- Le Cardinal Newman s’est converti au catholicisme après un enseignement rigoureux et détaillé des Pères de l'Eglise, ainsi que des premières communautés chrétiennes. Qu'est-ce qu’il a découvert en eux qui a pu le décider à faire ce pas ?
L’attention de Newman à l’égard de l'Eglise primitive a principalement porté sur la doctrine apostolique et son développement chez les Pères du IIIème et IVème siècles. Il avait étudié attentivement les Conciles des premiers siècles et l’édification de la doctrine trinitaire et christologique qui en était résultée.
Il connaissait très bien les positions de Pères tels que saint Athanase d'Alexandrie sur la divinité et l'humanité de Jésus-Christ, et il déclara un jour qu'il était devenu catholique, entre autres raisons, parce qu’il avait la certitude que si saint Athanase se trouvait à Oxford, il assisterait au culte dans une église catholique.
Newman regardait les premiers chrétiens, avec leur vie pieuse et leur activité dans le monde, comme des témoins de l'Evangile. En général, il ne fait pas de commentaires directs sur eux, mais il n’est pas douteux qu’ils soient dans l'horizon de sa vision de l'Eglise, composée d'hommes ayant un ministère par vocation divine, le peuple chrétien représentant visiblement l'Eglise dans le monde et dans la vie des peuples.
- Quels arguments utilisait-il, par exemple, pour justifier que le Pape est authentiquement le successeur de Pierre ?
Son argument principal est que tout ce qui est important, dans ce que l'Eglise croit et vit au dix-neuvième siècle - à son époque donc - est déjà comme en germe dans la doctrine et les activités évangéliques. Ceci est au cœur de sa doctrine sur le développement dogmatique, qu’il a exposée dans son ouvrage Essai sur le développement de la doctrine chrétienne, publié en 1845, avec une édition augmentée en 1877.
Pour répondre aux objections protestantes selon lesquelles de nombreuses doctrines de l'Eglise romaine - y compris sur la papauté et son autorité - seraient des corruptions de la doctrine évangélique, Newman a opposé, par des arguments historiques et un schéma de compréhension théologique, que cette apparente variation de doctrine, en certains cas, obéit à un développement de l’intérieur, qui n’a pas déformé la doctrine mais a progressivement contribué à lui donner sa forme complète.
- Comment Newman expliquait-il l'idée de Tradition, et quelle importance avait-elle pour lui ?
Les Anglicans acceptent la Tradition des premiers siècles de l'Eglise, mais elle n’est pas pour eux une catégorie théologique fondamentale. Newman considère au contraire que la Tradition est radicalement unie à l'Église et à sa marche à travers les siècles. Le sujet de la Tradition, c’est l'Église elle-même et c’est pourquoi la perspective de Newman est totalement liée à sa vision ecclésiologique.
- L’un des points sur lesquels le Cardinal a le plus insisté a été le rôle des laïcs dans l'Eglise. Cela a-t-il quelque chose à voir avec son étude sur les débuts du christianisme ?
Oui, au sens que j’indiquais au début de cette entrevue, en réponse à la première question.
- Quelle idée Newman se faisait-il de l'Université? Que pensait-il de la formation qui devait y être donnée, en particulier dans le domaine religieux et culturel ?
Newman se faisait une haute idée de la formation universitaire parce qu’il considérait qu’elle était essentielle à la construction du caractère de l'homme et également du chrétien. Il l’avait appris de son expérience à Oxford, où une importance primordiale était donnée à ce que l’on appelait l'éducation libérale. "Libéral", a ici le sens de formation ouverte sur de larges horizons humains et culturels, qui puissent offrir aux étudiants une vision adéquate du monde et leur permettre de communiquer convenablement avec les autres.
Cependant, cette formation d'Oxford n'était pas pour lui suffisamment spirituelle et chrétienne, même si elle l’était alors en un sens formel et officiel. En devenant catholique, il n'a jamais abandonné son estime pour l'éducation culturelle et humaine dispensée à Oxford et il s’est efforcé de l'élever à un niveau éducatif supérieur dans le projet de l'Université catholique d'Irlande, lancé en 1852.
Ce projet comprenait la théologie comme nécessaire à la formation de l'esprit et du caractère. Le programme éducatif de Dublin était comme un Oxford enrichi. Les idées de Newman sur ce sujet sont exposées dans son livre Idée d’une Université.
- Quelle est l'importance du voyage du Pape au Royaume-Uni dans le cadre de la béatification de Newman? Quelle importance intellectuelle donne-t-il au futur bienheureux ?
Presque tous les Papes du XXème siècle ont parlé de Newman et ont accordé beaucoup d'attention à ses écrits. Quand il était professeur de théologie, le Pape actuel connaissait l'œuvre de Newman, en partie parce que ce fut dans son pays que les idées et les textes théologiques sont entrés massivement en Europe au début du XXème siècle.
Le Pape se rend au Royaume-Uni pour béatifier Newman en un lieu proche de Birmingham, une ville où Newman a vécu pratiquement toute sa période catholique, jusqu'à sa mort en 1890. Une autre raison au voyage du Pape est certainement de saluer par sa présence les développements récents survenus dans le monde anglican, bien que cela se fasse dans le respect de l'anglicanisme et indirectement. L’importance œcuménique du voyage n'est que secondaire.
LIENS UTILES :
The cause for the canonisation of John Henry Cardinal Newman
[Uniquement en anglais]
The international Centre of Newman friends
[versions française, anglaise, italienne, allemande]
Article : Le sens de la béatification de Newman [France Catholique]
par le Père K. Beaumont
Président de l'Association française des amis de Newman
Jeu de briques
Snake
Pacman
Bubble