Méditation de Dom Guéranger
Dom Guéranger poursuit sa réflexion et sa méditation en ces termes :
« Le genre humain tout entier vous est redevable. o Gabriel! et nous acquittons aujourd'hui sa dette de reconnaissance envers vous. Du haut du ciel, vous considériez avec une sainte compassion nos malheurs: car toute chair avait corrompu sa voie, et l'oubli de Dieu devenait de plus en plus universel sur la terre. C'est alors que vous recevez du Très-Haut la mission d'apporter la Bonne Nouvelle à ce monde qui allait périr. Qu'ils sont beaux, vos pas, ô Prince céleste, lorsque vous vous élancez du séjour de la gloire vers notre humble demeure ! Qu'il est tendre et fraternel, votre amour pour l'homme, dont la nature si intérieure à la vôtre va être élevée à l'honneur sublime de l'union avec Dieu même ! Avec quel respect vous approchez de la Vierge qui surpasse en sainteté toutes les hiérarchies angéliques!
« Heureux messager de notre salut, vous que le Seigneur appelle quand il veut déployer la force de son bras, daignez offrir l'hommage de notre gratitude à Celui qui vous envoya. Aidez-nous à acquitter notre dette immense envers le Père « qui a tant aimé le monde qu'il lui a donné son Fils unique (Jean ) » : envers le Fils « qui s'est anéanti en prenant la forme d'esclave (Philippiens II, 7)) » ; envers l'Esprit Divin « qui s'est reposé sur la Fleur sortie de la tige de Jessé (Isaïe XI, 1-2)) ».
« C'est vous, ô Gabriel ! qui nous avez enseigné la salutation que nous devons présenter à « Marie, pleine de grâce ». C'est du ciel que vous avez apporté ces sublimes paroles; le premier, vous les avez prononcées ; les enfants de l'Eglise qui les ont apprises de vous les répètent par toute la terre, le jour et la nuit : obtenez que notre grande Reine les agrée toujours de notre bouche.
« Ange de force, ami des hommes, continuez en notre faveur votre auguste ministère. Nous sommes environnés d'ennemis terribles ; notre faiblesse accroît encore leur audace; venez à notre secours, fortifiez notre courage. Assistez les chrétiens, en ce temps de conversion et de pénitence; faites-nous comprendre tout ce que nous devons à Dieu, après cet ineffable mystère de l'Incarnation dont vous fûtes le premier témoin. Nous avons oublié nos devoirs envers l'Homme-Dieu, et nous l'avons offensé: éclairez-nous, afin que nous soyons désormais fidèles à ses leçons et à ses exemples. Elevez nos pensées vers l'heureux séjour que vous habitez; aidez-nous à mériter dans les rangs de votre sublime hiérarchie les places que la défection des mauvais anges a laissées vacantes, et qui sont réservées aux élus de la
terre.
« Priez, ô Gabriel, pour l'Eglise militante, et défendez-la contre l'enfer. Les temps sont mauvais ; les esprits de malice sont déchaînés : nous ne pourrions subsister devant eux, sans le secours du Seigneur. C'est par les Saints Anges qu'il donne la victoire à son Epouse. Paraissez au premier rang. Archange force de Dieu. Repoussez l'hérésie, contenez le schisme, dissipez la fausse sagesse, confondez la vaine politique, réveillez l'indifférence : afin que le Christ que vous avez annonce règne sur la terre qu'il a rachetée, et que nous puissions chanter avec vous et avec toute la milice céleste : Gloire à Dieu! paix aux hommes ! ».
Puis il termine la célébration de la Fête de Saint Gabriel par cette hymne en l’honneur du Saint Archange, que nous donne le Bréviaire des Dominicains
HYMNE.
O Robur Domini, lucide Gabriel !
Quem de principibus signat Emmanuel : A quo promcruit discere Daniel Hirci prodigium feri.
Tu Vatis precibus curris alacriter,
Monstras hebdomadum sacrata tempora : Quæ nos retherei germine Principis,Ditabunt bene gaudiis.
Baptistæ pariter mira parentibus
Affers a superis lœtaque nuntia, Quod mater, sterili corpore, pignora Longævo pariet patri.
Quod Vates referunt mundi ab origine,
Hoc sacrae veniens tu plene Virgini Longo mysterium pandis ab ordine, Verum quod pariet Deum.
Pastores Solymos, inclyte, gaudiis
Implesti, reserans cœlica nuntia : Et tecum celebrat turba canentium Nati mysterium Dei.
Oranti Domino nocte novissima,
Dum sudor madidum sanguine conficit, Adstas a superis, ut calicem bibat, Assensum patris indicans.
Mentes catholicas, inclyta Trinitas,
Confirma fidei munere cœlico : Da nobis gratiam, nos quoque gloriam Per cuncta tibi saecula. Amen.
Force de Dieu, lumineux Gabriel, toi qu'Emmanuel distingue parmi les princes de la milice céleste, c'est toi qui fus choisi pour dévoiler à Daniel la vision du bouc terrible.
A la prière de ce Prophète, tu accours du ciel; tu lui expliques le mystère des semaines sacrées qui doivent enrichir et réjouir la terre, par la naissance du Roi des cieux.
C'est toi qui apportes la nouvelle joyeuse et admirable aux parents de Jean-Baptiste ; toi qui révèles qu'une mère stérile donnera un fils à un vieillard cassé par les ans.
Ce que les Prophètes annoncèrent dès l'origine du monde, tu viens le manifester pleinement à la Vierge sacrée ; tes paroles développent le mystère, en lui annonçant qu'elle enfantera le vrai Dieu.
C'est toi, auguste Archange, qui combles de joie les pasteurs de Judée, en leur manifestant la céleste nouvelle. La troupe angélique célèbre avec toi le mystère du Dieu qui vient de naître.
Lorsque le Seigneur dans la dernière nuit, inondé d'une sueur de sang, souffre l'agonie, tu descends des cieux, tu lui déclares qu'il doit boire le calice, selon la volonté du Père.
Daignez, ô Trinité glorieuse, confirmer les cœurs catholiques par le don céleste de la foi ; donnez-nous la grâce, que nous voyions votre gloire dans les siècles sans fin. Amen