SECTION II : LA PREMIERE EXPANSION
Les chrétiens, persécutés par le Sanhédrin, se séparèrent très vite de la Synagogue. Le christianisme, depuis ses origines, fut universel, ouvert aux “gentils” (1), lesquels furent déclarés libres à l’égard des prescriptions de la loi mosaïque.
1. Le premier élan
Jésus, alors qu’il demeurait encore avec eux sur la terre, avait averti les siens : « Le disciple n'est pas au-dessus du maître » (Matthieu, 10, 24). Le Sanhédrin le condamna à mort pour s’être proclamé le Messie, le Fils de Dieu. L’hostilité des autorités d’Israël, après cette condamnation, devait se reporter sur les Apôtres, qui annonçaient la Résurrection de Jésus-Christ et confirmaient sa prédication par des miracles opérés devant tout le peuple. Le Sanhédrin tenta de les faire taire, mais Pierre répondit au Grand Prêtre « qu’il faut obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes » (Actes 5, 29). Les Apôtres furent molestés, mais ni les menaces, ni la violence ne parvinrent à les faire taire. Ils sortirent joyeux de cette épreuve pour « avoir été jugés dignes de subir des outrages pour le Nom » de Jésus (Actes 5, 41). La mort du diacre saint Etienne, lapidé par les juifs, fut le point de départ d’une grande persécution contre les disciples de Jésus. La séparation entre christianisme et judaïsme devint toujours plus profonde et plus patente. L’universalisme chrétien apparut rapidement, contrastant avec le caractère national de la religion juive. Fuyant Jérusalem, des disciples de Jésus se réfugièrent à Antioche, en Syrie, l’une des grandes métropoles de l’Orient. Certains d’entre eux étaient hellénisés. Plus ouverts que les juifs de Palestine, ils commencèrent à annoncer l’Evangile aux gentils. Dans cette Antioche cosmopolite, l’universalisme de l’Eglise devint une réalité. C’est là, précisément, que les disciples du Christ commencèrent à porter le nom de “chrétiens”.
2. L’universalité du christianisme
L’universalité de la rédemption et de l’Eglise de Jésus-Christ fut solennellement confirmée par une action divine miraculeuse dont l’Apôtre Pierre fut à la fois l’acteur et le témoin. Il lui fut réservé - comme une preuve supplémentaire de son Primat - d’ouvrir aux gentils les portes de l’Eglise. Les signes extraordinaires qui accompagnèrent, à Césarée, la conversion du centurion Corneille et de sa famille eurent pour Pierre une importance décisive. « Je constate en vérité - dit-il - que Dieu ne fait pas acception des personnes, mais qu'en toute nation celui qui le craint et pratique la justice lui est agréable » (Actes 10, 34-35).
A Jérusalem, ce fut la stupéfaction lorsqu’on annonça que Pierre avait accordé le baptême à des gentils incirconcis. L’Apôtre dut préciser en détails ce qui s’était passé avant que les judéo-chrétiens de la Cité sainte ne changent d’état d’esprit et ne dépassent leurs préjugés invétérés. Ils commencèrent alors à comprendre que la rédemption du Christ était universelle et que l’Eglise était ouverte à tous : « Ces paroles les apaisèrent, et ils glorifièrent Dieu en disant : “Ainsi donc aux païens aussi Dieu a donné la repentance qui conduit à la vie !” » (Actes 10, 18). Toutefois, un dernier obstacle s’opposait encore à la victoire définitive de l’universalisme chrétien. L’admission des gentils dans l’Eglise avait été, pour beaucoup de judéo-chrétiens attachés à leurs anciennes traditions, une nouveauté difficile à comprendre. Ces derniers considéraient que les convertis issus de la gentilité devaient, à tout le moins, pour être sauvés, être circoncis et observer la loi de Moïse. Ces exigences, qui troublèrent beaucoup les convertis concernés, eurent cependant le mérite d’obliger à poser ouvertement la question des relations entre la Loi ancienne et la Loi nouvelle, et de marquer sans équivoque l’indépendance de l’Eglise à l’égard de la Synagogue.
(à suivre)
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NOTE
(1) Cette expression (en hébreu : goyim), traduite aussi par "les nations" ou "les païens" désigne, dans la Bible, tous les peuples autres que le peuple juif, seul peuple élu.