Cinquantehuit

Publié le 02 juillet 2010 par Rafetnol
Ça fait un an que je n'ai pas tenu un crayon. Dans mon métier c'est comme une petite mort, une mise à la retraite anticipée au mieux. Au début j'ai vraiment eu envie d'arrêter de dessiner, de prendre des vacances avec mon travail. Quand on fait quelque chose d'abord pour son propre plaisir et que ce plaisir devient un travail, au bout de quelques années le plaisir se perd peut être. Alors après un trop plein de dessins, j'ai décidé de prendre des vacances. J'ai fermé la maison et je suis parti. Je n'ai pas emporté de crayons...J'ai traversé quelques pays. Je me suis arrêté dans certains, j'en ai survolé d'autres. J'ai fini par racheter de quoi dessiner. Quelques craies de fusain, quelques pinceaux, de l'encre et du papier. J'espérais que toucher le matériel après quelques mois d'abstinence me donnerait envie. Ça plus les paysages qui défilaient sous mes yeux, vierges de mon regard, de mon trait. J'ai essayé. Mais rien ne venait. Ma main était comme morte, comme si le contact du crayon entre les doigts, du grain du papier à aquarelle sous la paume m'était étranger.J'ai laissé tomber mes crayons une fois de plus. J'ai marché. J'ai visité des villes, des villages, des campagnes inconnues. J'ai rencontré des hommes des femmes, des enfants. J'ai échangé beaucoup. Mais je n'ai pas fait un dessin, pas un seul. J'ai décidé que mes vacances étaient finies et je suis rentré. Ma maison vide, ma table à dessin vide, le courrier qui s'entassait sur la table du séjour. Rien ne m'inspirait dans ce que je voyais. Je suis sorti, faire le tour du quartier, marcher dans ces rues familières que j'avais passé quelques mois à oublier.Et j'ai fini par me souvenir comment on tient son crayon...
****Kate Bush - Running up that hill
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