Ce poème j'ai l'ai très certainement déjà déposé ici, je ne m'en souviens pas mais c'est du domaine du possible car Verlaine est un de mes poètes préférés et j'aime particulièrement la nostalgie de ce "Colloque sentimental". Qui n'a pas vécu sur les souvenirs d'amours mortes, foulant ou pas des avoines folles?
Marqueyssac, je me souviens qu'une photo illustrait déjà une de mes notes, cette photo d'ailleurs était sensiblement la même que celle que j'avais prise lors de ma visite du parc... Cette visite je l'ai effectuée il y a quelques années déjà, ne me demandez pas la date, de cela je ne me souviens plus. La mémoire me joue de plus en plus de très vilains tours... Mais la date n'a en fait que peu d'importance. Ce que j'ai retenu c'est l'ambiance générale de ce grand parc, ou chaque visiteur est à même de réciter son propre colloque sentimental. Qui n'a jamais eu de regrets, qui ne sent pas dans certains lieux ou certaines situations monter en lui des effluves de nostalgie? Ce jour-là, fin d'été ou début d'automne déjà, le grand parc était réellement solitaire et glacé, nimbé d'une brume qui empêchait de profiter du magnifique panorama sur la Dordogne. Hors saison, les lieux étaient déserts... j'ai gardé en mémoire la résonance feutrée de nos pas sur les allées, je me souviens de sculptures dispersées ça et là, de la présence d'une chapelle, d'un banc noyé dans une arche de buis taillés, de constructions venant mettre un point d'orgue à une allée, tel cet "Asile du poète"... Je me souviens surtout de nos deux spectres n'évoquant pas même le passé, nos yeux étaient-ils morts déjà et nos lèvres molles? Non certes, mais nous évoluions sans parler, dans un présent cerné d'incertitudes, même la nuit ne conserva pas nos paroles... Long monologue interne pour chacun d'entre-nous, ou peut-être dialogue muet avec un(e) autre... Nous n'étions sans aucun doute pas seuls à marcher sur ces sentiers, mais accompagnés de quelque fantôme de nos amours anciennes ou encore bien présentes. Tiraillés peut-être entre nos sentiments, histoire morte, histoire à poursuivre, nécessité de tourner une page, de repartir de zéro avec un autre amour ou poursuivre vaille que vaille avec le conjoint? Il faut beaucoup de courage pour changer de cap. Des années après cette visite, nous pourrions à nouveau effectuer la même promenade, nos coeurs alourdis de sentiments contraires, de souffrances, de serments brisés, de trahisons de l'être aimé aussi... Pour toi, pour moi aussi peut-être, c'est indéniable "L'espoir a fui, vaincu, vers le ciel noir."Nous marchons toujours côte à côte, mais plus vraiment ensemble, depuis longtemps nos routes se sont séparées. Je reste dans "l'affectif", alors que rêvant de renouveau et que ton coeur bat à l'évocation de leurs seuls noms, tu poursuis dans "la fuite". Tu as gardé le goût de la conquête, et veux plus que jamais protéger tes mystères. Je pleure un peu moins tôt , mais fais encore se lever des tempêtes. Ce magnifique "Colloque Sentimental" se fait l'écho de "La chanson des Vieux Amants", dans ce vieux parc solitaire et glacé...
Bien sûr, nous eûmes des orages
Vingt ans d'amour, c'est l'amour fol
Mille fois tu pris ton bagage
Mille fois je pris mon envol
Et chaque meuble se souvient
Dans cette chambre sans berceau
Des éclats des vieilles tempêtes
Plus rien ne ressemblait à rien
Tu avais perdu le goût de l'eau
Et moi, celui de la conquête
Oh, mon amour,
Mon doux mon tendre, mon merveilleux amour
De l'aube claire jusqu'à la fin du jour
Je t'aime encore tu sais, je t'aime
Moi, je sais tous tes sortilèges
Tu sais tous mes envoûtements
Tu m'as gardé de pièges en pièges
Je t'ai perdue de temps en temps
Bien sûr, tu pris quelques amantes
Il fallait bien passer le temps
Il faut bien que le corps exulte
Et finalement, finalement
Il nous fallut bien du talent
Pour être vieux sans être adultes
Mais mon amour,
Mon doux mon tendre, mon merveilleux amour
De l'aube claire jusqu'à la fin du jour
Je t'aime encore, tu sais, je t'aime
Et plus le temps nous fait cortège
Et plus le temps nous fait tourment
Mais n'est-ce pas le pire piège
Que vivre en paix pour des amants
Bien sûr, tu pleures un peu moins tôt
Je me déchire un peu plus tard
Nous protégeons moins nos mystères
On laisse moins faire le hasard
On se méfie du fil de l'eau
Mais c'est toujours la tendre guerre
Oh, mon amour,
Mon doux mon tendre, mon merveilleux amour
De l'aube claire jusqu'à la fin du jour
Je t'aime encore tu sais, je t'aime...
Jacques Brel
Jardin suspendu de Marqueyssac - Photo l'Internaute -© claude Gortchakoff
Colloque sentimental
Dans le vieux parc solitaire et glacé,
Deux formes ont tout à l'heure passé.
Leurs yeux sont morts et leurs lèvres sont molles,
Et l'on entend à peine leurs paroles.
Dans le vieux parc solitaire et glacé,
Deux spectres ont évoqué le passé.
- Te souvient-il de notre extase ancienne?
- Pourquoi voulez-vous donc qu'il m'en souvienne?
- Ton coeur bat-il toujours à mon seul nom?
- Toujours vois-tu mon âme en rêve? - Non.
- Ah! les beaux jours de bonheur indicible
Où nous joignons nos bouches! - C'est possible.
- Qu'il était bleu, le ciel, et grand, l'espoir!
- L'espoir a fui, vaincu, vers le ciel noir.
Tels ils marchaient dans les avoines folles,
Et la nuit seule entendit leurs paroles.
Paul Verlaine
(Fêtes Galantes)
LES COMMENTAIRES (1)
posté le 30 juin à 11:22
Je vous remercie d'avoir choisi ma photo pour ce très beau colloque sentimental