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happy birthday 51 Pegasi b

Publié le 06 octobre 2010 par Plumaplumbum

exoplanete

Il y a tout juste 15 ans de cela, le 6 octobre 1995, fut découverte la première exoplanète, 51 Pegasi b. L’occasion rêvée pour y consacrer un petit article et ainsi faire le point sur la recherche actuelle.

- Qu'est-ce qu'une exoplanète?

Une exoplanète est une planète située hors du système solaire, gravitant autour d'un autre soleil que le nôtre ("exo-" en grec signifiant "hors de"). On parle aussi de planète extrasolaire. Pour le commun des mortels les planètes sont de petites sphères rocheuses où l'on peut "poser" le pied, comme Mars par exemple. En considérant notre système solaire (voir ici) vous remarquerez quatre planètes plus grosses que les autres. Ce sont des "géantes Gazeuses". Les caractéristiques principales de ce groupe de planètes sont contenues dans cette appelation: elles sont donc géantes et gazeuses (on ne peut pas y "poser le pied", enfin je vous le déconseille). Jupiter, la plus volumineuse des quatre, est énorme comparée à la terre. Elle pourrait en effet contenir plus de 1000 exemplaires de notre petit caillou!.. Cette toute première exoplanète découverte, 51 Pegasi b (en référence à son soleil 51Pegasi, situé dans la constellation du pégase, d'où son nom) est elles aussi, comme la grande majorité des 490 autres planètes découvertes à ce jour, une géante gazeuse (oui vous avez bien entendu, presque 500 planètes, en seulement 15 ans !).

Les rescapés de cette introduction, ceux qui n'ont pas sombré dans un sommeil profond, se posent sans doute la question suivante : Pourquoi ne découvre-t-on que des géantes gazeuses et pas des planètes comme la terre?

L'exoplanétologie est une science très jeune. Que la plupart des exoplanètes découvertes à ce jour soient des géantes gazeuses n’a aucune valeur statistique, mais est tout simplement dû à notre limitation technologique. Pour faire simple : il ne suffit pas de balader de grosses jumelles pour trouver une planète, car pour cela il nous faudrait de biiieeeeen plus grosses jumelles. Sauf pour quelques rares exceptions (dues à des conditions particulièrement favorables) nos yeux ne sont pas encore assez perçants pour les voir : trop lointaines, trop peu lumineuses, éblouissement dû à leur soleil trop proche. Comme le dit Michel Mayor, heureux papa de 51 Pegasi b : « Imaginez une bougie placée à un mètre d'un phare de marine et vous essayez de la voir depuis une distance de 1000 km. La lumière du phare rend évidemment la bougie totalement invisible »... En attendant d’avoir une paire de Mégajumelles sous le sapin les scientifiques sont obligés d’emprunter des chemins détournés.

- Comment découvre-t-on une exoplanète?

Le transit :

Observons un maximum d’étoiles pendant des années ; la baisse temporaire et périodique de la luminosité de l’une d’elles nous indique qu’une planète est passée devant (voir schéma), comme lors d’une éclipse. Cette technique, la plus simple en apparence, permet de connaître assez précisément la taille et la masse de l'objet en question mais possède de nombreux défauts : premièrement il faut que cette planète passe entre nous et son soleil, ce qui limite considérablement le nombre d’objets observables (lancez une centaine de vinyles en l’air, prenez une photo : vous en verrez au final assez peu par la tranche). Deuxièmement il faut que cette planète soit suffisamment grosse pour que la baisse de luminosité soit observable. Nos instruments sont assez sensibles, mais les perturbations dues à notre atmosphère (responsables du scintillement  des étoiles) nuisent aux mesures les plus fines. L'observation spatiale permet de remédier à ce dernier problème, mais à défaut d’avoir un télescope dans l’espace (nous verrons ça plus loin) les scientifiques privilégient la technique suivante.

