Photographie paradoxale

Publié le 09 juin 2010 par Tourments
Un ami très cher m’a écrit ceci l’autre jour;''Je constate que tu recherches tout ce qui est naturel et surtout la beauté de ce que la nature nous procure. Pour ce qui est fait de la main de l'homme, tu représentes souvent l'aspect désuet, ce qui se détériore, en contraste avec le renouveau de la nature. C’est l'éternel contre le superficiel.''
J’ai lu son commentaire et j’en suis restée subjuguée, légèrement sous le choc. Même si je pratique cet art depuis le début de l’adolescence, et que je prends un plaisir fou à faire de la photo, je n’avais jamais remarqué la tendance que j’avais à faire exactement ce qu’il décrit. Sous le choc j’étais, de m’apercevoir qu’une autre personne que moi-même arrivait à voir ma photographie pour ce qu’elle est réellement, dans la profondeur de ce que j’essaie de capter en immortalisant des scènes et images diverses. Subjuguée de m’apercevoir que moi-même, je ne m’étais pas rendue compte que c’est ainsi que mes photographies prenaient tout leur sens.
Non, je n’avais pas poussé l’étude de mes sujets à ce point. Lorsque je photographie, j’y vais avec ce qui m’inspire, ce qui m’appelle. La nature étant ma plus grande source d’inspiration, je l’immortalise à outrance, y trouvant toujours quelque chose d’encore plus merveilleux à capter. Les fleurs, les animaux, les arbres et j’en passe, sont des beautés magnifiques, qui souvent me rappelle combien la vie peut être belle. Je les photographie, les dessine, les peints, les pyrograve, car je m’imprègne de leur magnificence et la transfert dans ma vie, pour alléger mes tourments.
Inversement, mes photographies de natures mortes ou d’objets faits de main d’homme diffèrent. Je leur attribue souvent le ton noir et blanc, ne sachant trop pourquoi. Je me plais à prendre en clichés des scènes plus dévastées, solitaires, comme un chemin de fer abandonné par son train ou un édifice désaffecté. J’y trouve la même beauté, mais seulement plus triste, plus sombre. Ces clichés sont ceux qui m’inspirent la désillusion de la vie, la mort certaine, l’aboutissement de l’existence.
Peut-être est-ce parce qu’inconsciemment, pour moi, l’Homme détruit au lieu de construire. Peut-être est-ce que l’Homme ne peut simplement pas renaître à travers cet univers de béton et de métal. Peut-être est-ce seulement mon aversion envers l’Humain qui se transpose dans ces images que je capte, et que lorsque je les regarde, je vois combien l’Humain cours à sa perte…
L’éternel contre le superficiel, n’est-ce pas là justement la base de la Vie. La Vie, la renaissance de cette Vie est éternelle. La Vie existera toujours, même si nous ne sommes pas immortels. La nature, la faune, la flore trouveront toujours leur chemin. Mais nous, Humains, sommes perdus si rapidement. Nous ne savons renaître, ne pouvons repartir à zéro. Tout ce que nous bâtissons s’autodétruit invariablement. Peut-être est-ce juste cela, un constat de fatalité Humaine, qui dicte mes sujets photographiques…
J’en sais trop rien, en fait, mais en bout de ligne, c’est tout à fait moi. Cette photographie paradoxale, si vivante et morte à la fois. Si belle et hideuse à la fois. Les deux côtés de la médaille de la Vie, que je prends plaisir à tourner et retourner à ma guise, y allant seulement de mes émotions et sentiments. Et à le constater ainsi, j’aime d’autant plus cet art, qui me permet d’explorer la Vie, à ma façon.