Le XIXème siècle. Après la fanfare de la Révolution Française, la chute des Rois, Bonaparte traçant les frontières de l’Europe à la pointe de l’épée, l’heure de la jeunesse est arrivée. Dans tous les pays se “dressent en même temps, le regard tourné vers les étoiles”, une jeunesse enthousiaste. Le XVIIIème a appartenu “aux vieillards et aux philosophes, à Voltaire et à Rousseau, à Leibnitz et à Kant, à Haydn et à Wieland, aux placides et aux tolérants, aux grands esprits et aux savants maintenant c’est le règne de la jeunesse et l’intrépidité.”
Et pourtant pendant 15 ans, le moulin de la destruction lève sa hache. “Divers est leur trépas, mais pour tous il est précoce.” En France André Chénier, Apollon d’un nouvel hellénisme, trainé à la guillotine le dernier jour de la terreur. En Angleterre en quelques années, John Keats, Shelley et Lord Byron, la plus noble floraison lyrique est anéantie. Pour l’Allemagne Novalis, Kleist, Raimund, Büchner, Hauff, Schubert, expirent avant le temps. Leopardi, Bellini, Gridojedof, Pouchkine endeuillent Italie et Russie.
Seul Goethe est toujours debout à Weimar.
“Un seul, un seul de la troupe sacrée, le plus pur de tous, ne veut point quitter cette terre dépouillée de ses dieux, Hölderlin.”
Hölderlin (1770-1843), pour qui la poésie est le sens de la vie. Son génie montre son autre visage, l’obscurité du démon. “Goethe, Shiller et tous les autres reviennent de la poésie comme d’un voyage en pays étranger, fatigués parfois, mais toujours l’esprit assuré et l’âme sereine : Hölderlin, au contraire, sort meurtri de l’état poétique, comme s’il s’était précipité du haut du ciel et il reste blessé, brisé, et comme mystérieusement exilé dans le monde quotidien.”
Qui mieux que Stefan Sweig sait nous faire partager le génie, l’âme meurtrie de celui qui atteint l’infini.
Qui aujourd’hui, en ces temps de petits bourgeois rebelles télédiffusés, pourrait être un Kleist, un Nietzsche ou un Hölderlin ?
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Lectori Salutem, Pikkendorff
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