Suicidal

Je me suis levé un matin en nouvelle compagnie. Au dej, la radio passait une chanson très pop, qui alliait rétro (pompage des accords et de la mélodie de Stand by Me) et rétro (le même esti de beat de rap qui continue d'enchanter le public après trente ans d'usure). La charmante dame connaissait cette chanson et s'étonna bruyamment du fait que le refrain en soit différent de celui qu'elle connaissait.
En effet, les mots « in denial » remplaçaient « suicidal ». Pas plus tard que quelques jours plus tard, assis dans un café en Europe, j'entends cette même insupportable ritournelle nappée d'auto-tune. Je lève les yeux et les dix-huit postes de télé diffusent le clip de ladite chanson. Je prends la peine d'écouter le texte (dans la toune) et de lire le sous-texte (les images). Effectivement, le petit garçon dit « suicidal ».
Grosso modo, il est pas bien beau, et il voit tout plein de nanas partout qui ne le voient pas, et ça lui donne envie de se flinguer. Rien de bien intéressant, sinon l'ironie de cette musique feel-good guillerette — allons cueillir les pâquerettes (par la racine ?)—, apposée à un contenu si sombre et déprimant de superficialité. Par contre, ce qui est vraiment fortiche, c'est la conclusion de l'affaire. On censure « suicidal », qu'on remplace par « in denial », parce qu'au final :
On veut pas voir ce kid qui se tue parce qu'on ne le regarde pas.
—© Éric McComber