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La préparation immédiate du prêtre à la célébration de la messe

Publié le 18 juin 2010 par Hermas

L’Année Sacerdotale à l’occasion du 150° anniversaire de Jean-Marie Vianney, le saint curé d’Ars, vient de se terminer. Pendant un an, prêtres et fidèles ont prié pour la sanctification des prêtres. Et, au terme de cette année, notre Saint-Père le Pape Benoît XVI a consacré tous les prêtres au Cœur Immaculé de Marie.

L’Année Sacerdotale est terminée, mais la tâche de tous, fidèles et prêtres, est de la poursuivre, pour qu’elle ne soit pas simplement un coup d’épée dans l’eau, l’effort d’une seule année, que l’on oublira ensuite. Durant cette année, le Saint-Père a rappelé à de nombreuses reprises aux prêtres la nécessité de célébrer la Messe quotidienne, avec piété et ferveur, car la Sainte Messe est le centre et le sommet de la vie du prêtre, de laquelle découle toute sa vie spirituelle, toute sa sanctification et toute la fécondité de son ministère pastoral.

Nous qui avons reçu la grâce du Sacerdoce, prêtres, ne pourrions-nous mettre en tout premier lieu de notre engagement, l’approfondissement de ce qu’est le Saint Sacrifice de la Messe ? Comment ?

- En méditant les prières que la liturgie nous présente, en réfléchissant à la signification profonde des gestes qui accompagnent ces prières ;

- en célébrant ces saints Mystères d’une manière simple, digne, religieuse, hiératique, avec une conscience de plus en plus grande de leur valeur, pour nous-mêmes et pour les fidèles qui nous voient, qui nous regardent, que nous avons mission d’enseigner, dans le respect scrupuleux - puisque que la sainte Messe n’est pas une tâche qui nous appartienne - les prescriptions de l’Eglise qui ont été édictées pour éviter tout initiative personnelle maladroite, toute ambiguïté dans nos gestes ;

- en pensant aux textes que nous « récitons », que nous « lisons » : que dis-je, aux paroles que nous adressons à Dieu lui-même : « Père Infiniment Bon, Toi vers qui montent nos louanges ». Nous sommes en présence de Dieu, nous sommes comme Moïse sur le Sinaï devant le Dieu trois fois Saint, engagé dans un tête-à-tête intime, pour prier pour nous et pour les fidèles que Dieu nous a confiés. Nous sommes à la dernière Cène et nous entendons Jésus lui-même nous dire « Faites ceci en mémoire de moi », car « Ceci est mon Corps, ceci est mon Sang, livré pour vous, versé pour vous ». Nous sommes au pied de la Croix, avec Marie, avec saint Jean, avec les saintes femmes. Nous rendons présent l’unique Sacrifice du Christ. Pouvons-nous rester indifférents quand un païen, le Centurion romain, s’écrie au moment de la mort de Jésus : « Vraiment Celui-ci était Fils de Dieu » (Mathieu 27, 54 b) ?

Cela suppose, comme l’indiquait le Saint-Père, une vie intense de prière, de méditation, pour comprendre la grandeur du don que nous avons reçu, la grandeur de ce que nous réalisons en célébrant le saint Sacrifice de la Messe durant lequel le Seigneur en personne se rend présent dans l’Eucharistie, dans l’Hostie et dans le Vin, pour devenir notre Vie, à nous d’abord, et à tous les fidèles qui le reçoivent en état de grâce.

Cela suppose aussi et surtout que la Messe soit au centre de nos pensées, que nous nous préparions à ce grand moment, que nous le désirions, que nous le vivions par avance, que ce soit une joie de nous approcher de l’autel, de Dieu qui réjouit notre jeunesse : « Introibo ad altare Dei, ad Deum qui laetificat juventutem meam ». Que nous nous y préparions avec sérieux en demandant à Dieu de nous faire comprendre toujours plus la grandeur de ce que nous allons réaliser. Et cette préparation ne peut pas ne pas se manifester dans notre manière de nous approcher de l’autel, y compris dans notre présentation physique, y compris et surtout dans sa préparation immédiate.

