Triplement présent au festival, en tant que membre du jury et réalisateur, Lionel Baier est un fan de la manifestation.
Lionel Baier met la dernière main, ces jours, à un nouveau long métrage de fiction entièrement réalisé avec son téléphone portable, intitulé Low Cost (Claude Jutra) et qui sera présenté hors concours à Locarno. De fait, sa qualité de membre du jury de la compétition internationale l’empêche d’y participer. En revanche, l’un de ses documentaires, La Parade, y sera également présenté. Belle présence, et reconnaissance, pour l’un des cinéastes les plus originaux de la relève suisse – dont on peut rappeler qu’il a signé les très remarqués Garçon stupide et Un autre homme, doublé d’un prof de cinéma apprécié de l’Ecal.
- Que représente Locarno pour vous ?
- C’est une histoire personnelle très forte, étroitement liée à ma passion pour le cinéma. J’ai découvert Locarno à 15 ans, avec mes parents qui y avaient fait escale sur la route de l’Italie où nous devions passer nos vacances. Or, après avoir vu La belle noiseuse de Rivette sur la Piazza Grande, le climat du festival nous a tellement enchantés que mes parents ont décidé d’y rester jusqu’à la fin. Par la suite, j’y suis revenu chaque annéeavec des amis. Locarno m’a donné un socle cinéphilique très important. En fait, c’est une école incomparable, et j’y enbvoie aujourd’hui nos étudiants de l’ECAL. Comme j’avais déjà commencé à faire du cinéma dans mon coin, j’y ai aussi trouvé une stimulation faite de rencontres et de discussions passionnantes. J’ai eu l’occasion, ces dernières années, de visiter des quantités de festivals. Mais Locarno me semble le plus beau !
- Que sera votre nouveau film ?
- Comme il m’a appelé à faire partie du jury, Olivier Père m’a proposé de montrer un de mes films dans la section réservée aux jurés. J’ai préféré en faire un nouveau en développant un travail, avec mon téléphone portable, que j’avais amorcé depuis quelque temps déjà. C’est une technique qui m’intéresse parce que tout le monde la pratique désormais tous les jours. Or je voulais aller au bout d’une mise en forme représentant, aussi, le degré zéro, ou presque, de l’investissement financier. Son titre est d’ailleurs Low Cost (Claude Jutra)…
- Quel en est le thème ?
- C’est l’histoire d’un certain David Miller, dont je précise qu’il n’a rien à voir ave moi, qui sait qu’il va mourir et qui fait une sorte de bilan de sa vie avec divers personnages de sa connaissance. Le film est une interrogation sur le prix de la vie, au sens fort, à une époque où tout a été « low costisé », si j’ose dire, à savoir amené à prix réduit. Imaginez ce qu’était le prix d’un voyage à l’époque de Stendhal, et ce qu’il est aujourd’hui. Dans la même optique, David Miller s’interroge sur le « prix » de ce qu’il a vécu…
- Expérience concluante ?
- Autant que je puisse en juger, c’est un drôle d’objet, plutôt inclassable, que ce film, mais le mérite du Festival de Locarno est justement d’accueillir ce genre de réalisations…
- Un conseil aux festivaliers ?
- Comme à mes étudiants de l’Ecal : Lubitsch ! Auquel je suis venu par Truffaut. Un maître absolu en matière de mise en scène et plus encore de découpage. Une façon de faire durer un plan un poil de plus qu’attendu, inimitable. Et cet humour incroyable, plus fort que Chaplin, notamment dans To be or not to be, si l’on pense à sa destinée de juif fuyant les nazis. Et à ne pas manquer non plus : ses films muets. Sur quoi je me tais…