Partir. Pour oublier. Déplacer son corps pour aérer son esprit. Décrocher. Sinon, c’est trop. On s’imagine qu’il n’y a que son petit univers de x mètres carrés. Et on se noie dedans.
Je suis donc partie trois jours au bord du fleuve, au bord des îles de Sorel, au pays du Survenant, au Chenal du moine. Voir les bateaux, les kayaks, sentir l’eau, voir le héron attraper le raz musqué, voir le balbuzard chercher le mulot, faire une croisière, me faire raconter les ruisseaux, les rivières, le lac Saint-Pierre et le fleuve Saint-Laurent. Être là, nulle part ailleurs.
Assise sur un banc, en face d’un petit chenal trop bas pour qu’un bateau s’y promène dans cette eau pourtant capable d’inondation certaines années, j’ai lu un livre écrit par Germaine Guèvremont en 1942, Le Survenant. Comme on déguste des bleuets au Saguenay, comme on boit un vin dans son pays d’origine.
Et on se dit qu’il y avait beaucoup moins d’écrivains québécois (ou canadiens-français comme on disait à l’époque), plus de chances d’être publié? Si peu de livres que plus de chance de remporter un prix? Qu’ai-je à apprendre de cette auteure qui a si peu publié?
Et quand on revient, on a un courriel qui vous dit qu’un éditeur est intéressé à votre manuscrit.
(photo: ce qu'il reste du chalet de Germaine Guèvremont sur l'îlette de Pé, Sainte-Anne-de-Sorel, photo Claude Lamarche)