Magazine Peinture

Interview

Publié le 21 juillet 2010 par Ceciledmart

http://www.vivre-a-chalon.com/lire_CHALON-_-Adoptez-une-toile-de-Cecile-DM,23035d3fabb8cd30fbef5b0cf3402251455a9b56.html

Mon interview sur le site de vivre à Chalon.

par @Albert et René

                                       

Interview

Cécile Durand Mignard est une jeune artiste qui vit et travaille en Bourgogne. Elle enseigne les arts dans les quartiers depuis  plus de 15 ans. Nourrie de culture artistique contemporaine, mais aussi classique, et passionnée par les mouvements créatifs underground du Street art, du graphisme, du numérique, Cécile travaille sur toile des « mixs visuels ». Ils proposent une vision du monde, souvent noire....Mais ça n'est pas pour autant que ses toiles ne sont pas en couleur....

Cécile a eu la gentilesse de répondre aux nombreuses questions que vivre-a-chalon.com lui a posé. Interview.
Bonjour Cécile. Bien sûr, il y a eu d’abord le choc visuel dans la première rencontre avec vos œuvres et c’est lui qui pousse à explorer votre univers. Mais comme c’est un lieu commun de penser  qu’une toile ce n’est pas pour tout le monde et que ça reste très rare dans les intérieurs des gens votre principe d’adoption des toiles nous a ensuite intrigué… De quoi s’agit-il ?
Adopter une toile, c'est d'abord adopter une relation à une oeuvre unique, qui vous parle, vous interpelle, vous émeut, dans laquelle vous y retrouvez une partie de vous même, de votre histoire.
Il y a un vrai rapport affectif qui se met en place, comme quand on encadre le premier dessin de son enfant. Lorque je parle d'adoption, je pense à un engagement à faire vivre l'oeuvre et non pas comme un simple objet décoratif devant lequel on passe sans y prendre garde.
Ce que le tableau représente ? Cela dépend de celui qui le regarde. On ne choisi pas une oeuvre  originale, comme on achète un objet manufacturé, en série. Il n'y a pas de côté normatif, mais bien un engagement émotionnel.  C'est pour cela que je parle d'adoption.
Une toile n'est pas faite pour tout le monde justement  parce que ce lien si particulier se tisse mystérieusement en fonction de l'affect.

Interview

Croque La Vie - Commande verte


Vos toiles « parlent de l'Homme, de son devenir, de ses rêves, du monde actuel, entre no future et rêve d'Icare », dites-vous. Ce désespoir et cette quête folle ce sont des carburants ?

On parle communément de l'univers de l’artiste  comme s’il s’agissait à chaque fois d’un monde différent du notre.
Je travaille autour des symboles, de la spiritualité et du Chaos. Je parle du monde comme je le vois, comme une réalité déconcertante;  comme je l'aime et le déteste à la fois, beau et laid. Mes toiles sont le reflet de mon âme, de mon expérience,de mes joies et de mes douleurs, de mes forces et de mes faiblesses, de mes espérances et de mes doutes.
Bien sûr que le désespoir est un carburant puisqu'il est omniprésent dans notre société, il est l'un des liens affectifs dont je parlais précédement et dans lequel chacun d'entre nous retrouve une part de son histoire car le désespoir est devenu une réalité.
« Cette quête folle » c'est l'espoir qui subsiste ! La possibilité de vivre dans un monde meilleur.
Ce qui m'intéresse c'est de figer l'état de la société actuelle comme un portrait global et sensible, le paradoxe d'un monde à la fois sombre et en couleurs.
Amateur du lundi c’est un compliment ? Vous vivez de vos créations ?
C'est un clin d'oeil à l'expression «peintre du dimanche », puisqu'il faut dire que je suis « officiellement » artiste amateur. Je ne vis pas de mes créations, loin de là !   J'expose depuis peu de temps, et dans des lieux hors du circuit officiel, pour aller à la rencontre d'autres publics que les amateurs d'art. Mais c'est difficile d'être à la fois producteur, et distributeur. De plus mon énergie est souvent totalement absorbée par mon métier de professeur...La peinture devient alors un exutoire.
Être artiste professionnel, ça veut dire quoi ? Que j'ai tout le temps des images, des sensations dans la tête, l'envie de créer ? Ou que je vis de mon art ? Entre les deux donc, j'ai choisi le lundi. Parce que le lundi c'est le 1er jour de la semaine.
Votre univers est noir, désenchanté et flirte avec la violence sans la faire exploser. Le sentez-vous évoluer et comment ?
Mon univers est fortement lié à mes ressentis. Je trouve le monde noir, les gens désenchantés, il ne s'agit plus d'un flirt, la violence est consommée !  Pour ma part j'ai peu de foi en l'humanité, ou en la bonté de la nature humaine. Ma vision évolue en fonction des aléas du monde, de ma sensibilité, ou du message que je veux faire passer.
L'expression artistique est un moyen de recherche de perfection et de spiritualité, qui ne fait de mal à personne et qui grandit celui qui le fait et celui qui le regarde. Cela me pousse à continuer.
Je pense donc avec beaucoup  de couleurs. Alors noir... ou pas si noir que ça ?