Tout commence en effet à la sacristie.

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Si j’osais employer une comparaison, inappropriée certes, et qui ne reste qu’une comparaison, je dirais que la sacristie est le Parvis des prêtres et de ceux qui aident le prêtre dans le service de l’autel, lieu dans lequel ils se purifient, ils se recueillent, ils se revêtent des ornements sacrés, pour enter dans le Saint des Saints :  « Aufer a nobis, quaesumus Domine, iniquitates nostras, ut ad Sancta Sanctorum mereamur introire », « Enlevez nos fautes, Seigneur, afin que nous puissions pénétrer jusqu’au, Saint des Saints avec une âme pure » (Prière que le prêtre récite en montant à l’autel, rite tridentin).

La sacristie !

 

Monseigneur Piero Marini en parle en ces termes, à propos de la crise en liturgie, dans l’ouvrage qu’il a écrit, et que nous avons largement cité dans « Hermas ». Parlant de plusieurs cérémonies de mariage dont il avait été le témoin il concluait, devant la désinvolture dans les gestes, dans la négligence concernant les ornements : le prêtre qui célèbre de cette manière « ne montre-t-il pas ainsi de la désinvolture pour cette liturgie ? » Et il ajoutait aussitôt :

« C’est un peu la même situation dans les sacristies où nous nous préparons. Je me souviens par exemple de celle de la cathédrale de Tolède, en Espagne, avec tous ses tableaux du Greco. C’est là qu’on s’habille, dans un cadre impressionnant, où il est écrit « SILENCE ». Il s’agit d’un lieu de formation et de catéchèse. Et l’on peut dire : "Si telle est la Sacristie pour nous habiller, quelle sera l’importance de la célébration que je vais faire dans l’Eglise !" En réalité, il m’est arrivé plusieurs fois de pénétrer dans la sacristie d’une église moderne pour revêtir les ornements sacrés. Dans cette sacristie j’ai trouvé un grand désordre de vieux chandeliers, des vases avec des fleurs passées et fanées ; puis on a trouvé des habits liturgiques qui n’avaient pas été lavés depuis longtemps. Ce n’est naturellement pas toujours ainsi, mais les conditions de préparation n’ont-elles pas une influence sur celles de la célébration ? » (Mgr Piero Marini, Cérémoniaire des Papes, Bayard, Paris 200, pages. 103-104).

Certainement ! La sacristie est devenue la « salle des pas perdus » des gares de nos grandes villes. Ouverte à tous, on y parle de tout à voix haute. Les « enfants de chœur », de moins en moins nombreux, et souvent « remplacés » par des « enfantes de choeures » se livrent à un brouhaha pour savoir qui va faire ceci ou cela, non conscients, cela se voit, même pendant la sainte Messe, de ce qu’ils vont faire. Les adultes, hommes et femmes qui attendent pour parler au prêtre, au curé, qui entretient la conversation, ou qui arrive en courant, répondant aux uns et aux autres, décrochant l’aube qu’il endosse en hâte sur ses habits civils, comme on revêt une chemise de nuit ou un pyjama, ou un habit de travail, une salopette, prend l’étole mise en hâte sur les épaules, qui pend sur l’aube, sans être fixée par le cordon ; et enfin tire du cintre la chasuble dont il se revêt comme on met un quelconque manteau. Sans parler des prêtres qui arrivent à la dernière minute, tout en sueur « pour concélébrer ». On tire la corde de la clochette : et la Messe commence… On a pris le train, en courant…

Monseigneur Marini a vu juste : en agissant ainsi, dès la sacristie, le prêtre « ne montre-t-il pas ainsi de la désinvolture pour cette liturgie ? ». Répétons, et méditons-les, ces paroles, à propos de ce qu’il ressentit dans la sacristie de la cathédrale de Tolède : « C’est là qu’on s’habille, dans un cadre impressionnant, où il est écrit « SILENCE ». Il s’agit d’un lieu de formation et de catéchèse. Et l’on peut dire : "Si telle est la Sacristie pour nous habiller, quelle sera l’importance de la célébration que je vais faire dans l’Eglise !" ».