Vitesse radiale :

Vous avez sans doute remarqué l’étrange variation sonore de la sirène d’un véhicule de pompier passant dans la rue. Quand il s’approche le son est plus aigu, quand il s’éloigne plus grave ; c’est ce que l’on appelle l'effet Doppler. Quand vous déplacez votre doigt à la surface de l’eau les ondes sont plus compressées à l’avant qu’à l’arrière ; il en va de même pour le son : celui-ci est compressé à l’avant du véhicule en mouvement et dilaté à l’arrière (voir schéma). Notre perception du son est directement liée à la fréquence : ondes contractées = hautes fréquences = sons aigus / ondes dilatées = basses fréquences = sons graves. Voilà pourquoi le son de la sirène est plus aigu à l’approche et plus grave quand le véhicule s’éloigne. Il suffit pour comprendre la suite de savoir que la lumière se comporte comme une onde et que le phénomène de la sirène de pompier est comparable en optique. La lumière visible par l’œil humain s’étale du rouge au violet (couleurs de l’arc en ciel). Les ondes sont plus rapprochées en allant vers le violet et plus dilatées en allant vers le rouge (voir image). Ainsi, à l’instar de notre véhicule de pompier, un objet lumineux en mouvement voit son "spectre" (sa signature lumineuse en quelque sorte) dévier vers le violet quand il s’approche de nous et vers le rouge quand il s’éloigne. C’est en exploitant ce phénomène que l’on peut découvrir des exoplanètes par la méthode des vitesses radiales. On observe un maximum d’étoiles et quand on en trouve une dont le spectre varie périodiquement, tantôt vers le rouge, tantôt vers le violet, c’est qu’il y a de grandes chances que ça soit dû à l’attraction causée par une grosse planète (voir cette image et celle-ci). Le gros avantage de cette méthode c’est de permettre de découvrir bien plus de planètes qu’avec la technique précédente. Inconvénients : la planète en question doit être très massive et très proche de son étoile pour que son influence soit détectable, ce qui limite nos découvertes à des géantes gazeuses bien moins vivables que Jupiter (déjà pas très folichon) étant donné leur brûlante proximité d’avec leur soleil. Il est nécessaire aussi que le mouvement de va-et-vient de l’étoile se fasse dans notre axe de visée… C’est par cette méthode qu’a été découvert 51 Pegasi b ainsi que la plupart des exoplanètes connues à ce jour (d'où la majorité de géantes gazeuses).

Astrométrie :

Tout comme la méthode précédente celle-ci se propose d’observer les mouvements d’une étoile, mais en dehors de l’axe de visée cette fois-ci. Le va-et-vient est alors directement visible : on voit l’étoile bouger. Avantage : contrairement aux deux méthodes précédentes pas besoin d’observer le système planète-soleil par la tranche. Inconvénients : le système ne doit pas être vu par la tranche mais par le haut, ce qui limite aussi le nombre de planètes détectables. De plus les perturbations atmosphériques introduisent un biais, rendant très difficile ce genre d’observation.

Microlentilles gravitationnelles :

Technique la plus compliquée à comprendre, je vais donc faire court. Tout objet possède sa gravité (soleil, terre, etc). Celle-ci agit sur la matière, mais aussi sur la lumière en influençant la trajectoire des rayons lumineux. Ainsi il est possible d’observer des variations de luminosité voire des "mirages" (comme sur cette image), nous permettant dans certains cas de déterminer la présence d’une exoplanète invisible à l’oeil. Inconvénient : il faut un relatif alignement de deux étoiles pour espérer voir la lumière de celle en arrière plan déviée par une planète proche de l’étoile au premier plan. Cette technique, bien que limitée, a le gros avantage de permettre de détecter des planètes bien plus petites qu’avec les méthodes précédentes.

- Où en est-on aujourd'hui? 

Deux télescopes spatiaux, Corot et Kepler, ont actuellement pour mission de défricher le terrain, d’observer (par la méthode de transit) une large zone du ciel et de proposer des candidates aux télescopes terrestres qui ensuite les valident ou non. Ils ont les mêmes objectifs mais ne sont cependant pas en concurrence car observant des secteurs différents.

Corot, télescope spatial Franco-Européen lancé en décembre 2006, est le premier dédié à la recherche d’exoplanètes. 15 planètes « validées » ont été découvertes par ce satellite dont la mission a été prolongée de trois ans. La plus petite, Corot-7b, est une planète rocheuse de seulement 1,7x la terre (mais bien trop proche de son étoile pour être vivable)!

Kepler, lancé en mars 2009 est entièrement dédié à la recherche de planètes extrasolaires. Son miroir trois fois plus grand que celui de Corot (1m contre 30cm) rend possible la détection de planètes semblables à la nôtre. 7 exoplanètes « confirmées » lui sont attribuées, ainsi que 700 candidates !

