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L’Esprit au cœur de Dieu… Méditation de Joseph Moingt

Publié le 13 août 2010 par Perceval

Je vous présente ci-dessous des ' notes ' de lecture de textes de Joseph Moingt ...

« On se contenterait assez facilement d’une Trinité à deux personnes la troisième, on ne sait trop qu’en dire, ni surtout qu’en faire… »

icone trinite

« L’Eglise n’a pas « inventé » l’Esprit Saint dans un grand délire métaphysique, elle l’a reçu — on peut même dire qu’elle l’a « subi » —, à telle enseigne qu’elle ne pourra jamais plus s’en séparer : elle en était née. »

« Dans ce mystère d’intercommunication se dévoile la singularité de la « troisième Personne », Don de Dieu, non simplement chose donnée, mais acte et relation vivante de Donation de soi. »

« L’Esprit ne prend pas place à la suite des deux, mais entre eux, en excès : il est ce qui surabonde et déborde. »

« Celui qui complète la Trinité », disaient les Pères — comprenons : celui qui l’empêche de se réduire à l’Un, car il est de trop, et de s’enfermer dans la solitude, car il est l’excès qui l’ouvre sur un monde pour y déverser son trop-plein.

« Longtemps la présence de l’Esprit a paru réservée à l’Eglise catholique, et sa jouissance aux personnes « consacrées » à son service ou à un « état de sainteté 2 ». (2. Tel est encore l’enseignement de l’encyclique de Pie XII sur « Le corps mystique du Christ » (1943)).

Vatican II a changé de discours : il a proclamé que tous les baptisés sans exception participent de la surabondance du don de l’Esprit, et il en a tiré la double conséquence que les fidèles sont tous appelés en toute égalité à la même sainteté, et que les Eglises qui baptisent dans la même foi constituent pareillement (sinon tout à fait au même degré) le corps indivisible du Christ.

Pierre et paul

Le rapprochement avec les autres religions du monde inauguré par le Concile a aussi répandu l’idée que l’Esprit est au travail dans les diverses traditions sacrées des peuples pour y révéler Dieu et y opérer le salut. »

« L’Eglise, est « corps du Christ » en tant que ses membres sont unis au Christ par son Esprit et que le Père déverse en eux, pour en faire d’autres fils, la vie qu’il communique à son Unique.

Esprit de communion, il fait communiquer les chrétiens à la fois entre eux et avec le Père par le Fils ; il demeure dans l’Eglise en faisant d’elle la « demeure » historique de la Trinité : il est le troisième anneau qui élargit au multiple l’unité du Père et du Fils, du Même et de l’Autre.

Que l’Esprit soit ici ne l’empêche pas d’être aussi là, à côté et au loin, quoique sous un mode différent, car il est toujours en excès et ne se laisse posséder ni enfermer nulle part, et il ne se tient dans un lieu que pour s’en aller ailleurs, mais sans se retirer d’où il vient. »

L’Esprit fait parler, mais ne prend pas la parole 6 (6. Voir : Matthieu 10,20 ; Actes 2,4 ; 19,6 ; 2 Pierre 1,21). Il ne faut donc pas se laisser abuser par de très rares paroles prononcées par des prophètes et attribuées à l’Esprit, du type Actes 13,2.

Il n’est pas censé parler de son propre chef. Nous en étonnerons- nous ? Il est l’Esprit du Christ, et c’est à ce titre qu’il conduit son Eglise « vers la vérité totale 7 ( 7. Voir : Jean 14,26 ; 15,26- 27 ; 16,12-13.)

