(1) Cette obscure clarté qui tombe des étoiles

qui consiste à voir les choses comme elles sont.
La mélancolie est une maladie
(Gérard de Nerval)

Obsédée par l'inscription gravée sur l'amulette, Marie fut incapable de trouver le sommeil. Maudissant les aiguilles du réveil qui galopaient sans l'attendre, elle tourna et retourna tant et si bien dans son lit, qu'à trois heures du matin, elle se leva, excédée.

Dans le séjour, elle prit son ordinateur portable, puis se faufila à nouveau sous les couvertures. Les dénommés Sloane étant légion sur Internet, elle laissa de côté le début de l'énigme pour se concentrer sur l'"échelle aux sept barreaux". Si ce symbole de l'accession au paradis proliférait dans l'iconographie chrétienne, avec l' échelle de Jacob

, elle n'en comprit pas pour autant le sens des "rayons affligés" qui croisaient les barreaux.

Quant aux trois séries numériques, elles la laissèrent perplexe. En première position des deux premières, on trouvait le nombre 16, et en dernière position des deux dernières, on trouvait le chiffre 1, mais elle ne savait pas comment exploiter ces étranges similitudes. Elle noircit une page entière de nombres qu'elle croisa, additionna, multiplia, écrivit à revers, décoda avec les lettres de l'alphabet, sans résultat. Elle ne parvenait pas à établir de rapport entre les différentes séries, ni à trouver la "clé" cachée dans la troisième.

La fin de l'énigme lui semblait tout aussi obscure. Le " cœur ", la " plume " et les " plateaux " lui faisaient penser au mythe égyptien de la pesée du cœur, lors du jugement devant le tribunal d'Osiris. Le cœur du défunt occupait un plateau de la balance, la plume de la vérité, symbolisant la déesse Maât, occupait l'autre. La balance devait rester en équilibre pour que le défunt fût proclamé " juste de voix ". Mais cela n'expliquait ni le "crayon" ni "l'écrit".

Abîmée dans ses pensées, Marie cultiva les analogies jusqu'au petit matin. Aux premiers rayons du soleil, elle rendit les armes, une main rivée à la souris, l'autre au clavier. Lorsqu'elle s'éveilla, il était presque midi. Vêtue d'une vieille robe de chambre que sa grand-mère lui avait offert quand elle avait quinze ans, elle déjeuna en tête-à-tête avec son ordinateur, ce qui lui permit de visiter à distance quelques célèbres départements d'antiquités égyptiennes. Elle sillonna les galeries virtuelles des musées du Caire, du Louvre, puis celles du British Museum, qui regroupaient d'incroyables pièces ramenées d'Égypte au 19ème siècle par les anglais, peu après l' expédition napoléonienne. Elle rêvait déjà, les yeux mi-clos, d'un week-end au bord de la Tamise

, à fureter dans les rues de Soho

et de Covent Garden, quand son regard se figea.

Dans le prochain épisode, c'est Marie qui bénira le ciel...