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Bientôt (16 juillet) : Notre-Dame du Mont Carmel

Publié le 14 juillet 2010 par Hermas

Le 16 juillet, l’Eglise fête Notre-Dame du Mont Carmel. Le Mont Carmel : pourquoi ? Cette fête est peu connue des fidèles, et fait penser au Carmel, aux Carmélites. C’est pour quoi il m’a semblé utile de « m’arrêter » quelques instant sur ce Mont, bien connu dans la Bible, et riche de signification, pour en arriver ensuite à la Fête de Notre-Dame du Mont Carmel.

Le Mont Carmel dans la Bible

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Le Mont Carmel est une montagne côtière du nord de la Palestine, qui surplombe la Méditerranée. Au temps de la Palestine de l’Ancien Testament, il était situé en Syro-Phénicie et avait une frontière commune avec la Galilée à l’est. Les montagnes de Galilée descendant du Nord, celles de Judée venant du Midi, se joignent en Samarie sur la chaîne assez courte qui tire de lui son nom et fait converger vers lui tous leurs grands souvenirs. Dom Guéranger (Année Liturgique)écrit à son sujet : « L'on dirait que par la situation dominante de son promontoire au centre même du littoral sacré, il a pour mission d'annoncer au loin sur la mer d'Occident l'Orient divin qui s'est levé du sein des ténèbres (cf. Luc. I, 78-79 : « Œuvre de la miséricorde divine qui nous amènera d’en-haut la visite du Soleil Levant »), « c’est-à-dire les temps messianiques ou le Messie lui-même » (cf. Bible de Jérusalem, note h).

Chez le prophète Jérémie, ce seul nom résumait à ses yeux tous les biens de la terre des promesses ; et quand les crimes du peuple élu menacent d'amener la ruine sur la Judée : « J'ai vu le Carmel désert, s'écrie le Prophète, et toutes ses villes détruites au souffle de la fureur de Dieu (Jérémie IV, 26) ». Mais voici qu'au sein des peuples païens, la future Sion succède à la première ; et huit siècles à l'avance, Isaïe la reconnaît à la gloire du Liban devenue sienne, à la beauté du Carmel et de Saron qui luit est donnée (Isaïe 35, 2 : « La gloire du Liban lui est donnée, la splendeur du Carmel et de Saron ; on verra la gloire de Yahvé, la splendeur de notre Dieu »).

Le Mont Carmel est tellement connu et renommé que, dans le Cantique des Cantiques (Cantiques, 7, 5), les suivantes de l'Epouse, célébrant pour l'Epoux celle qui sans retour a ravi son cœur, chantent que « sa tête est comme le Carmel, et sa chevelure comme les fils précieux de la pourpre du roi tressés avec soin dans les eaux colorantes (2) », car la pêche des coquillages fournissant la couleur royale était, en effet, abondante au cap Carmel.

Le Carmel et sa région sont aussi le lieu de nombreux épisodes bibliques, qui nous sont peu connus. Tout près de ce Mont, coulait le fleuve Qishôn célèbre par la victoire de Débora sur les Cananéens dont il avait roulé les cadavres, comme le raconte le Livre des Juges (5, 21). Débora avait été choisie comme prophétesse pour chasser les Cananéens dirigés par Sisera, qui avaient envahi le pays car le peuple élu avait recommencé à faire ce qui est mal aux yeux de Dieu. Dieu écouta leurs supplications et leur demande de pardon. Aussi Sisera fut-il tué, ainsi que toute son armée. Et Débora, appelée « mère en Israël » (ibid, verset 5) entonna ce cantique : « Du haut des cieux les étoiles ont combattu, de leurs chemins, elles ont combattu Sisera. Le torrent du Qishôn les a balayés, le torrent sacré, le torrent du Qishôn ».