- Et l’avenir?

La détection indirecte est loin d’avoir dit son dernier mot, en témoigne par exemple le projet SIM(Space Interférometry Mission) de la Nasa  ou encore Gaia de l’agence spatiale Européenne. Cependant L’avenir est à l'observation directe qui nous permettra de découvrir des planètes semblables à la nôtre, des "exoterres", habitables voire habitées (avec un peu de chance).

L’observation directe :

Darwin verra le jour en 2025, sous réserve d’acceptation du projet par l’agence spatiale Européenne. Cette flottille de télescope spatiaux devrait nous permettre d’analyser avec assez de précision l’atmosphère des exoplanètes, y détecter des « biosignatures » (= des indices d’activités biologiques : Oxygène, eau, dioxyde de carbone, ozone, etc).

TPF pour Terrestrial Planet Finder est un projet similaire de la Nasa. Calendrier plutôt flou (annulé en 2007 sous la précédente présidence américaine. Définitivement ou en standby ?)…

JWST pour James Webb Space Telescope est un projet bien concret celui-là, dors et déjà en cours de fabrication. Doit succéder au télescope spatial Hubble en 2014. Observant le ciel dans l’infrarouge ce télescope « pourrait détecter des océans et des éruptions volcaniques à la surface des planètes extrasolaires »

E-ELT pour European Extremely Large Telescope est quant à lui un projet de télescope géant terrestre  dont les travaux devraient débuter en 2011 (à plus de 3000m d’altitude au Chili) pour une entrée en service 2018/2020. Son miroir segmenté (pour des raisons techniques) mesurera 42 m de diamètre, soit quatre fois plus large que le plus grand de nos télescopes actuels! … but affiché : trouver des planètes similaires à la nôtre, apporter des informations sur la composition de leurs atmosphères et y rechercher des biosignatures.

--- Info de dernière minute---

29 septembre : une équipe américaine vient d'annoncer (de confirmer) l'existence d'une exoterre potentiellement habitable! Celle-ci, de son joli nom Gliese 581 g, est à peine plus grande que la terre (suffisant pour retenir une atmosphère) et se situe en "zone habitable" (région favorable à l'apparition de la vie, ni trop loin ni trop proche de son étoile afin que l'eau, s'il y en a, puisse se trouver sous forme liquide). Steven Vogt, découvreur de cette planète a déclaré « (...) étant donné la propension qu'a la vie, à s'épanouir partout où elle le peut, je dirais que la probabilité qu'il y ait de la vie sur Gliese 581 g est de 100 %. Je n'ai quasiment aucun doute à ce sujet. ». Mais aussi à propos des exoterres : « Si elles sont rares, nous ne devrions pas en avoir trouvé une si vite et si proche. La fraction de systèmes avec des planètes potentiellement habitables est probablement de l'ordre de 10 ou 20 %, et quand vous multipliez cela par les centaines de milliards d'étoiles dans la Voie lactée, vous trouvez qu’il pourrait y avoir des dizaines de milliards de ces systèmes dans notre galaxie »           

- En guise de conclusion :

Encore adolescent en 1995 je fus fasciné par cette découverte mais nullement surpris ; c'était pour moi une évidence. Le système solaire ne pouvait pas être unique, c'était trop absurde ; 15 ans et près de 500 exoplanètes plus tard nous savons désormais qu'il est d'une banalité confondante... Peut-être aviez-vous déjà entendu parler d’exoplanètes et dans ce cas vous feriez partie d’un club de privilégiés (une majorité de personnes ne sait même pas qu’il existe d'autres mondes en dehors de notre système solaire, quand certains en 2010 croient encore que le soleil tourne autour de la terre!). Dans le cas contraire j’espère avoir contribué par cet article, que j’ai tenté de rendre le plus clair possible (et malgré son côté plutôt technique), à vous ouvrir de nouvelles perspectives… Je suis viscéralement convaincu que la vie est un phénomène universel et grâces aux prodigieuses avancées en exobiologie et exoplanétologie nous avons de grandes chances d'obtenir des réponses à cette question essentielle dans les prochaines décennies! La recherche d'exoterres ne fait que commencer et il est plus que probable que les 15 années à venir nous offriront des découvertes extraordinaires, avec pourquoi pas une ou plusieurs planètes abritant la vie.

A suivre…


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