Véronique Tadjo est une fine observatrice. Dans son dernier roman, Loin de mon père, son champ d’investigation est l’ancrage culturel, la tradition à laquelle elle donne une amplitude inhabituelle en l’exposant à une double perspective : l’individu et le monde. Le monde, c’est ce qui éloigne, qui transforme, qui donne à vivre une autre vie. L’individu, c’est ce qui reste gravé au fond de soi.
Nina revient au pays pour organiser les funérailles de son père. Replongée dans des coutumes qu’elle croyait avoir oubliées, bercée par les notes du piano maternel qui ne résonnent plus que dans son souvenir, elle laisse revenir à elle son enfance, les lieux du passé, ses amitiés éteintes et même un ancien amour. Bilan dur, mais vrai, écrit dans un style sans concession et dénué de tout sentimentalisme, Loin de mon père livre en filigrane une autre analyse, celle d’un pays, la Côte d’Ivoire, qui vit de plus en plus mal sa fracture politique.