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Où je deviens chroniqueuse de théâtre : The Breast of Tiresias

Publié le 01 septembre 2010 par Cccil
Où je deviens chroniqueuse de théâtre : The Breast of TiresiasLe hasard fait parfois bien les choses. Très bien même.
Certains croient que c'est une force cosmique qui nous pousse à nous trouver au bon moment, au bon endroit, avec les bonnes personnes. D'autres invoquent plutôt la coïncidence.
Toujours est-il qu'il y a quelques semaines de ça, je me retrouvais, par le biais d'un ami, à un déjeuner (les fameuses pâtes vivantes). Mon voisin de gauche étant une fenêtre, mon voisin de droite le dit ami que je connais bien, je me mis donc à parler à la personne qui me faisait face. Comme quoi, il vaut mieux être un animal social parfois. Ca aide.
Hors cette personne se met à me parler de théâtre.
Le théâtre pour moi, c'est un peu comme pour Obélix avec sa marmite de potion magique (vous apprécierez la comparaison), je suis un peu tombée dedans quand j'étais petite. De pièces de fin d'année en troupes étudiantes, puis amateurs, j'ai trainé mes guêtres sur les planches presque 10 ans, avant qu'un séjour de deux ans à l'étranger puis mon arrivée à Paris ne ferme le rideau. Pourtant j'ai essayé, je vous le promets, le théâtre avant-gardiste en catalan... mais l'obsession glauque du metteur en scène pour les improvisations de scènes de viol, m'a fait claquer la porte assez rapidement.
C'est donc en spectatrice que j'ai continué à profiter des délices du théâtre, et il faut dire qu'en la matière Paris est une mine d'or. Une mine d'or qui peut vite se mettre à ressembler à un étalage remplit de pâtisseries alors qu’on est diabétique, car malheureusement c'est un divertissement plutôt onéreux. Comme la plupart des choses à Paris…Si on ne cherche pas plus loin que le bout de son nez, car avec quelques infos et une grande curiosité, on peut aller au théâtre à Paris presque tout les jours pour pas trop cher.
Mais c'est une autre question.
Me voilà donc, à table, en plein discussion théâtrale avec mon voisin. Qui se trouve être auteur. Qui se trouve être comédien, producteur, programmateur et… chroniqueur.
Ah… écrire pour le théâtre… comme ça doit être jouissif de concilier ces deux passions…
Et pourquoi pas ?
Pourquoi pas …
Il y a des mots comme cela, que la vie se charge de nous fait reconnaître, apprécier, saisir en plein vol. Des « peut être », des « il faudrait », des expressions de l’instant, qu’on capture au passage, sans penser, sans comprendre. On verra plus tard les tenants et les aboutissants. On verra plus tard si on va au devant d’un mortel ennui, d’une erreur, d’une folie… d’une chance ? On ne sait pas. On ne saura jamais. Pas avant d’avoir tenté.
Je parle de mon blog, de mon envie. Il me dit que le magasine cherche des chroniqueurs justement. Il a l’air intéressé par ce que je lui dis. Il va me lire. En parler à sa rédactrice en chef.
Et c’est ce qu’il fait.
Le bon endroit, au bon moment, en face de la bonne personne.
Elle me contacte. On discute. Ca le fait. Elle veut voir de quoi je suis capable. Me propose quelques pièces pour un essai. J’hésite.
Où je deviens chroniqueuse de théâtre : The Breast of TiresiasJe choisis un texte d’Apollinaire… traduit en anglais… adapté en comédie musicale ( !) mis en scène par un metteur en scène new-yorkais, The Breast of Tiresias au Théâtre de la Reine Blanche. Casse gueule vous avez dit casse gueule ? Que voulez-vous que je vous dise ? La facilité m’ennuie. Peut-être le besoin de me prouver que je mérite cette opportunité. De faire les choses en grand.
Et puis je ne sais pas… l’originalité, l’entrain, l’envie qui se dégage du projet me plait. Ma curiosité est piquée. J’ai hâte de voir ce que cela peut donner.
