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Publié le 26 août 2010 par Saucrates

Réflexion six (26 août 2010)
Retour à l'économie et à la critique économique ...

Il me semble désormais nécessaire d'en revenir aux sciences économiques en laissant tomber les polémiques de l'actualité politique, pour un temps. Retour donc aux concepts économiques ! L'économie est devenue une science à partir du moment où elle a abandonné les sciences humaines pour fonder sa théorie sur les concepts de la rationalité parfaite des agents économiques, qu'ils soient consommateurs ou producteurs, et de leurs actes, et sur la mathématisation des relations économiques.
La transformation de sciences molles en sciences dures est une tendance qui a touché toutes les sciences humaines et sociales. De la philosophie à partir de l'époque de Emmanuel Kant jusqu'à l'anthropologie à l'époque de Claude Levi-Strauss (et sa théorie de l'anthropologie structurale). L'objectif poursuivi : apporter une justification basée sur la rigueur mathématique à un corpus théorique riche mais foisonnant d'explications possibles et de théories opposées. Cette idée que la froideur du raisonnement mathématique permettrait de classer et séparer le bon grain de l'ivraie. Mais ne pas voir l'apauvrissement extrême que cette mathématisation entraîne sur une théorie, sur les explications possibles des phénomènes observés, l'apauvrissement extrême des explications elles-mêmes.
Le concept même de la rationalité des agents économiques est un concept repris à la philosophie allemande, à Kant et à Weber. Il ne faut pas oublier qu'au dix-neuvième siècle, jusqu'à Marx mais également Ricardo, la théorie économique ne repose pas sur ce concept de rationalité des agents économiques, mais sur la théorie de la valeur travail comme fondement de la valeur, à la base de la pensée économique. Le concept de la micro-économie, de la mathématisation des relations économiques (la révolution marginaliste) , nécessitant l'hypothèse que les actes des agents économiques sont parfaitement prévisibles et logiques, répétitifs, n'apparaît qu'à partir du milieu du dix-neuvième siècle et ne l'emportera définitivement qu'à la charnière avec le vingtième siècle, avec les travaux de l'anglais William Stanley Jevons, du français Léon Walras, de l'autrichien Karl Menger et de l'italien Vilfredo Pareto.
Sans rationalité des agents économiques, il ne peut y avoir de sciences économiques telle que l'on l'entend aujourd'hui. Evidemment, ce concept de rationalité parfaite des agents a été revisitée régulièrement depuis l'école marginaliste, et modifiée pour intégrer les théories du jeu et autres variations, permettant de prouver que même si individuellement, les comportements des acteurs pris individuellement ne paraissent pas rationels, ils obéissent néanmoins à des modèles comportementaux modélisables, prévisibles et agrégeables.
Néanmoins, le concept même de comportement rationnel en économie me heurte, car au fond, on peut faire dire tout et son contraire au concept de rationalité, jusqu'à son contraire : l'irrationalité, comme les comportements observés en matière financière nous le prouvent ... Même si l'irrationalité peut être modélisée bien rationnellement, l'idée même que l'on puisse modéliser mathématiquement mes comportements et ceux d'une foule, d'une population, me heurte profondément.
Saucratès
Note précédente :
http://saucrates.blogs.nouvelobs.com/archive/2008/11/23/critiques-de-l-economie-prolegomenes.html