Physionomie des ténèbres
Je n'ai jamais habité l'Eden. Mon gîte demeure à peine au-delà du brouillard. Là où la joie s'inspire et pioche dans la promesse d'un paradis les notes de sa musique.Chaque matin, les pieds trempés par la rosée et le nez respirant les frais parfums de la nuit délaissée, je me promène dans ce pays d'abandon. La tête pleine de rêveries, je vais jusqu'au lac paisible, franchir l'eau et je rentre le regard fou.La nuit ici est constante et fragile. Il arrive très souvent qu'en pleine nuit, réveillé par un bruit provenant de quelque bête de passage ou par une nature libre, je sorte devant la maison, une lanterne à la main.Je n'y vois rien bien sûr et je songe qu'en cet état la lune me regarde également comme un astre transparent.Ma femme s'enfuit toujours.Je retrouve, à toute heure de la journée, sa silhouette errante dans la neige alentour. Parfois, je suis ses petits pas dans la splendeur de l'hiver jusque dans la profondeur de la nuit. En y repensant au coucher, je vois ça comme un chef-doeuvre et je n'envie jamais les petites scènes de famille que connaissent ailleurs d'autres hommes.Pour oublier ces absences, je lis l'après-midi à la fenêtre ou à la mélodie du lieu qui s'apprécie au balcon du logis. Si j'y reste cependant trop de temps, mes pensées s'éloignent et s'égarent, me présentant l'illusion sinistre d'un paradis en feu. Ce n'est que par une sorte de réflexe soudain, écho de mon bonheur passé, que je suis sauvé de ce cauchemar. De très mauvaises pensées qui me forceront un jour à décrocher le vieux fusil du salon.Related articles by Zemanta
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