Cop  Trust

Grace à Facebook notamment on peut découvrir à la fois vos créations mais aussi l’atelier… Comment travaillez-vous aujourd’hui avec internet ? Pourrions nous oser dire que les échanges – vous avez de nombreux admirateurs en ligne – vous servent aussi de matière première, de nourriture pour votre imagination ? Cela change t’il votre regard ou le conforte t’il ?

J'ai toujours peint pour mon entourage proche, mes amis, d'abord, comme un besoin, égoïste et personnel d'exprimer mes émotions autrement qu'avec des mots.
Depuis mes premières expositions, le regard sur mon travail est devenu important. J'utilise surtout mon blog comme une vitrine virtuelle.
Mais l'internet dématérialise beaucoup mes toiles. En effet, une photographie ne remplace pas l'objet lui-même.
Je ne sais pas si mes échanges me confortent, mais ils m'ont certainement donné envie de continuer mon travail et permis quelques rencontres avec des personnes à qui mes peintures parlent. C'est dingue à quel point on est à l'image de ce que l'ont fait.
Quant à mon atelier, c'est mon salon, au grand damn de mon vieux parquet en chêne....

Une série actuelle porte le nom de “2010 The Sexy Wars Project-Work in progress ». Une arme rend-elle sexy une femme aujourd’hui comme elle le faisait dans l’imaginaire masculin des années 50 ?

Je prépare une exposition en Janvier 2011 au réservoir à St Marcel avec l'amie et photographe talentueuse Ingrid Delberghe dont le travail est très poétique.
Sexy wars, c'est à la fois un jeu de mots sur deux visions féminines qui s'opposent et se rejoignent pour cette expo, et le thème actuel des « sexy girls » armées. Je trouve qu'on voit encore de nos jours  la femme comme objet sexuel soit dominatrice soit soumise.
A mon sens  l'image de la femme dans les années 50 était surtout celle d'une bonne mère au foyer, plutôt armée d'un aspirateur que d'une kalachnikov.  Aujourdhui, la grande majorité des mannequins sont photographiés par des hommes qui appliquent leur vision, souvent machiste, sur les postures désirées  parce que cela fait vendre. Je peins donc des stéréotypes !
Parce que les armes sont associées à la guerre et que ce sont plutôt les hommes qui font la guerre. Oui, une femme armée reste un stéréotype ultra sexy de nos jours.

Sexy Wars N°9

Le Street Art vous a beaucoup influencé ? En quoi ?
Comme son nom l'indique, l'art de rue se fait dans la rue. Moi je ne peins pas pour l'extérieur. Mais j'ai déjà investi les murs d'intérieurs.  J'utilise essentiellement les outils des street artistes, et un peu la technique du pochoir, mais le street art ne l'a pas inventé. Le pochoir existe depuis la préhistoire !
L 'art en général m'influence. Mes toiles sont plutôt hybrides, on y trouve des références à la BD, l'art, la pub, le graffiti, la calligraphie, l'expressionnisme, le pop art, le street art, l'art abstrait...
J'aime quand on vient jouer avec la rue, in situ, pour y apporter un peu d'humour ou de gaité et le côté subversif du monde du grafiti. D'ailleurs à ce propos, même s'il n'est pas toujours d'extrême qualité, cela m'a toujours amusé de voir comme nos villes sont grises et préfèrent le rester. Le béton, le mobilier urbain.... Et de voir comme la lutte contre les couleurs est une préoccupation des municipalités....

En quoi la musique est-elle, semble t’il, aussi, importante ? Vous écoutez quoi ?
Je suis fille de musicien, entourée de musiciens, j'ai donc été bercée dans la musique, et   après des années de conservatoire, je mixe un peu, lors de sets privés. Je me suis même essayée à la composition, mais j'ai lâché prise faute de temps !  Il faut savoir faire des choix ! J'écoute de tout,  quoiqu' essentiellement de la musique black, funk, house, tribal,  electro, des percussions...
Quels sont les artistes –toutes disciplines confonds - qui vous influencent, que vous admirez  ou respectez ?
La liste serait longue ! Les figures du pop art bien sur, Wharol, Basquiat. Mais aussi ceux de l'expressionnisme abstrait comme  Robert Rauschenberg et les peintres de la matière comme Tapiès restent mes préférés. J'aime aussi beaucoup les artistes street comme Bansky, et ceux du pop surréalisme comme Jeff Soto.