Il introduit dans leur intimité en s’effaçant, tel « l’ami de l’époux », si ce n’est qu’il demeure là sous le mode d’être le lien vivant qui nous unit à eux8. (8. Voir : Jean 14,15 ; 3,8 ;2 Corinthiens 3,17 ; Actes11,15 ; Jean 3,29 ; Ephésiens4,3-6.)

qu’il nous fait être, enfants du Père, d’exhaler dans les cœurs des soupirs d’espérance, d’inspirer nos prières, d’insuffler des désirs accordés à ceux du Père 10. Il est l’appel silencieux mais ardent de l’être nouveau qu’il fait naître en nous, la voix qui inscrit dans la chair et fait monter de ses profondeurs insoupçonnées le nom du Père 11, voix de l’Autre qui révèle l’inconnu de notre être le plus intime, ce « Il » qu’est devenu notre esprit pénétré d’Esprit. (10. Romains 8, 16, 23, 26-27.) (11. Voir : Jean 3,6 ; 2 Corinthiens3,3 ; Romains 8,14-15. )»

« L’Esprit en nous : ces témoignages de foi que nous n’aurions pas osé donner auparavant, la persévérance dans une prière jamais consolée, ce dévouement prodigué à une personne que nous ne pouvions pas supporter, la constance dans une foi troublée de tant de doutes, la patience dans une souffrance qui nous a si longtemps révoltés, l’« ouverture » d’une Ecriture qui nous était fermée, le plaisir pris dans une compagnie qui nous laissait indifférents, tout ce que nous n’étions pas et que nous sommes devenus capables de dire et de faire, ces manières inhabituelles de sentir et de vivre, tout ce en quoi nous avons été changés et déplacés, cette nouveauté qui est en nous sans pouvoir en venir, voilà l’œuvre de l’Esprit.

L’étonnement que nous en éprouvons, le sentiment d’être livrés à l’Hôte étranger en même temps que donnés à nous-mêmes, voilà le critère de sa présence, auquel s’ajoute l’attestation que l’Esprit rend à notre esprit, ces fruits de l’Esprit que sont la paix, la joie, l’amour et, par-dessus tout, la conscience d’avoir accédé à l’ordre de la gratuité et de l’excès, de la liberté et de la nouveauté de vie 14. (14. Voir : Romains 8,16 ;Galates 5,22 ; Luc 6,38 ;Romains 6,4.)

Un autre critère de l’action de l’Esprit, autre forme de son « attestation », est fourni par le

Hildegard von Bingen Liber Divinorum Operum
testament de Jésus, la prière qu’il adressait au Père pour que ses disciples, après son départ, restent unis entre eux : « Que tous soient un comme nous sommes un, toi en moi et moi en toi, et eux aussi en nous15. » Lien d’unité de la Trinité 16 (16. Une ancienne formule liturgique rendait « gloire au Père et au Fils dansl’unité de l’Esprit Saint ».), de même qu’il l’est du corps du Christ qui est l’Eglise 17 ( 17. Voir : 1 Corinthiens 12,1-13 ; Ephésiens 4,3-4 ; Colossiens 3,12-16.) , c’est l’Esprit Saint qui forme le nous commun du Père et du Fils, et le nous des chrétiens sur ce modèle, et qui insère le second dans le premier. Le nous divin, qui maintient la distinction de « toi et moi », n’est pas fusion mais coexistence du Père et du Fils l’un dans l’autre. Le nous le plus naturel aux hommes n’est pas non plus l’élimination du moi, il est son extension à d’autres, mais au point qu’un moi envahissant risque d’accaparer ceux auxquels il s’associe, et un nous exclusif de devenir l’expression d’une volonté de puissance opposée à d’autres nous 18 (18. Le nous est un je amplifié et dilué, dit le linguiste Emile Benveniste. ) . Le nous chrétien que forme l’Esprit requiert, lui aussi, l’entière et forte implication du je, mais dans la désappropriation du moi, l’engagement du je à laisser croître d’autres je, à se mettre à leur service19 (19. A les « sup-porter », c’est-à-dire à « se mettre au-dessous » d’eux : Ephésiens 4,2 ; Colossiens 3,13 ) , le dessaisissement de soi sous l’anonymat d’un je qui, dissimulé dans un pluriel, se laisse dire par d’autres à la façon d’un il. Tel est le nous que la récitation quotidienne du « Notre Père » devrait aider les chrétiens à former, entre eux et avec d’autres, non seulement dans l’universalité de l’Eglise, mais également et beaucoup plus dans toutes relations interpersonnelles, communautaires ou sociales. S’habituer à glisser le je dans un tel nous, à la fois en excès et en retrait, non toi comme moi, mais moi comme toi, c’est le signe qu’une « Troisième personne » s’y est logée.


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