Livrez-vous à moi.

Publié le 08 octobre 2010 par Elb
Oui j’avoue, je fais partie de ces bloggeurs qui se font plaisir en s’auto-éditant à moindre coup, évitant ainsi aux lecteurs des maisons d’édition de remplir leur corbeille de tas d’arbres recyclés en papier calligraphié.
A défaut d’avoir la satisfaction de me voir en vitrine du plus grand libraire de la ville, je contribue à sauver la planète. 
C’est déjà ça.
Peut-être que vous réfléchissez depuis longtemps à ce premier livre. Cet opus tellement génial que vous vous dites en l’écrivant : « ouais c’est bon ça, c’est vraiment le bouquin que j’aurai aimé lire… » Du coup, vous vous relisez avec délectation, mais n'avancez pas beaucoup dans l'écriture.
Puis, vous vous imaginez tout le tourbillon promotionnel, les séances de dédicaces, les plateaux littéraires, les cocktails avec un parterre de fans buvant vos paroles à défaut de bon champagne.
Le tout c'est de ce pondre ce fichu manuscrit... 
Et bien non.
Je vais vous livrer un secret : ce n’est pas du tout comme cela que vous devez procéder. Cela peut même contrarier votre instinct primaire d’écrivain en herbe.
En fait, il faut commencer par la commercialisation de votre chef d’œuvre. Peu importe que vous ne l’ayez pas terminé, ni même commencé. Ne vous inquiétez pas si vous n’êtes pas certain du titre, mais n’attendez pas : démarrez la promo dés maintenant. N'hésitez pas une seconde.
Je vous signale même que si vous lisez jusqu'au bout cet article, vous aurez déjà perdu 3 minutes et 25 secondes.
Attention, il ne s’agit pas d’envoyer un courriel à tous vos amis en leur expliquant que vous avez décidé d’entamer l’écriture de ce grand roman qui sera terminé dans 4 ans à partir d’aujourd’hui.
Non, il vaut mieux commencer par se constituer une base de fans, en phase avec votre phrasé, de sorte qu’il y ait une dizaine de personnes impatientes qui vous réclament haut et fort de publier un truc, n’importe quoi. Cela peut sembler modeste comme objectif, mais c’est plus difficile que vous le pensez.
Alors comment trouver ces lecteurs transis ?Déjà, attendez l’hiver, c’est mieux. Non pas qu’il soit plus facile d’être transi à cette saison, mais l’été vous aurez trop de concurrence avec les magazines people, et là, quoique vous fassiez, vous ne serez jamais au niveau.Évitez vos amis, ou les gens qui rêvent de faire l'amour avec vous, ils ne sont pas suffisamment objectifs.
Publiez sur des magazines gratuits, ou des e-zines, ils sont souvent à la recherche de rédacteurs bénévoles, et disposent d’un éventail de lecteur suffisamment éclectique pour trouver votre bonheur.
Une autre option est de tenir un blog. Le seul problème avec un blog c’est qu’il existe à ce jour des centaines de millions de blogs. Et chaque jour ça augmente.Plus de 100 001 de plus.C'est pas un drame ce palindrome ? Si.
Et si seulement 0,5 % vous semblent dignes d’intérêt, cela en fait 5000 de plus par jour…C’est pas gagné.
Heureusement, il existe tout un tas de théories et de conseils pour vous faire sortir du lot. Malheureusement  tout le monde les lit et les applique.
Je ne vais pas en faire ici la liste exhaustive, mais sachez, qu'en gros il faut : que votre blog soit joli, (pas avec des couleurs criardes genre rose bonbon sur fond jaune pisseux), qu’il soit vivant avec des post réguliers mais pas trop non plus (vous n’êtes pas sur twitter).
Il doit être suffisamment personnel pour être original, mais assez généraliste pour intéresser la planète entière. Par exemple, faire un article pour promouvoir la fonte des canaris sur la banquise intéressera les industriels du chauffage, les écolos, les artistes conceptuels et les amoureux des taches de pisse.
Laissez des réflexions originales, non auto-promotionnelles et intelligentes, sur des sites semblables au votre (cf. post blog à part pour un contre-exemple).
Travaillez vos réseaux Facebook, Twitter, Lindekind, Viadeo, SNCF, facilitez le partage entre ces différentes plateformes, laissez croire qu’aucun commentaire ne sera censuré, que la retraite sera à 45 ans, et répondez le plus possible. Vous n'imaginez pas le nombre d'auteurs à succès qui doivent leur célébrité à leurs relations et aux kilomètres de rails qu'ils se sont tapés.
En fait ce n’est pas le trafic qu’il faut viser, mais un lectorat fidèle et chic, dont vous serez l'élu unique.Le trafic est le piège à éviter. Comme ces bouchons sur l’autoroute, où les véhicules ralentissent tout d’un coup pour avoir le loisir d’observer, brièvement, une voiture en train de fumer sur le bas coté devant la mine déconfite de son conducteur. Ces voyeurs, jetteront donc un coup d’œil mais ne reviendront pas.
Fuyez les lecteurs bouchés.Fidélisez un petit groupe. Gouroutisez-vous.
Une fois que vous maîtriserez bien toutes ces stratégies, et vous pouvez en imaginer d'autres, vous serez enfin célèbre, et si il vous reste un peu de temps, pensez à commencer votre livre. Ou à engager un nègre.