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Piigs

Publié le 22 septembre 2010 par Insideamerica

PIIGSJe suis un couche tard. C’est comme ça. C’est la nuit que je commence à fonctionner à peu près normalement. C’était parfait quand je travaillais à Pittsburgh. Ça me laissait trois bonnes heures d’avance sur les bureaux de Californie et seulement six de retard sur Paris : juste de quoi amortir mes démarrages difficiles le matin.  Depuis que je suis en Californie évidemment, c’est le contraire. Je lutte contre mon biorythme pour aligner trois pensées pertinentes avec les gars de la côte Est avant midi, et je ne parle pas des Parisiens qui, à m’écouter parler à sept heures du matin, doivent vraiment penser que plus je m’éloigne vers l’Ouest, plus je m’abrutis.

Lucide sur l’effet de ma cadence horaire sur ma performance intellectuelle, je lutte depuis un mois pour rétablir la seconde en domptant la première : faut que je me couche plus tôt pour me lever plus tôt ! Elémentaire comme un exercice de maths du même niveau. Sauf que ma tête à moi n’est pas copine avec les maths. Donc : pas si facile. Ce blog par exemple, que j’avais pris l’habitude d’alimenter à une heure avancée de la soirée (au top de ma forme donc !), souffre d’une courte verve depuis notre arrivée en Californie. Pas d’inspiration avant 22 heures, désolé.

Heureusement, il reste l’actualité pour toujours trouver matière à commentaire (c’est facile : les journalistes font ça tout le temps) et re-heureusement, ça reste même parfois rigolo. Ce soir donc, je vous réchauffe un peu d’actu qui m’a intéressé cette semaine sur les PIIGS. Ou plus exactement une absence d’actualité sur ce sujet, ce qui a intéressé mon épouse adorée, qui m’en a parlé, et ça m’a intéressé (rendons à Cesar ce qu’il n’a pas volé). En plus mon agenda est bizarrement vide demain matin et je vais pouvoir me coucher tard.

PIIGS (coochons), c’est l’acronyme peu flatteur qu’utilisait la presse suite à la crise financière grèque pour désigner le groupe de pays qui allait emporter l’économie européenne toute entière dans les chiottes de la compétitivité mondiale : Portugal, Italie, Irlande, Grèce et Espagne (Spain). Je soupçonne d’ailleurs que la France ne doive qu’à son « F » initial d’avoir été laissée de côté de cette association de malfaiteurs… (en attendant que l’on trouve quelque chose à titrer sur les FUKS: France, UK, Sweden ?) .

Bref, c’était drôlement accrocheur cette histoire de PIIGS qui, s’étant bâfrés de déficits publics, allaient faire s’effondrer un Euro un peu trop fier pour être honnête, et entraîner dans leur chute toute l’Union Européenne, non sans avoir brouillé à jamais ses deux moteurs les plus puissants, la France et l’Allemagne, et avec eux tout avenir d’intégration politique. Une sorte de déflagration ultime de l’Europe sociale décadente depuis qu’on distribuait du pain gratuitement dans les arènes de Rome (d’ailleurs, on se demande bien comment le Colisée tient debout depuis tout ce temps). Ça avait de la gueule sur Fox News, mais aussi sur CNN et même sur MSNBC.

Et puis rien. On est passé à autre chose. Les PIIGS ne sont pas tout à fait saignés, il n’y a pas encore d’Euro-Sud et d’Euro-Nord, le dollar ne vaut toujours que 75 centimes d’Euro-Entier, la France est toujours copine avec l’Allemagne. L’Europe retrouve même un brin de croissance et le chômage (même en France) y reste moins élevé  qu’aux Etats-Unis. Circulez, y a rien à voir. Repassez dans un siècle ou deux pour ré-annoncer la catastrophe et boire sur les cendres du Parthénon.

Je ne sais pas ce qui me frappe le plus dans cette (absence de) actualité. L’étonnante résilience du modèle européen, la stratégie éditoriale de la peur suivie par les médias américains, ou leur extraordinaire silence suivant l’annonce d’une catastrophe qui n’a pas (encore) eu lieu ? Sans doute un peu des trois. Un seul article (CNN money) reconnaissait le 17 septembre dernier que l’on avait peut-être exagéré aux Etats-Unis les conséquences de la crise grèque, et que l’Europe devait sans doute « faire quelque chose de bien » pour résister si placidement à toutes les crises.

Jon Stewart (le « Daily Show ») appelle à « une marche pour le retour à la raison » le 30 septembre à Washington. Et je me demande vraiment s’il y aura des journalistes présents ce jour là pour en faire la Une de l’actualité… Mais ce serait sans doute exagéré !


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