La sacristie, dans des temps plus anciens, mais pas tellement, il suffit de remonter cinquante ans en arrière, était un lieu « sacré » où seuls entraient le prêtre, les ministres de l’autel, et les servants chargés du service de l’autel. Partout, ou presque, il y avait un prie-Dieu, avec, en face du prêtre qui s’y agenouillait, dans le profond silence qui régnait, des prières pour aider le célébrant à se préparer spirituellement à ce qu’il allait accomplir. Ensuite, le prêtre s’approchait d’un petit lavabo, se lavait les mains, en récitant une prière dont le texte était accroché au-dessus du lavabo. Puis il se rendait devant le meuble, ayant souvent la forme d’une table, d’un autel, avec une Croix et des chandeliers, et sur laquelle étaient préparés les ornements sacrés qu’il allait revêtir. Non pas en désordre. La chasuble bien étendue, ou déposée sur « l’autel » (selon qu’il s’agissait d’une chasuble gothique ou romaine), l’étole placée sur la chasuble, avec le manipule (car il avait été ordonné sous-diacre). Sur le tout, le cordon, placé de telle manière qu’il formât un « M » (Marie), et l’aube. Sur l’aube, l’amict, déplié de manière à ce que le célébrant puisse le prendre aisément par les cordons.

En silence, et recueilli, le prêtre prenait l’amict, le baisait en son centre (où il y avait une croix), le plaçait en partie sur sa tête et ensuite sur le cou, en récitant la prière adaptée au rite. Puis, le servant l’aidait à revêtir l’aube qu’il ajustait pour qu’elle tombât de manière harmonieuse, et il lui tendait le cordon que le prêtre nouait autour de sa taille. Celui-ci recevait l’étole, baisait la croix qui s’y trouvait, et la nouait autour de sa taille avec le cordon. Et enfin, le servant, le cérémoniaire, ou l’enfant de chœur s’il était seul, aidait le célébrant à revêtir la chasuble. Pendant tout ce temps, et à chaque ornement, le prêtre récitait en privé les prières prescrites et adaptées à chaque ornement.  De leur côté, les clercs chargés du service de l’autel, échangeaient à voix basse quelques paroles pour vérifier que chacun savait bien ce qu’il avait à faire. A l’heure de la Messe, le prêtre disait « Procedamus in Pace », et les clercs répondaient : « in Nomine Christi amen ». C’était alors le salut à la Croix placée sur « l’autel » et l’on entrait dans le sanctuaire, dans le chœur, et la sainte Messe commençait, dans le recueillement, chacun s’y étant préparé dans le silence, dans la méditation, le prêtre surtout, dans l’attente de cette rencontre avec Dieu dans le « Saint des Saints ».

Ce n’est plus de notre époque ? C’est une époque révolue ? Ce n’est plus pensable ni réalisable ? Non ! Il suffit de le vouloir. C’est ce que faisait le saint curé d’Ars, c’est ce peuvent faire, même aujourd’hui, tous les prêtres qui veulent vraiment être comme saint Jean-Marie Vianney, des prêtres, des « alter Christus ». Il suffit de réfléchir, de méditer, et de se décider à donner à la sainte Messe toute la place qui lui revient, en raison de ce qu’elle est et que l’on ne peut rabaisser à une simple assemblée de fidèles qui se réunissent. C’est cela, mais c’est beaucoup plus ! Infiniment plus : « Si telle est la sacristie pour nous habiller, quelle sera l’importance de la célébration que je vais faire dans l’Eglise ».