Mais le peuple d’Israël, sorti d’Egypte et entré en possession de la Terre Promise est incorrigible. Il retombe sans cesse dans le péché d’idolâtrie. Ils recommencent à faire ce qui déplaît à Yahvé (Juges, chapitre 6°), et Dieu les livra pendant sept ans aux mains de Madiân « dont la main se fit lourde sur Israël (ibid, verset 2). Aussi « Madiân réduisit Israël à une grand misère, et les Israélites crièrent. vers Yahvé « (ibid. 6).

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Le peuple invoqua le Seigneur qui lui envoya un prophète, et suscita Gédéon.Madian succomba à son tour dans la même plaine où Sisara avait senti la puissance de celle qu'on appelait la Mère en Israël : contre Madian, Gédéon lui aussi n'avait marché qu'au nom de la femme terrible comme une armée rangée en bataille(Cant. VI, 9 : « Qui est celle-ci qui surgit comme l’aurore, belle comme le lune, resplendissante comme le soleil, redoutable comme des bataillons », texte repris dans la liturgie, antienne de l’Antienne Communion de la Vigile de l’Immaculée Conception, et attribué à la Sainte Vierge « terrible comme une armée rangée en bataille » : « Quae est ista quae progreditur quasi aurora consurgens, pulchra ut luna, electa ut sol, terribilis ut castrrorum acies ordinata »). Pour Gédéon, le signe avait été pour lui la toison rafraîchie par la céleste rosée dans la sécheresse de la terre entière (Juges, VI, 36-40.), texte que je tiens à citer, car il est appliqué à la Sainte Vierge : c’est l’épisode et l’épreuve de la toison (sans oublier la vision de la Femme de l’Apocalypse, revêtue du soleil, et la lune sous les pieds);

Juges, chapitre 6° :

7. 

Lorsque les Israélites eurent crié vers Yahvé à cause de Madiân,

8. 

Yahvé envoya aux Israélites un prophète qui leur dit : « Ainsi parle Yahvé, Dieu d'Israël. C'est moi qui vous ai fait monter d'Égypte, et qui vous ai fait sortir d'une maison de servitude.

9. 

Je vous ai délivrés de la main des Égyptiens et de la main de tous ceux qui vous opprimaient. Je les ai chassés devant vous, je vous ai donné leur pays,

10. 

et je vous ai dit : «Je suis Yahvé votre Dieu. Vous ne craindrez pas les dieux des Amorites dont vous habitez le pays. » Mais vous n'avez pas écouté ma voix. »

11. 

L'Ange de Yahvé vint et s'assit sous le térébinthe d'Ophra, qui appartenait à Yoash d'Abiézer. Gédéon, son fils, battait le blé dans le pressoir pour le soustraire à Madiân,

12. 

et l'Ange de Yahvé lui apparut : « Yahvé avec toi, lui dit-il, vaillant guerrier! »

13. 

Gédéon lui répondit : « Je t'en prie mon Seigneur! Si Yahvé est avec nous, d'où vient tout ce qui nous arrive ? Où sont tous ces prodiges que nous racontent nos pères quand ils disent : «Yahvé ne nous a-t-il pas fait monter d'Égypte ?» Et maintenant Yahvé nous a abandonnés, il nous a livrés au pouvoir de Madiân... »

14. 

Alors Yahvé se tourna vers lui et lui dit : « Va avec la force qui t'anime et tu sauveras Israël de la main de Madiân. N'est-ce pas moi qui t'envoie ? » -

15. 

« Pardon, mon Seigneur! lui répondit Gédéon, comment sauverais-je Israël ? Mon clan est le plus pauvre en Manassé et moi, je suis le dernier dans la maison de mon père. »

16. 

Yahvé lui répondit : « Je serai avec toi et tu battras Madiân comme si c'était un seul homme. »

17. 

Gédéon lui dit : « Si j'ai trouvé grâce à tes yeux, donne-moi un signe que c'est toi qui me parles.

33. 

Tout Madiân, Amaleq et les fils de l'Orient se réunirent et, ayant passé le Jourdain, ils vinrent camper dans la plaine de Yizréel

36. 