Interview

Sexy Wars N°1 Hors Série


Moisissures, traces, taches, maturation, textures, matières figurent parmi vos matériaux. Il y a quelque chose de terriblement organique dans vos peintures. Un désir d’affirmer la nature et la saleté ou le désordre qui lui sont aussi inhérents. Punk ? Fini les gentils posters aseptisés et place à la réalité ? Je m’égare ?
Pas du tout, c'est un peu ça.  A l'ère du numérique, tout est dématérialisé, reproductible. Les tâches, les ratures, les erreurs, les tremblements, c'est ce qu'il reste d'humain.
Les mots, l'écriture ont toujours eu une place importante dans mon travail. Je les vois aussi comme des éléments graphiques. Les lettres sont avant tout des signes, des dessins.
Et les tâches, les coulures, des murs sales, une matière vivante en quelque sorte.


Quels sont les matériaux de prédilection avec lesquels vous aimez travailler ?
Je suis sans cesse à la recherche de nouvelles techniques pour produire les effets désirés. Actuellement, j'utilise de la peinture aérosol et des encres utilisées par les artistes du monde du graffiti. Je suis revenue au pinceau depuis peu, mais je continue à travailler aussi le pochoir, les tampons, les marqueurs... Je travaille sur toile parce que c'est pratique, mais j'ai bien envie de changer de support, sur des vieux panneaux par exemple, qui auraient un vécu, une âme...

Sortilège


En quoi le numérique a-t-il révolutionné votre façon de travailler voire d’appréhender la notion de création !

Je suis fascinée par l'ère numérique surtout du point de vue de l'accés qu'il donne au plus grand nombre de créer des images. De ce point de vue, ce qui m'interpelle le plus est la vidéo et la photographie numérique (sans parler de la révolution technique du point de vue musical).
Mais le numérique c'est aussi une dématérialisation des images. Il ne peut se substituer à la matérialité de la peinture. Je me sers de l'informatique uniquement donc pour  photographier, préparer ou créer mes images, mes pochoirs. C'est un outil, pas une finalité. J'ai aussi quelques projets plus « numériques », comme des clips de vidéo-peinture, ou des photographies peintes...


Vous enseignez ? Pour quels publics ? Quel regard portez-vous sur la culture « multimédia » de ces  jeunes ?
Je suis professeur d'arts plastiques dans des collèges, et j'ai souvent à faire à des publics défavorisés dont la seule connaissance multimédia est celle des messageries instantanées.  L'accessibilité au matériel reste difficile, coûteuse et la mise en place de séquences de travail utilisant l'outil informatique compliquées , bien que j'ai eu parfois de bonnes surprises. La place de l'enseignement culturel à l'école est toujours une lutte de chaque instant qui je l'avoue est épuisante. C'est dommage, car il me semble que les générations futures ne devront pas manquer de créativité pour faire face aux grands défis de l'avenir.


Où peut-on découvrir votre travail ?
Rendez vous en Janvier Février 2011 à « l'Arrosoir » à St Marcel ! Le vernissage aura lieu le 13 Janvier !
J'ai également un projet d'exposition à Lux, en Juillet 2011, avec le concours de « Arts matures ». Mais je suis ouverte à toute proposition d'exposition, ou de rencontre. Il suffit de me contacter, je travaille à Chalon-sur-Saône. Mon blog http://ceciledm.canalblog.com regroupe toutes les informations en temps réel.

Divine Comédie


Votre fou-rêve – comme on dirait fou-rire - le plus avouable ?
J'ai encore beaucoup de travail, de projets, de rêves. Ma peinture est en constante évolution. J'aimerai voyager d'avantage, nourrir mon disque dur de photographies pour une série « carnet de voyages »,  travailler à l'édition de livres, à des collaborations artistiques, continuer de rester curieuse, expérimenter d'autres techniques, plus couteuses, comme la sérigraphie, ou les photographies peintes sur de grands formats.
Avoir un atelier en fait partie mais il faut bien l'avouer, au final, et sans rire, j'aimerai ne plus être enseignante et ne vivre que pour et par ma peinture !

Trois toiles commentées par Cécile DM

Icarus, Sueno, une peinture de 2009. Le rêve d'Icare, ou le désir de l'Homme d'aller toujours plus loin, au risque de devoir se retrouver face à face avec sa condition de simple être humain. Une commande d'amis, un grand format (160 par 120 cm). J'aime beaucoup travailler sur de grandes toiles. Je suis partie de cette idée d'homme-oiseau pour illustrer ce paradoxe.

Interview


"Start Up"
Peintures synthétiques et encres sur toile chassis coton
50X50
Start up est dans une collection privée. C'est un peu l'avenir, la génération future, la start up, ou quand l'Afrique se réveillera.


Sexy Wars N°1
"Brooklyn Battery"

160 X 180
La première toile de la série Sexy wars, femmes armées. C'est à la fois un carnet de voyage et un concentré de l'esprit de mon travail actuel. Je suis partie d'une photographie d'un taxi que j'ai prise à New-york en 2009.

Interview


Retour à La Une de Logo Paperblog

Magazines