Nous ne pouvons nier qu’il y a une perte du sens du sacré, chez les fidèles et chez les prêtres. On ne peut nier que, à part quelques églises qui attirent une nombreuse assistance (il faut honnêtement se demander pourquoi ?), nos églises se vident. On me citait le cas d’une paroisse de 5.000 habitants, et ce n’est pas une exception, où 16 personnes assistaient à la Messe du dimanche…

L’Année Sacerdotale ne peut pas ne pas susciter un renouveau de la foi, de l’amour de Dieu, de la joie d’assister au saint Sacrifice de la Messe chaque dimanche et même en semaine pour les fidèles, et, pour les prêtres, comme le rappelle le Saint-Père, par la célébration quotidienne de la sainte Messe, en état de grâce. Le saint curé d’Ars qui s’est « donné tout entier pour ses âmes » nous aidera. Il suffit que nous le voulions et que nous nous décidions à une conversion vraie.

Nous voulons le renouveau de la foi chez les fidèles. Nous voulons voir nos églises remplies de fidèles affamés et assoiffés de Dieu ? Alors, soyons de « nouveaux curés d’Ars » ». Et commençons par le début.

Nous voulons remplir nos églises ? Commençons par « sanctifier » nos sacristies : qu’elles deviennent vraiment le parvis des prêtres qui se préparent dans le recueillement, à entrer dans le Saint des Saints. C’est peu de choses, penserez-vous ? C’est capital, pour le prêtre d’abord et pour les fidèles. Et, pour ce faire, le Pape Benoît XVI a rappelé un point important, la préparation immédiate à la célébration du saint Sacrifice de la Messe, dans l’homélie de la Messe Chrismale de 2007, par la récitation des prières que la liturgie offre aux prêtres pour l’aider au recueillement en revêtant les ornements sacrés : « L'acte de revêtir les vêtements sacerdotaux était autrefois accompagné par des prières qui nous aident à mieux comprendre chaque élément du ministère sacerdotal. En commençant par l'amict ». IL FAUT RELIRE ET MEDITER CES PAROLES DU SAINT-PERE. Et les mettre en pratique. C’est peu de choses. Ce sont les cinq pains pour nourrir un multitude.

Voici ces prières que chaque prêtre pourrait prendre l’engagement de reprendre, et dont la richesse n’échappera à personne :

Prières à dire par le prêtre en revêtant les ornements sacerdotaux


Orationes dicendæ cum sacerdos induitursacerdotalibus paramentis

Cum lavat manus, dicat :

Da, Domine, virtutem manibus meis ad abstergendam omnem maculam ; ut sine pollutione mentis et corporis valeam tibi servire.

Ad amictum, dum ponitur super caput, dicat :

Impone, Domine, capiti meo galeam salutis, ad expugnandos diabolicos incursus.

Ad albam, cum ea induitur :

Dealba me, Domine, et munda cor meum ; ut, in Sanguine Agni dealbatus, gaudiis perfruar sempiternis.

Ad cingulum, dum se cingit :

Præcinge me, Domine, cingulo puritatis, et exstingue in lumbis meis humorem libidinis ; ut maneat in me virtus continentiæ et castitatis.

Ad manipulum, dum imponitur bracchio sinistro (pour ceux qui ont été ordonnés sous-diacres)

Merear, Domine, portare manipulum fletus et doloris ; ut cum exsultatione recipiam mercedem laboris.

Ad stolam, dum imponitur collo :

Redde mihi, Domine, stolam immortalitatis, quam perdidi in prævaricatione primi parentis : et, quamvis indignus accedo ad tuum sacrum mysterium, merear tamen gaudium sempiternum.

Ad casulam, dum assumitur :

Domine, qui dixisti : Iugum meum suave est, et onus meum leve : fac, ut istud portare sic valeam, quod consequar tuam gratiam. Amen.

« Quod Deus concedat per misericordiam suam » : que Dieu nous accorde cette grâce par sa grande Miséricorde !


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