La caserne des pompiers apporte un je ne sais quoi de sécurité qui fait qu'en général il n'y a pas le feu au lac.
Mais voilà, aujourd'hui dans l'air flotte une atmosphère lourde où se mêlent effroi et indignation.
Voici les faits :Dans la maison du coin de la rue, celle qui vient d'être ravalée au rang de jolie maisonnette toute proprette, s'est installé depuis peu une famille tout ce qu'il y a de comme il faut, là où il faut, enfin surtout pour la fille.
Ces nouveaux habitants surent gagner l'estime du voisinage à force de sourires et d'amabilités quotidiennes pour les uns et de décolletés abyssaux pour l'autre.Il y a là le père, la mère, deux garçons, la fille donc et, apparemment, une tante. Très maigre.
La quiétude familiale semble régner, une douce harmonie émane de cette petite communauté, et c'est là que viennent se placer tous les ingrédients d'un horrible fait d'hiver, qui glace le sang lorsque l'on réfléchit un court instant aux abominables conséquences qui se seraient produites si le pater familias, sur un coup de folie, avait fait germer dans son cerveau malade l'idée de pendre la crémaillère, lui, et toute sa famille, par le lien de parenté qui les unis.
Suite à un lapsus trompeur, s'imaginant pendue haute et courte, avec ces nouveaux arrivants à peine connus et déjà morts, hier matin la crémière a tourné de l'oeil, au beurre noir quant elle heurta une chaise. On ne sait jamais à qui l'on a affaire ma bonne dame, ce monsieur qui semblait si correct...
Dieu merci, il n'en est rien.
Pareille idée n'a certainement jamais effleuré les pensées de ce brave homme. Mais dans le quartier, néanmoins, elle à fait son chemin entre le PMU où les paris sont ouverts et l'épicerie qui vend du ragot au kilo.
Lorsque l'on en parle entre nous, un tremblement irrépressible nous parcourt l'échine, dans nos dos glacés d'effrois et, des fois de froid ce qui est un comble pour un fait d'hiver.
Mais non, nous ne sommes pas des voisins zinzins, justes attentifs, et un peu imaginatifs.
C'est la vie, pas de quartier.