De plume en brouillon, de brouillon en lettres, de lettres en envois hâtifs, les mots se sont accumulés, ces dernières semaines. Mots utiles, mots précis, exercés de pratique et englués de raisonnable, ils ont finalement tari ce qu’ils étaient censés fluidifier. Les mots, ces vieux ennemis.
J’ai repris mon petit carnet, hier soir. J’y ai déposé une phrase, une seule, mais je pensais à toi, et elle n’avait pas de sens. J’ai tenté l’irisé de mon écran d’ordinateur et j’ai regardé longtemps clignoter le curseur du traitement de texte avant de fermer ce nouveau document sans contenu. Il s’appelle Document 4, dans mes fichiers. Le quatrième à rester vierge. Il est archivé, avec la date et l’heure, l’heure, mon dieu, si tardive qu’elle n’a presque plus de raison de faire encore sursauter.
Ce matin, j’ai tout jeté. Le carnet, son pauvre bredouillis d’espoir, et la somme de brouillons qui l’avaient précédé. J’ai jeté mon stylo, aussi.
Je t’ai écrit.
Ca ne valait rien.
Et j’ai pensé : vivement qu’on soit loin. J’en aurais pleuré.