi j'ai peur d'avoir peur de parler. De céder le pas. C'est bien simple, au final, je m'aime quand on m'aime, les corpuscules bâtards se pendent si tu dors avec moi. Ils peuvent rester morts des mois et des mois. Mais de temps en temps, la terreur maladive de mes mots culbutants se cristallise dans mon reflet distordu, gonflé, témoin des échecs passés, et alors ils me narguent. A défaut de casser les miroirs, je ferme les yeux. Demain, j'espère bien qu'ils retourneront grogner en silence, dans le fond de leur tombe exigüe.

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