En général, les pensées passionnées tantôt excitent
dans l'âme la partie concupiscible, tantôt bouleversent l'irascible, tantôt
obscurcissent la raisonnable. Le résultat, c'est l'aveuglement de l'esprit pour
la contemplation spirituelle et pour l'envol de la prière. C'est pourquoi le
moine, et particulièrement le solitaire, doit surveiller exactement ses pensées
pour en reconnaître et supprimer les causes. Et voici comment les reconnaître :
quand des images de femmes, auxquelles se mêle la passion, excitent la
puissance concupiscible, la cause en est l'intempérance dans le boire et le
manger, jointe à de fréquents entretiens, que rien ne justifie, avec des femmes
; la suppression de ces causes s'obtient par la faim, la soif, les veilles et
la solitude. Quand la puissance irascible, à son tour, se trouble au souvenir
passionné d'offenses reçues, la cause en est l'amour du plaisir, la vanité,
l'attachement aux objets matériels. (Car ce qui afflige l'homme qui n'a pas la
liberté intérieure, c'est d'en être privé ou de ne pouvoir les atteindre.) La
suppression de ces causes s'obtient par le mépris — un mépris absolu — de ces
bagatelles, par amour pour Dieu.
Troisième
centurie sur l'amour