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Les premiers chrétiens : qui étaient-ils ?

Publié le 25 août 2010 par Hermas

1. Ils font partie du monde dans lequel ils vivent


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Les premiers chrétiens se considéraient comme une partie constitutive du monde dans lequel ils vivaient : « Ce que l’âme est au corps, les chrétiens le sont au monde » (1).


Ils ne se distinguaient de leurs contemporains, ni par le vêtement, ni par des signes distinctifs, ni par une citoyenneté différente.


Chacun d’eux occupait sa place dans la structure sociale de son temps, la même qu’il avait avant sa conversion. S’il était esclave, il ne changeait pas de condition en devenant chrétien, alors pourtant que sa vie s’élevait à une dimension surnaturelle. Cette attitude chrétienne permettait une grande ouverture pour assimiler les valeurs positives qui existaient dans le paganisme. Ainsi, saint Justin disait des penseurs païens, que « tout ce qu'ils ont enseigné de bon nous appartient, à nous chrétiens » (2).


2. La vie qu’ils mènent n’a rien d’étrange


« Les chrétiens ne se distinguent des autres hommes ni par le pays, ni par le langage, ni par le vêtement. Ils n’habitent pas de villes qui leur soient propres, ils ne se servent pas de quelque dialecte extraordinaire, leur genre de vie n’a rien de singulier. Ce n'est pas à l’imagination ou aux rêveries d’esprits agités que leur doctrine doit sa découverte ; ils ne se font pas, comme tant d’autres, les champions d’une doctrine humaine. Ils se répartissent dans les cités grecques et barbares suivant le lot échu à chacun ; ils se conforment aux usages locaux pour les vêtements, la nourriture et la manière de vivre, tout en manifestant les lois extraordinaires et vraiment paradoxales de leur république spirituelle. Ils résident chacun dans sa propre patrie, mais comme des étrangers domiciliés. Ils s'acquittent de tous leurs devoirs de citoyens et supportent toutes les charges comme des étrangers » (3).


3. Ils respectent les lois


« Pour moi, je n’adore pas l’Empereur, je me contente de l’honorer et de prier pour lui ; mais j’adore le Dieu véritable, l’être par excellence, parce que je sais que c’est lui qui fait les rois. Pourquoi donc, allez-vous me dire, n’adorez-vous pas l’empereur ? Parce qu’il n’a pas été fait pour être adoré, mais seulement honoré comme il convient. Ce n’est point un dieu, c’est un homme établi par Dieu pour juger avec équité et non pour recevoir des adorations. Il est en quelque sorte le délégué de Dieu : lui-même ne souffre pas que ses ministres prennent le nom d’empereur, car c’est son nom et il n’est permis à personne de le prendre.  Ainsi Dieu veut être seul adoré. (...) Honorez donc l'empereur, mais honorez-le en l'aimant, en lui obéissant et en priant pour lui ;si vous le faites, vous accomplirez la volonté de Dieu, manifestée dans ces paroles : “Mon fils, honore Dieu et le roi, et ne leur désobéis jamais ; car ils se vengeront aussitôt de leurs ennemi” » (4).


4. Ils vivent honnêtement


« Nous sommes accusés d'une autre injustice encore : on dit que nous sommes aussi des gens inutiles aux affaires. Comment pourrions-nous l'être, nous qui vivons avec vous, qui avons la même nourriture, le même vêtement, le même genre de vie que vous, qui sommes soumis aux mêmes nécessités de l'existence? Car nous ne sommes ni des brahmanes, ni des gymnosophistes de l'Inde, habitants des forêts et exilés de la société. Nous nous souvenons que nous devons de la reconnaissance à Dieu, notre Seigneur et notre Créateur : nous ne repoussons aucun fruit de ses œuvres. Seulement nous nous gardons d'en user avec excès ou de travers. C'est pourquoi, nous habitons avec vous en ce monde, sans laisser de fréquenter votre forum, votre marché, vos bains, vos boutiques, vos magasins, vos hôtelleries, vos foires et les autres lieux où se traitent les affaires. Avec vous encore, nous naviguons, nous servons comme soldats, nous travaillons la terre, enfin nous faisons le commerce; nous échangeons avec vous le produit de nos arts et de notre travail. Comment pouvons-nous paraître inutiles à vos affaires, puisque nous vivons avec vous et de vous ? (...) Cependant j'avouerai qu'il existe peut-être des gens qui peuvent, avec raison, se plaindre de l'inutilité des chrétiens et je dirai quels sont ces gens. En premier lieu, ce sont les entremetteurs, les suborneurs, les souteneurs, puis les assassins, les empoisonneurs, les magiciens et aussi les haruspices, les diseurs de bonne aventure, les astrologues. Ne rien faire gagner à ces gens-là est un gain immense!  (...) Nous prenons à témoin vos propres registres, vous qui, chaque jour, présidez au jugement de tant de prisonniers, vous qui terminez par vos arrêts de condamnation tant de procès! Innombrables sont les criminels qui défilent devant vous, sous les chefs d'accusation les plus variés : or, sur vos listes, quel est l'assassin, quel est le coupeur de bourses, quel est le sacrilège ou le suborneur ou le voleur de bains, qui soit en même temps chrétien? Ou bien, parmi ceux qui vous sont déférés sous l'accusation d'être chrétiens, qui donc ressemble à ces criminels ? C'est des vôtres que toujours les prisons regorgent; c'est des gémissements des vôtres que toujours les mines retentissent; c'est des vôtres que toujours les bêtes du cirque sont engraissées; c'est parmi les vôtres que les organisateurs de spectacles recrutent les troupeaux de criminels qu'ils nourrissent! Aucun chrétien ne se trouve là, à moins qu'il ne soit que chrétien; ou bien, s'il est coupable d'un autre crime, il n'est plus chrétien. » (5).

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(1) Auteur inconnu, Lettre à Diognète [fin du IIème s.], trad. H.I. Marrou, in Les Pères apostoliques, Ed. du Cerf, 2001, p. 491.

(2) Saint Justin, Apologie 2, XIII, 4, Traduction L. Pautigny, Ed. A. Picard, Paris 1904.

(3) Lettre à Diognète, Op. cit., p. 490.

(4) Saint Théophile d’Antioche [IIème s.], A Autolyque, Livre I, n°XI, trad. de l’abbé M. de Genoude, 1838.

(5) Tertullien [IIIème s.], L’apologétique, trad. J. P. Waltzing, chap. 42-44.


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