Gédéon dit à Dieu : « Si vraiment tu veux délivrer Israël par ma main, comme tu l'as dit,

37. 

voici que j'étends sur l'aire une toison de laine; s'il y a de la rosée seulement sur la toison et que tout le sol reste sec, alors je saurai que tu délivreras Israël par ma main, comme tu l'as dit. »

38. 

Et il en fut ainsi. Gédéon se leva le lendemain de bon matin, il pressa la toison et, de la toison, il exprima la rosée, une pleine coupe d'eau.

39. 

Gédéon dit encore à Dieu : « Ne t'irrite pas contre moi si je parle encore une fois. Permets que je fasse une dernière fois l'épreuve de la toison : qu'il n'y ait de sec que la seule toison et qu'il y ait de la rosée sur tout le sol! »

40. 

Et Dieu fit ainsi en cette nuit-là. La toison seule resta sèche et il y eut de la rosée sur tout le sol.

Saint Bonaventure, sans ses "Oeuvres spirituelles", chante et énonce les louanges de la Bienheureuse Vierge Marie en ces termes : "Marie, figurée par la toison de Gédéon".

« Vous êtes la toison que le ciel, dans sa bonté, offrit à Gédéon, toute humide et remplie d'une rosée divine; la toison qu'il pressa sous ses doigts. Les eaux dont vous fûtes arrosée sont demeurées toujours inaltérables, et vous êtes devenue la consolation de ceux que le malheur éprouve, alors que la terre entière se trouvait desséchée.

« La rosée véritable , descendue du fleuve céleste, a pénétré le manteau de votre pureté, alors que, par la faveur du Dieu suprême, vous fûtes remplie du soleil de justice; que vous êtes devenue la Mère de Dieu et de l'homme, et que la fleur de votre virginité réunit sans les altérer ses parfums à ceux de la maternité ».

« Sur la toison de Gédéon, sans aucun bruit, du ciel, la rosée tomba par l’action de Dieu (Juges 6, 36). De même, dans le sein de la Vierge, sans relation avec un homme, du ciel, le Fils de Dieu descendit selon l’antique promesse ».

Dans l’anaphore de Marie Vierge, Fille de Dieu, composée par Abba Ciriaque, Evêque de Bahnas, l’Eglise éthiopienne présente les images de Marie dans l’Ancien Testament :

« Par toi le premier né de toute la création a été renouvelé. Tu fus l'espoir d'Adam quand il fut chassé du Paradis, la piété d'Abel tuée injustement, la bonté de Seth, les bonnes oeuvres d'Enoch, l'arche de Noé qui le sauva du désastre du déluge, la bénédiction de Sem et sa part, la pérégrination d'Abraham, le parfum d’Isaac et l'échelle de Jacob, la consolation de Joseph, les tables de Moïse, la ronceraie du Sinaï, les sonnettes du vêtement du prêtre Aaron, ainsi que le bâton qui produit fleurs et fruits, la stèle du témoignage de Josué, la Toison de Gédéon, le vase d'onguent et la corne d'huile de Samuel, la verge dont Jesse se glorifiait, le chariot d'Aminadab, la cithare de David, la couronne de Salomon, le jardin fermé, la source scellée, le panier d'or d'Élie, le calice d'Elisée, la conception virginale d'Isaïe, la primogéniture sans noces d'Ezéchiel, l'émanation de la Loi à Bethléem, la terre d'Ephrata de Michée, l’arbre de vie de Silonidis, le pansement de la blessure de Nahum, la félicité de Zacharie, le temple pur de Malachie ».

« O Marie, tu es la nuée de Job, la Toison de Gédeon et la corne d'huile de Samuel, et pour toi tous les fruits de la terre répandirent un parfum suave… O Marie, calice d'intelligence de Samuel, salut de Daniel au milieu des lions, vie d'Élie ».

