Idée n°1 : je déteste les victimes. Ceux qui ont la souffrance ostentatoire, ceux dont les épaules croulent sous le poids d’une misère conceptuelle et tellement subjective. J’exècre cette épidémie de « gueule de chien battu » qui s’abat sur la génération princesse. Parce que c’est une maladie qui touche essentiellement les femmes en âge de procréer. Mais pas seulement. Mon message s’adresse plus généralement à ceux qui maugréent leur chagrin, et suscitent de la sorte la tumultueuse et hypocrite empathie de leurs congénères, à la manière d’une meute de hyènes dont l’une d’entre elles aurait capoté en mettant bas. Les oiseaux se cachent pour mourir, paraît-il. Si mes semblables pouvaient se cacher pour pleurnicher, je leur en saurai gré. Et en silence bordel !
Idée n°2 : tiens, pour une fois, un brin d’optimisme dans ce journal intime qui manque résolument de pudeur (Camus avait écrit, à ce propos : « Si Nietzsche avait raison de dire qu’humilier un homme, c’est le tuer, toute tentative sincère d’autobiographie serait un acte suicidaire » ; Alors pourquoi je vais tellement mieux ?) Bref, je m’éparpille. Oui, donc le rayon de soleil aujourd’hui (profitez-en, j’ai pas vocation à apporter du bonheur à mes semblables), c’est le suivant. J’avais lu quelque part cette formule magique (au sens propre du terme) : « comme une imbrication de l’intime et du paraître ». Je crois que je ne parviendrai jamais à résumer aussi bien l’antagonisme d’un ressenti en si peu de mots. Voilà bien quelqu’un d’excessivement talentueux : il lui aura fallu seulement trois mots pour me faire appréhender l’essence d’un art contemporain qui m’échappe totalement. Et qu’accessoirement, je trouve toujours aussi moche ; sauf à travers ses mots. Un vrai « tag mental », quoi.
Idée n°3 : j’ai encore du chemin à parcourir avant de devenir une bête féroce et respectée. Dans le genre « coups de téléphone importants », j’en ai passé deux aujourd’hui. Mais alors importants, quoi. Le premier fut adressé à l’un des manitous de la clique des « je sais tout mais j’dirai rien ». Dieu seul sait déjà dans quelle gueguerre intestine je me suis encore laissé entraîner. Comme si le métier de ces gens-là n’était pas assez anxiogène, ils trouvent encore le moyen de se chamailler entre eux. Et quand il pleut des coups, mieux vaut être du côté du plus fort. J’y suis, c’est déjà ça de pris. Deuxième coup de téléphone : un P.-D.G. (c’est comme ça que ça s’écrit quand on observe le protocole à la virgule). Ca, c’est le genre de coup de téléphone avant lequel on suce un Ricola pour avoir la voix claire, et dans la perspective duquel on regarde dans la glace si on est suffisamment bien coiffé (stupide, j’en conviens, mais rassurant). Et bien en fait, n’en déplaise à l’imaginaire collectif, ces gens-là sont – en général - des gens très sympas, d’une intelligence relationnelle rare. Mais aussihumains, qui ont parfois le besoin d’être confortés. Du coup, on passe en un éclair du stade de brebis égarée à celui de sauveur providentiel. Ca flatte les egos surdimensionnés comme le mien, certes, mais à l’arrivée des premières chaleurs estivales, on ne parvient pas pour autant à se dispenser d’une brève sueur froide au moment où l’on raccroche. La sueur ça veut dire : « si tu t'es raté, l’agence perd un gros client ». Le froid, c’est une manière de dire : « cool, détends-toi, t’as géré ».
Idée n°4 : j’ai enfin compris pourquoi, depuis quelques jours, j’avais de nouveau le sentiment de ne pas avoir tourné la page ; celle de mon ex. Ca fait quand-même presque deux ans… En fait la réponse est très conne (si c’est la bonne, néanmoins). Avant qu’elle ne me quitte, en 2008, j’avais ressenti comme une métamorphose brutale de son caractère. En fait, je crois que je ne suis jamais parvenu à faire le deuil de celle que j’avais aimé, avant qu’elle ne devienne celle qui m’a quitté. Comme si quelque chose d’ignoble à mes yeux me l’avait confisquée. Un mal pour un bien : je me suffis à moi-même, et j'en jouis !
Idée n°5 : je suis nommé « responsable des opés ». Je sais pas si c’est une bonne nouvelle. Mais après tout, le stress, on finit par s’en accommoder, voire même à s’ennuyer sans lui. Alors je vais troquer mes Malabars contre des « Jawbreakers », et me répétant pour m’endormir qu’à force de vouloir devenir quelqu’un de méchant, je parviendrai bien à être dangereux, un jour. Ca me ferait quand-même sérieusement chier de finir comme un vulgaire petit pimousse.
Voilà, c’est creux, je sais. Et pour un mec qui n’a rien de bien spécial à raconter, j’ai encore pété un record. Mais qu’il est apaisant, parfois, de se sentir vide ! Conclusion : la vache… A quoi dois-je ressembler quand je suis VRAIMENT de mauvaise humeur… ?
PS pour Miss T. : Tu vois bien que mes thèse ne s’affinent pas, mais qu’elles s’ébranlent en cachette ;-)