Les jours précédents je lis Apollinaire. Un peu perplexe. Je découvre l’univers poétique et décalé de l’auteur et suis étonnée de tant de… tant de… tant de surréalisme ! Mon dieu, dans quoi me suis-je embarquée ?
J’assiste au spectacle. J’aime.
Et après ?
Comment mettre des mots, les bons mots, sur cette expérience ? Car ce ne sont pas mes mots que l’on attend, ni mes pensées - comme je me plais à les déverser en vrac ici - mais bien un article structuré, qui retranscrit mes impressions et donne les clefs suffisantes au spectateur pour le guider judicieusement dans ses choix.
Un véritable exercice de style.
Si j’avais écrit ma chronique comme un billet sur ce blog, je vous aurai parlé du fond.
Bien plus.
Où je deviens chroniqueuse de théâtre : The Breast of TiresiasDe cette femme, Thérèse, qui se refuse femme, car être une femme l’enferme, l’ennui. Je vous aurai parlé de sa soif de pouvoir, sa volonté, non pas de parité, mais de domination. J’aurai cité les chiennes de garde, les ni putes ni soumises, et ces femmes qui se refusent femme, qui devient homme, et qui font peur. J’aurai évoqué la peur des hommes qui se sentent menacé, non pas dans leur masculinité mais dans leur humanité. On a beau tourner le problème dans tous les sens, Apollinaire en fait le constat simple et édifiant : c’est bien les femmes qui portent les enfants, depuis la nuit des temps et certainement pour un bon bout de temps encore.
Je vous aurai dit enfin, comme j’aime la fin de cette intrigue et le message qui s’en dégage. Oui, nous sommes tous pluriels : féminin, masculin, destructeur, créateur, triste, gai…
Où je deviens chroniqueuse de théâtre : The Breast of Tiresias
Et comme le chantent, et dansent les comédiens en guise de final :
Où je deviens chroniqueuse de théâtre : The Breast of Tiresias
There a lot of things that you can do alone… but it takes… two to tango, two to tango!
Où je deviens chroniqueuse de théâtre : The Breast of TiresiasJ’ai aimé la démarche du metteur en scène Eric Wallach qui a osé prendre le texte (sacré en France le texte) de l’auteur qui a inventé (excusez du peu) le mot surréalisme, l’a traduit (à la virgule prêt) en anglais, l’a transformé en comédie musicale, l’a transposé dans un univers visuel et musical entre rêve et réalité, passé et présent, et en a, au final, si bien respecté l’esprit et la liberté de ton, qu’il semble plus fidèle à l’original que l’original lui-même.
J’ai aimé l’énergie des comédiens, facétieux, intrusifs, habités par la folie de l’œuvre. L’allure que leur donnent leurs costumes, en apparence débraillés, mais quand on y regarde de plus près, travaillés, fouillés. Tout comme le décor. Au premier regard, nu et simple. Mais pas simpliste.
J’ai aimé cet esprit « années folles » créé autours de nous, spectateur, et cette sensation de se laisser transporter de notre plein grès ailleurs, dans un tourbillon joyeux et festif.
Audace. Energie. Originalité. Gaieté.
Où je deviens chroniqueuse de théâtre : The Breast of TiresiasOù je deviens chroniqueuse de théâtre : The Breast of Tiresias
 Voilà ce que je vous aurai dit.
Le message aurait-il été au final si différent ? Je vous laisse seul juge puisque l’article a été publié ici.
Car au final, l’essai a été transformé. Et je m’engage pour un bout de temps sur ce nouveau chemin.
A très bientôt donc, pour de nouvelles aventures théâtrales. Et n’hésitez pas à aller voir :
Où je deviens chroniqueuse de théâtre : The Breast of TiresiasThe Breasts of Tirésias
du 26 août au 14 septembre 2010
Théâtre de La Reine Blanche
2 bis passage Ruelle, 75018 Paris
achat de billet: thebreastoftiresias.com
tarifs: normal 18€ - réduit 14 €
promo pour une place achetée, une place offerte le dimanche soir, en passant par billet réduc.


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