Mais, revenons à Gédéon. Convaincu par ces deux signes, Gédéon leva une armée. Mais le peuple était trop nombreux pour Dieu qui lui ordonna de faire un choix parmi ces 30.000 hommes. Les emmenant au bord de l'eau pour boire, il ne conserva dans ses troupes, comme Dieu le lui avait recommandé, que les hommes qui lapaient l'eau à la manière des chiens. Avec quelques hommes (300 environ) Gédéon partit à la rencontre des armées madianites.

Les armées ennemies étaient beaucoup plus nombreuses. Pour attaquer leurs camps, Gédéon divisa ses hommes en 3 équipes. Chaque homme reçut une trompette, une cruche-et une torche. Gédéon mit au point une tactique: « Quand vous arriverez près du camp, soufflez dans les trompettes, et hurlez : Pour Dieu et pour Gédéon . Ensuite, cassez vos cruches ». Les Madianites, trompés par tout ce bruit, prirent peur et s'enfuirent. La paix régna alors sur Israël tant que Gédéon vécut.

Dom Guéranger souligne le plan de Dieu sur ce Mont Carmel, en y voyant l’annonce, en ces termes, de la venue de la Mère par excellence,  : C’est « comme si cette plaine glorieuse d'Esdrelon, qui vient mourir au pied du Carmel, ne devait offrir aux horizons de ses divers sommets, aux échos de ses multiples vallées, que les prophétiques figures et les titres variés de la triomphatrice annoncée dès le premier jour du monde : non loin d'Esdrelon quelques défilés conduisent à Béthulie, terreur des Assyriens, qu'illustra Judith, la joie d'Israël et l'honneur de son peuple (Judith, XV, 10) ; tandis que dans  les  hauteurs  du septentrion se cache Nazareth, blanche cité, fleur de la Galilée (Hieron. Epist. XLVI, Paulae et Eustochii ad Marcellam) ».

Dom Guéranger déroule ainsi devant nos yeux, le plan éternel de Dieu : « Quand son amour se jouait dans l'affermissement des collines et des monts (Prov. VIII, 22-31), l'éternelle Sagesse avait en effet choisi le Carmel pour être, aux siècles des figures, l'apanage anticipé de la fille d'Eve qui briserait la tête de l'ancien ennemi. Aussi lorsque le dernier des longs millénaires de l'attente eut commencé de dérouler ses interminables anneaux, quand l'aspiration des nations (Genèse. XLIX, 10.)devenue plus instante obtint du Seigneur l'épanouissement de l'esprit prophétique dont cette époque parut marquée, ce fut au sommet de la montagne prédestinée qu'on vit le père des Prophètes venir dresser sa tente et observer l'horizon, avec le Prophète Elie

Citons ce textes en entier, car la liturgie l’a repris pour les attribuer à Marie :

Proverbes, chapitre 8°

22. 

« Yahvé m'a créée, prémices de son œuvre, avant ses œuvres les plus anciennes.

23. 

Dès l'éternité je fus établie, dès le principe, avant l'origine de la terre.

24. 

Quand les abîmes n'étaient pas, je fus enfantée, quand n'étaient pas les sources aux eaux abondantes.

25. 

Avant que fussent implantées les montagnes, avant les collines, je fus enfantée;

26. 

avant qu'il eût fait la terre et la campagne et les premiers éléments du monde.

27. 

Quand il affermit les cieux, j'étais là, quand il traça un cercle à la surface de l'abîme,

28. 

quand il condensa les nuées d'en haut, quand se gonflèrent les sources de l'abîme,

29. 

quand il assigna son terme à la mer - et les eaux n'en franchiront pas le bord -, quand il traça les fondements de la terre,

30. 

j'étais à ses côtés comme le maître d'œuvre, je faisais ses délices, jour après jour, m'ébattant tout le temps en sa présence,

31. 

m'ébattant sur la surface de sa terre et trouvant mes délices parmi les enfants des hommes.

(à suivre)


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